Après l’incident diplomatique de ce dimanche 12 avril où, suite à l’annonce du décès de l’opposant gabonais André Mba Obame, des manifestants ont mis le feu à l’Ambassade du Bénin à Libreville, le ministre béninois des affaires étrangères, Nassirou Bako-Arifari, s’est entretenu avec la presse internationale (RFI, CNN, ABP, Vox Africa) et votre journal La Nouvelle Tribune.
Dans cet entretien, le chef de la diplomatie béninoise a dressé un premier bilan de l’incident. Après avoir une nouvelle fois condamné l’acte, il a également lancé un appel au calme et rassuré la diaspora béninoise au Gabon de ce que des dispositions sont prises par le gouvernement gabonais pour assurer comme par le passé leur sécurité et celle de leurs biens. Lire ci-dessous l’entretien.
Monsieur le ministre dans quel état se trouve l’Ambassade du Bénin au Gabon ?
L’Ambassade a été incendiée. Des derniers échanges que j’ai eus avec l’Ambassadeur du Bénin à Libreville ainsi que le ministre gabonais des affaires étrangères, je pense que sur l’ensemble de l’édifice, il y a à peine deux bureaux du rez-de-chaussée qui ont été légèrement touchés, tout le reste est consumé, inutilisable. Et donc les dégâts sont importants.
Est-ce qu’il y a eu des pertes en vie humaines outre les dégâts matériels ?
Aucune perte en vie humaine n’est à déplorer. Les dégâts sont des dégâts matériels et nous espérons. Il est vrai que ces dégâts sont importants. Les archives de l’Ambassade, les documents officiels sont allés en fumée. Tout cela, nous aurons le temps de les évaluer.
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Où se trouve l’Ambassadeur du Bénin ?
L’Ambassadeur du Bénin est toujours à Libreville où il est à sa résidence. Sa résidence n’a pas été touchée. Et étant donné que l’événement s’était produit nuitamment, l’administration était fermée et en plus c’était un jour férié, un dimanche.
La rumeur dit que les manifestants s’en seraient pris à l’Ambassade du Bénin parce que ce serait un féticheur béninois qui aurait empoisonné leur leader.
Le Bénin, disons certes, est un pays de tolérance, un pays de multi-confessionnalisme, un pays où aussi le phénomène du vaudou existe. Mais il s’agit certainement d’une question privée. Nous ne pouvons pas partir de rumeur non fondée, d’accusation d’attaque mystique pour fonder notre action politique et notre diplomatie. Et c’est en cela que nous disons que nous, nous restons strictement dans les relations entre Etats et nous pensons que les autres arguments qui sont avancés engagent leurs auteurs. En Afrique, très souvent, il n’y a pas de mort sans qu’on ne trouve des explications particulières. Hélas ! Car cela peut provoquer des conséquences du genre que nous sommes en train de vivre éventuellement. Je pense que nous devons tous le déplorer. Nous avons demandé d’explications officielles auprès du gouvernement gabonais quant aux tenants et aux aboutissants de cet incident malheureux. Le gouvernement gabonais a déjà réagi en déplorant la situation et nous attendons incessamment la visite du ministre gabonais des affaires étrangères au Bénin pour nous donner d’amples explications.
Pour les milliers de Béninois qui sont au Gabon et qui ne sont pas concernés par l’attaque directe de l’Ambassade du Bénin, que compte faire le Bénin pour au moins protéger ces ressortissants béninois au Gabon ?
Nous avons confiance au gouvernement gabonais, en sa capacité à assurer la sécurité sur l’ensemble de son territoire. Les Béninois qui vivent au Gabon, ils y sont je vous l’ai dit depuis des générations. Il y en a qui y vivent depuis 50 ans parfois 60 ans, donc c’est de génération en génération. Ils ont, tous les jours, bénéficié de l’hospitalité, de la sécurité et de la protection du gouvernement gabonais. Et donc, nous ne sommes pas particulièrement inquiets. Le gouvernement gabonais a pris le dossier à bras le corps et nous sommes persuadés que des dispositions seront prises, et le gouvernement béninois l’a demandé, pour assurer la protection de nos compatriotes.
Je voudrais également profité de l’occasion pour lancer un appel à tous nos compatriotes pour qu’ils se comportent en dignes citoyens sur le territoire gabonais. Qu’ils évitent de s’immiscer dans les affaires intérieures du peuple gabonais et que l’amitié légendaire qui existe entre nos deux pays soient préservés. Nous voudrions donc leur demander de bien vouloir prendre toutes leurs dispositions pour éviter des interférences malheureuses et qu’ils se comportent comme partout où la diaspora béninoise est très disciplinée. Nous savons que la diaspora béninoise au Gabon est une diaspora très responsable, très organisée et qu’elle saura prendre des dispositions à l’interne pour assurer un minimum d’informations pour éviter le débordement. Encore une fois, nous pensons que le gouvernement gabonais assurera la sécurité des uns et des autres.
Monsieur le ministre, vous avez dit tantôt que le ministre gabonais des Affaires étrangères effectuera une visite prochaine au Bénin. Ne pensez-vous pas que la situation est si grave qu’elle nécessite votre déplacement sur place? Ce n’est pas tous les jours qu’une Ambassade brûle à l’Etranger.
Le gouvernement béninois a déjà envisagé le déplacement d’un ministre, certainement moi-même sur le Gabon. Mais étant donné que mon collègue gabonais a déjà annoncé son arrivée, nous voudrions l’attendre.
Pour quand ?
Dans les heures ou peut-être dans les 24 heures ou 48 heures qui suivent. Donc nous l’attendons. Après sa visite, nous irons nous-mêmes constater les faits.
Est-ce que vous confirmez que d’autres ambassades sont aussi touchées comme celles du Cameroun et du Nigeria ?
Je ne me suis pas particulièrement intéressé aux ambassades des autres pays et donc je ne saurai me prononcer.
Transcription : Yao Hervé Kingbêwé
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