Elections au Bénin : l’argent, quand tu nous tiens

Les inventeurs de l'expression ne croyaient pas si bien dire : l'argent, le nerf de la guerre. Pour souligner la part qui revient à l'argent dans tout ce que nous entreprenons, dans tout ce que nous réalisons. Avec une tendance plus marquée en période électorale.

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L'argent s'impose, en effet, comme un métronome.  Il est omniprésent. Il est omnipotent. Sans argent, qui se déclare candidat à l'une quelconque de nos élections, est un gros rêveur qui s'ignore. Qu'on s'en félicite ou qu'on le déplore, l'argent est au cœur de nos élections. Il en détermine, bien souvent, les résultats. Mais l'argent de nos élections, d'où vient-il ? Quels circuits emprunte-t-il ? La question vaut la peine d'être posée.

Ce n'est pas un secret : l'Etat, directement ou indirectement, finance la campagne de nombre de candidats. Cela tient au fait que, sous nos latitudes, l'Etat est encore la plantation de Monsieur et de Madame tout le monde. C'est l'Etat qui capte et capitalise la rente publique. C'est l'Etat qui est tenu pour le siège social du patrimoine national. C'est par l'Etat, la vache à lait universelle, qu'on s'enrichit vite et bien.

De ce point de vue, ils seront nombreux, ceux des candidats aux prochaines élections, qui chercheront à tirer profit des moyens de l'Etat. Des caisses noires seront mises à contribution. Des moyens roulants, le carburant en sus, seront mis à disposition. Les cadres, à divers titres et à divers niveaux, seront partout, sauf dans leurs bureaux. On volera ainsi du temps à l'Etat. Au grand dam des intérêts du citoyen-client.

Il y a l'argent de ceux qui, régulièrement ou non, se sont enrichis quelque peu. Les élections inclinent quelques uns d'entre eux à mettre la main à la poche. Soit pour booster leur propre candidature. Ils comptent sur les avantages et le prestige que confère le pouvoir politique pour conforter leur position économique et financière. Soit pour soutenir la candidature d'un tiers. Histoire d'être au cœur du pouvoir et dans les centres de décisions, par personne interposée.

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Il y a l'argent de l'étranger. Car il est illusoire de croire que nos élections sont une affaire strictement bénino-béninoise. Des hommes et des centres de pouvoir de par le monde s'y intéressent et jouent, à cette occasion, leur va-tout. Les frontières sont vite enjambées. Et l'on vole au secours de tel ou de tel autre candidat. N'y voyez pas une forme d'immixtion dans les affaires d'un Etat indépendant. Mais reprenez en refrain qu'il s'agit du droit d'ingérence, synonyme d'assistance, dans un monde qui se globalise. N'est-ce pas dans l'épreuve qu'on connaît ses meilleurs amis ?

Il y a l'argent de toutes les maffias et chapelles coalisées. Elles s'entourent de ténèbres et portent le masque de l'anonymat. Leur part d'argent dans les élections est difficile à tracer. Tout aussi difficile à chiffrer. C'est, en tout cas beaucoup d'argent. Sous le couvert vertueux et innocent des élections, cet argent pourrait même se prêter à des opérations cosmétiques de blanchiment systématique. 

Il y a l'argent des loups solitaires. Sont ainsi appelés ceux des candidats qui pensent rouler tous seuls et pour eux tous seuls. Ils ont quelques économies. Ils comptent sur la générosité de quelques amis. Mais, à l'épreuve du terrain, ils se rendent compte qu'une campagne est une affaire de gros sous et que les amis ne misent que sur des chevaux partant gagnants. En   matière d'élection, comme le disent les Ivoiriens, "Le pauvre a tort". L'organisation d'un seul meeting est déjà, en soi, une fortune : chaises et bâches, sonorisation et animation, communication et communiqué final en regardant dans la direction de nos confrères journalistes, transports et faux frais, victuailles et argent de poche, sans oublier les libéralités dues aux chefs de terre et à quelques incontournables dignitaires.

Il y a l'argent de ceux qui s'endetteront toute leur vie, ayant pensé qu'ils peuvent s'engager en politique comme d'autres entrent en affaires. Ils prennent un prêt pour les élections, auprès d'un usurier du coin. Ils financent, tant bien que mal, leur campagne électorale. Ils attendent, par-dessus tout, un retour sur investissement pour se libérer de leur dette, avant de goûter aux délices du pouvoir. Patatras. Voilà le rêve brisé ! "Adieu veau, vache, cochon, couvée". Restent les dettes à payer et les yeux pour pleurer.

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