Seule sur scène mardi à Artisttik Africa avec sa poupée, la comédienne sénégalaise Patricia Gomis à travers sa pièce «Moi, monsieur, moi» a raconté 14 années de sa vie d’enfance qui au théâtre aujourd’hui, l’amuse bien qu’étant une triste existence à laquelle elle n’a pu s’échapper qu’à l’âge de 21 ans.
« Moi, monsieur, moi». Autrement dit «Mesdames et messieurs (les peuples), écoutez-moi». Patricia Gomis raconte sa vie entre 7 et 21 ans, et quelque peu celle des enfants et adultes qu’elle a connus dans cette période. C’est dans sa pièce «Moi, monsieur, moi» mise en scène par Marcia de Castro avec la compagnie de la Casquette. Elle l’a raconté ce mardi 9 décembre au centre culturel Artisttik Africa de Cotonou dans le cadre de l’édition 2014 du Festival international de théâtre du Bénin (Fitheb). Puisqu’elle a décidé depuis 2011 de partager cette partie de sa vie au théâtre. Pas forcément pour bénéficier de la compassion du public mais plutôt, les distraire, les amuser tout en pointant du doigt de tristes réalités vieilles mais toujours présentes chez elle au Sénégal comme en Afrique en général. L’histoire, c’est surtout le résumé d’une enfance difficile voir malheureuse. Une enfance faite du phénomène d’enfant placé, de l’exploitation d’enfant, du mariage forcé, de l’excision, etc. Mais elle, dira-t-elle, a eu beaucoup de chance et s’en est sortie pour devenir «quelqu’un».
Patricia Gomis, c’est cette fille qui à 7 ans, a été donnée à sa tante, redonnée à celle-ci à 13 ans, puis donnée à l’oncle en France à 17 ans. A chaque étape, même en France où vue des écrans on lui promettait une belle vie, Patricia Gomis n’a été soumise qu’à des conditions qui ne lui garantissaient pas du tout la réalisation de son rêve. Celui de devenir quelqu’un : couturière, sage femme, photographe, athlète, … Avec aussi des risques de subir le sort que certaines de ses camarades ont connu comme le mariage précoce et l’excision. Mais elle a toujours pu réussir à fuir ces situations. Même de la France où l’oncle a confisqué son passeport et sa carte d’identité, elle s’est échappée pour rentrer au pays natal parce que là-bas elle était réduite à l’entretien des enfants, de la maison et à la cuisine. «J’ai eu beaucoup de chance» se réjouit-elle au point que cette histoire l’amuse désormais.
Le jeu vaut salut
Dans ce récit qu’elle raconte avec de l’humour et des marionnettes, la comédienne sénégalaise, seule sur scène prête son corps et sa voix à la dizaine de personnages qui l’ont marquée pendant cette période douloureuse de sa vie. Sa mère, sa tante, ses frères et sœurs, cousins et cousines, ses camarades, son oncle, son professeur et le guérisseur. Dans ce jeu très difficile, elle s’est trouvée sur planche, un compagnon de taille. C’est une poupée qui la représente dans son enfance et à qui elle fait dire tout ce qu’elle aurait dit à sa famille. Sa tante, une lingère, qui l’a élevé de 7 à 13 ans, est représentée par un tas de linge. L’avion pour le voyage sur la France est une mallette. On ne saurait douter de sa réussite dans ce jeu qui associe la marionnette lorsqu’on sait qu’elle est une initiée au jeu clownesque et que déjà en 1995, elle a créé à Dakar la compagnie de clowns Côté Jardin qui a présenté un certain nombre de spectacles pour jeune public dont «Les nouvelles aventures de Dada Ier ». Bravo Patricia !
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