Bénin : la pression néerlandaise met à nu un Etat corrompu

(La preuve que la Yayi a échoué) Depuis 2006, le gouvernement Yayi a pris de fermes engagements pour lutter contre la corruption. Une marche verte, le vote de quelques lois contre le fléau, quelques actions musclées en début de mandat et puis le silence.

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La lutte annoncée impitoyable contre les prévaricateurs n’a guère dépassée les bonnes intentions des discours officiels. Neuf ans après, il a fallu la pression des Hollandais et le rapport Kroll pour voir que le pays reste encore très corrompu. Une dernière preuve qui montre que la «vraie» lutte contre la corruption n’a jamais eu lieu.

Quelques semaines avant l’éclatement de l’affaire de l’affaire Ppea 2, la propagande gouvernementale faisait passer le Bénin pour le meilleur exemple de bonne gouvernance du continent. Le député Nouhoum Bida, le néo reconverti du yayisme distillait dans tous les médias cet exploit qui provient, dit-il, des statistiques d’une institution internationale qu’il est le seul à connaître. Mais l’éclatement de l’affaire Ppea2 va ramener le régime à la réalité, celle d’un Etat corrompu dont tous les responsables, le Chef de l’Etat en tête, ont fini par s’accommoder du mal. Au point où le Chef de l’Etat n’a pas cru réagir spontanément lorsque la presse a fait éclater cette affaire au début du  mois d’Avril dernier. Tout est parti d’une lettre ouverte du citoyen Kora Gounou Imorou au Chef de l’Etat pour annoncer le détournement de 2,6 milliards. Cette lettre ouverte fait cas du rapport des audits commandités par la partie néerlandaise pour connaître la gravité du détournement. Dans ce rapport, les Hollandais demandaient au Bénin de rembourser les frais détournés pour un travail non effectué. Mais le Chef de l’Etat ne réagira que lorsque le communiqué du ministre néerlandaise adjointe du développement Lilianne Ploumen annonce la suspension de la coopération de son pays avec le Bénin. Comme à ses habitudes, Yayi affirme n’avoir jamais entendu d’une telle affaire. Après quelques conseils des ministres, le Chef de l’Etat se montre sceptique et demande qu’un autre audit soit fait par un cabinet plus neutre et plus connu.

Le rapport Kroll qui révèle le vrai visage du Bénin

Mais le recours à un cabinet international d’audit pour évaluer l’impact de la prévarication n’a rien apporté de plus au gouvernement. En plus du fait qu’il a dû payer plus de 700 millions pour les honoraires de ce cabinet, le rapport expose un détournement grandeur nature où des opérateurs économiques et des cadres de l’administration vont s’illustrer par des actes de prévarication graves. Il confirme tout ce qui est dit dans le premier rapport d’audit des hollandais et va même plus loin. Puisqu’en dehors des 2, 6 milliards du Ppea 2, le rapport démontre un détournement d’une plus grande ampleur. Au total, 8 milliards ont été siphonnés du trésor par deux opérateurs économiques véreux en complicité avec des cadres du ministère et de la direction de l’eau. Pour réussir leurs forfaits, ses deux opérateurs économiques créent des sociétés écrans qu’ils font disparaître un an après avoir fait transité des fonds par les comptes de ces sociétés. En très peu de temps, entre 2014 et 2015, des milliards ont été sortis des dédales du trésor sans qu’aucun marché n’ait été exécuté. Ces pratiques d’une rare gravité montrent le laxisme et le degré de complicité dans les grandes sphères de l’Etat dont ont bénéficiés ces deux opérateurs économiques. En vérité Nieri Rock et Kodo Rémy n’auraient jamais existé si les règles de gestion des ressources publiques avaient été respectées à la lettre. L’Etat s’est montré trop débonnaire vis-à-vis de ses deux opérateurs économiques corrompus. Et on peut dire sans se tromper que c’est à dessein.

Un système qui favorise tout le monde

Lors de la présentation du rapport Kroll par l’auditeur général Dognon, ce dernier a semblé présenter ces deux opérateurs économiques comme des gens peu connus de l’Etat. C’est pour cela qu’il présentera le sieur Rémy Kodo comme un opérateur économique originaire du Mono et l’autre Rock Niéri comme le beau frère de Olivier Boko, accusé comme Patrice Talon d’avoir voulu empoisonner le Chef de l’Etat et exilé à Paris. Il a même poussé la provocation des Béninois plus loin en disant « qu’ils » ont eu du mal à identifier le nommé Rock Nieri comme opérateur économique. Et pourtant, ce dernier mène des affaires avec l’Etat depuis près d’une décennie. Le gouvernement ne peut pas ignorer qu’il avait pris une grosse part dans le marché de l’achat des machines agricoles qui a fait grand bruit au Bénin en 2010 et dont le député Yahouédéou s’est fait chantre de la dénonciation. Ce monsieur a toujours pris des marchés de l’Etat depuis 2006 et ceci pour une autre cause qu’on ne dit pas encore. Comme beaucoup d’autres opérateurs économiques qui ont pion sur rue au Bénin depuis 2006, il fait partie de la mouvance évangéliste qui a pris l’appareil d’Etat en otage. En suite, il est de Birni dans l’Atacora et donc d’une région où les gens ont bénéficié d’une immunité particulière depuis 2006. Rémy Kodo est quant à lui proche de la nébuleuse Fcbe que l’on le dit financer avec l’argent siphonné des caisses de l’Etat. Il est aussi proche d’un fils du Chef de l’Etat et d’un ministre très influent dans le gouvernement actuel de Yayi. Lorsque le citoyen Kora Gounou Imorou a dénoncé ce scandale pour la première fois courant Avril, le sieur Kodo a été arrêté par la gendarmerie avant d’être relâché le lendemain sur ordre venant de haut. Alors, veut-on faire croire au peuple ou aux Hollandais que l’appareil de l’Etat ne connaissait pas ces deux individus ? Une chose est sûre, ils ne peuvent, malgré leurs puissances et leurs influences, détourner autant d’argent avec tant de rapidité et de facilité s’ils ne bénéficient pas de complicités au sommet de l’Etat, complicités non encore bien établies. Dans cette affaire, le gouvernement a montré tout le temps qu’il n’était pas préoccupé par la révélation des dessous du scandale, l’identification des acteurs et leur punition. Croyant compter sur l’indulgence de la partie hollandaise, le gouvernement avait même lancé un projet d’adduction d’eau similaire au Ppea 2 enterré grâce à un financement propre. Mal lui a pris. La détermination des Hollandais qui conditionnent toujours la reprise de leur coopération avec le Bénin à la détermination et la volonté du gouvernement à punir toutes les personnes impliquées dans ce scandale l’ont amené à montrer bonne mine. Et si les Hollandais n’avaient pas existé ?

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