Lépi : Yahouédéou revient sur les raisons politiques et techniques de l’échec

En 2009, au moment du vote de la loi portant création de la Lépi, Janvier Yahoudéou était vu comme la peste. Quoique proche des Fcbe (alliance politique au pouvoir), il avait été le seul député à voter contre ladite loi. Janvier Yahoudéou avait crié haut et fort l’inopportunité de la confection, à l’époque, d’une telle liste électorale. Cinq ans après, l’histoire semble lui donner raison. Invité hier de Soleil Fm, il est revenu sur les raisons politiques et techniques qui fondaient ses appréhensions.   

« La Lépi est un outil hautement technique. J’avais suggéré qu’elle ne soit pas confiée aux politiques. Il ne revient pas aux députés de s’occuper de la Lépi (…) Une bonne Lépi ne pouvait pas être prête pour 2011 », a postulé Janvier Yahouédéou sur Soleil Fm ce dimanche 2 novembre 2014. Pour lui, le processus de confection de la Liste électorale permanente informatisée (Lépi) devrait se faire au début du mandat d’un nouveau président de la République, ou pendant son second mandat. « On ne peut pas demander à un président candidat à sa propre succession  de confectionner une telle liste sans qu’il ne tire le drap de son côté », a-t-il soutenu. A ce problème de timing s’ajoutent ceux liés à l’Etat- civil, avec notamment les audiences foraines organisées par le régime Yayi en 2007 et le projet Ravec. « On ne peut pas faire une bonne Lépi sans régler le problème de l’Etat -civil », a constaté l’invité de l’émission le « Grand Rendez-vous ». Le candidat malheureux à la présidentielle de 2011 explique que « les audiences foraines organisées par le gouvernement n’ont tenu compte que des enfants âgés de 15 ans et plus. Ceux qui avaient 14 ans  au moment des audiences foraines auront eu 18 ans en 2011. Que faire ? » Dans la même veine, le projet Ravec a été un échec. «Des milliers d’étrangers sont devenus béninois », a-t-il déploré. Et pour boucler ce volet des entraves politiques à la réalisation d’une bonne Lépi, Janvier Yahouédéou pense qu’on ne peut mettre en œuvre un projet politique d’une si grande envergure sans une phase pilote. Car, la phase pilote «permet de se rendre compte des défis et des difficultés dans la conception.»

Carences techniques

Au plan technique, Yahouédéou rappelle que ses réserves étaient liées aux compétences disponibles et aux délais définis pour la réalisation des différentes tâches. A titre d’exemple, a-t-il cité, pour la cartographie censitaire, il a été prévu un délai de quatre mois au lieu des 12 mois proposés par les experts. Une autre inquiétude était relative au mode de transmission des données des centres de l’intérieur du pays vers le serveur central à Cotonou. Le mode de transfert utilisé fut les cd ou cartes mémoires ; au lieu des mises à jour en temps réels ou différés par téléinformatiques ou satellites. L’usage des cd ou cartes mémoires présentait des risques liés à leur perte ou dégradation.  A ces raisons s’ajoute la sincérité du dé doublonnages. «La biométrie offre des avantages mais il y a beaucoup d’inconvénients, a-t-il souligné. En dehors de la qualité des équipements, on devrait se soucier de la compétence des agents recenseurs et surtout de l’impartialité politique des personnes chargées de valider les traitements post-inscriptions.»  Un dernier facteur technique à prendre en compte est lié à l’énergie. Les kits d’enregistrement avaient une autonomie réelle de 5 ou 6 heures. Or, on devrait les utiliser dans des zones sans électricité.

Il n’y a rien à corriger

Tous ces facteurs techniques et politiques n’ayant pas été pris en compte, Janvier Yahouédéou déduit sans ambages que la Lépi a été un échec. Les atermoiements et remous que connaît le processus de sa correction en sont révélateurs. « A l’étape actuelle, il n’y a rien à corriger, absolument rien, se désole-t-il. Les contradictions internes au Cos-Lépi ne sont d’aucun intérêt». Avant de marteler qu’ « on ne peut pas corriger une chose qui a été mal faite. » L’homme qui lorgne le Palais de la Marina pour la présidentielle de 2016 propose alors qu’il faut simplement « mettre de côté la Lépi et aller aux élections avec une liste alternative ad ’hoc. Mais en respectant la chronologie des élections : Municipales, Législatives et Présidentielle.» Et vu que l’intérêt supérieur de la nation est en jeu, la Cour constitutionnel doit faire un revirement jurisprudentiel en matière de Lépi. Ce qui permettra au plan juridique ce recours à une liste alternative ad ‘hoc proposée par la quasi-totalité des forces politiques.

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