Face aux impasses

C’est le titre de l’avant-dernier livre de feu Sourou Migan Apithy écrit vers 1970 avant le dernier : Telle était la vérité ; les deux livres se complètent. Le premier dresse un diagnostic éclairé de l’impasse politico-institutionnelle de 1970 après l’échec des élections générales de la même année, le second situe les responsabilités ; car ce fin limier de la politique avait déjà subodoré  l’imminence d’un coup d’Etat qui cette fois ouvrira la voie à un régime despotique.

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Le Bénin actuel pour ses fils conscients et patriotes, est entré dans une dangereuse zone de tempête politico-institutionnelle où toutes les institutions, y compris celle qui  constitutionnellement est chargée de réguler leur bon fonctionnement, la Cour Constitutionnelle (article 114), ont perdu leur latin. Foin de l’impudeur et de l’impudence, parce que l’heure est grave. A mon humble avis, la faute capitale inexpiable à l’origine de l’impasse est d’avoir permis à nos honorables représentants à l’Assemblée Nationale d’usurper ces trois prérogatives qui normalement revenaient au pouvoir exécutif ; au moins au niveau du projet de mise en ouvre de cet outil avant technique :

• prendre donc l’initiative unilatérale de voter des  lois sur la mise en œuvre de la Lépi, instrument technique où des projets de loi eussent été mieux indiqués. En l’occurrence le pouvoir exécutif a complètement démissionné dans un domaine, l’organisation des élections, où il doit obligatoirement avoir l’initiative et collaborer avec le législatif ;

• se coopter dans des organes de « supervision » votés par eux; alors que voilà bien un domaine, celui de l’organisation pratique des élections, où un organe technique composé de véritables experts en technologie électorale eût été mieux indiqué que cet échafaudage boiteux de logocrates ;

• prendre une loi scélérate faisant de la correction de la Lépi le préalable à l’organisation de toutes nouvelles élections au Bénin ; alors que c’était avec cette même Lépi qu’ils furent élus sans problème en 2011.

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La cause première de tous nos maux actuels, la tare congénitale source de tous nos ennuis, est donc d’avoir laissé nos députés se fabriquer un rôle soi-disant de supervision et nommer certains d’entre eux dans cet organe éminemment technique.

L’Histoire du monde et de notre pays nous montre abondamment qu’un tel glissement vers le régime conventionnel ou d’assemblée où le législatif s’invite dans un organe exécutif après en avoir voté la configuration, a  toujours été la source des pires blocages. La Terreur sous la Révolution française vient de cette confusion des pouvoirs. Manifestement Sacca Lafia ne paie pas de mine ; ce vétérinaire envoyé dans une galère dont il ne maîtrise apparemment pas les contours, n’a pas le brio, les compétences et le sang-froid de l’universitaire Nassirou Bako, pourtant brocardé à tort comme le père d’une Lépi bâclée ; évidemment seulement pour des opposants mauvais perdants qui d’ailleurs ne le pensaient pas vraiment, puisqu’ils n’avaient guère boycotté les élections présidentielle et législatives de 2011 !

 Dans les deux cas donc, Cps-Lépi ou Cos-Lépi, les dés étaient pipés quand on a voulu faire chapeauter un organe technique, le seul qui maîtrise véritablement les procédures idoines, par un organe de contrôle budgétivore, inefficace, inutilement bavard,  qui depuis janvier 2014 est carrément illégitime et illégal. Le scénario Wahala est à nos portes avec ses ravages irréparables ! L’heure est grave. Aussi le spectacle ubuesque que nous offrent certains de nos compatriotes est-il simplement indécent lors donc que pendant ce temps certains d’entre nous ont le rire jaune ou celui du crocodile. Eh oui ! Je sais que dans les moments les plus tragiques de notre existence, beaucoup de Béninois ont le don de l’humour noir. Ainsi certains continuent de nous distraire ; d’autres ont le génie des slogans ridicules. Comme manifestement à la fin d’une époque ou d’un régime, les trouvailles de notre génie commencent par pleuvoir. L’un est particulièrement amusant : « Après nous, c’est nous » ou plus arrogamment « Après Boni Yayi, c’est Boni Yayi » ! Comment une telle opération de l’Esprit Saint est-elle possible? D’autres slogans que mes compatriotes se sont mis à emboucher sont tout aussi mal indiqués : « On s’est trompé ! Boni Yayi était un malentendu ! C’est un papa malheur » ! Mais de qui se paie-t-on la fiole? Sous le régime Yayi,  Je n’ai rien « eu » comme se plaisent à dire certains de mes compatriotes ; je suis resté Gros Claude comme devant et pourtant, je n’aurai pas l’outrecuidance de ces anciens ministres, cette inélégance de certains honorables députés. Parce que ces derniers  n’auraient eu rien d’autre à faire que ronger leur frein si Boni Yayi ne les avait pas sortis de leur anonymat forcé en les faisant positionner sur une liste FCBE ! Celui qui dit qu’il s’est trompé en politique est un niais ou un rigolo !

 Que faire ? Il faut d’abord que le Président de la République, Chef de l’Etat et chef du Gouvernement (que de pouvoirs) sache qu’il est constitutionnellement le seul capitaine à bord du navire Bénin et qu’il prenne vraiment la situation en mains. Comment ? En :

•  faisant abroger la loi scélérate et renvoyer nos 9 demi-sages à leurs pénates ;

•  faisant prendre des lois dérogatoires au code électoral ;

• organisant de larges concertations des forces vives, le tout pouvant  se terminer par un forum national pour arrêter un agenda électoral consensuel. 

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