Joël Aïvo se positionne comme l'espoir d’un Bénin nouveau

Les acquis et limites de l’ère Yayi, les réformes urgentes pour redonner au renouveau démocratique béninois son âme, les priorités à partir de 2016. Dans une démarche qui se veut scientifique : états des lieux, causes et projections, le professeur Joël Aïvo a partagé, avec les Béninois, dans un entretien spécial diffusé hier sur Canal 3, le sens de son engagement citoyen.

Les journalistes n’ont certainement pas été choisis au hasard ; Annick Balley et Joël Ahofodji. Ils font partie des voix les plus respectées de l’audiovisuel béninois. Le cadre de l’interview encore moins. L’agrégé de droit public dans son marigot (bibliothèque de livres de droit certainement) pour porter le Bénin (drapeau national). Soixante minutes d’entretien. Des faits exposés avec objectivité. Une conviction exprimée sans forcer. Une remarque globale à la fin : le professeur Joël Aïvo se positionne comme un autre espoir, sinon un nouvel espoir pour remettre le Bénin sur les rails. Le « porteur d’idées » va-t-il se lancer dans la course présidentielle pour éventuellement donner corps à l’espoir qu’il incarne ? Sa réponse laisse un peu perplexe. « Est-ce qu’il suffit d’être candidat à une élection pour régler les problèmes ? »,  « C’est Dieu qui impose (le président de la République, Ndlr) et nous validons » Un ni oui ni non à l’issue duquel l’homme s’engage tout de même à «travailler » pour «peser sur la gouvernance » de son pays.

Gouvernance Yayi : un bilan mitigé

Quel regard porte Joël Aïvo sur la gestion du Bénin par le régime du président Boni Yayi ? Un bilan mitigé. Au régime du Changement-Refondation, le président de l’Association béninoise de droit constitutionnel attribue aussi bien des acquis que des erreurs. Sur le premier tableau se trouve les infrastructures, l’institution du Ramu et l’augmentation du budget général de l’Etat. « En termes d’infrastructures, il y a eu continuité, et même intensification de ce que les présidents Kérékou et Soglo ont commencé », témoigne le professeur Joël Aïvo. Donc, on a beau tout reprocher à Boni Yayi, il faut admettre que sous lui, il y a eu un certain « volontarisme » dans la gouvernance du Pays. Cependant, sous Boni Yayi, l’on a connu «une désarticulation de l’Etat», regrette Joël Aïvo. Qui insiste que le plus grand péché du système Yayi est d’avoir créé les conditions d’une « banalisation de l’Etat ».

Confiance: le remède qu’il faut pour le Bénin

Tout n’a donc pas été mauvais sous le régime finissant. Mais après 25 ans de renouveau démocratique, le Bénin a atteint une étape inquiétante qui en appelle des réformes. Que devra-t-on réformer et à quelle fin ? « Réformer pour donner confiance », répond le professeur. «L’urgence pour 2016, c’est de redonner confiance », insiste-t-il. « La machine que nous avons mise en marche depuis 1990 a atteint un niveau où elle ne peut plus donner de résultat », argumente-t-il. « Il n’a plus de valeur, plus d’âme », a-t-il repris Joël Aïvo. D’une part, il n’y a plus de confiance entre les hommes d’affaires et les gouvernants. D’autre part, « les jeunes n’ont plus confiance en l’avenir ».Ils ne croient plus en la capacité de ceux qui nous dirigent de régler les problèmes du pays. Pour l’ancien directeur de cabinet du président Adrien Houngbédji, face à un tel tableau, il faut travailler « à redonner une âme à la machine, à réintroduire les valeurs ».  Celui qui prendra les rênes du Bénin le 06 avril 2016 doit donc œuvrer à rétablir le capital confiance entre les dirigeants, les créateurs de richesses et la population. Mieux, il doit remettre la jeunesse au travail, en lui redonnant confiance. En plus du capital confiance à restaurer, les priorités du Bénin à partir de 2016 sont, entre autres, l’énergie, la santé, la sécurité et la décentralisation. Quant au profil du prochain président, le constitutionnaliste le résume en trois points : «Etre convaincu que nous sommes un pays formidable, être le premier ambassadeur du Bénin et être capable de détecter les battements de cœur du pays afin de le tirer vers le haut»

Entre l’état des lieux, l’analyse des causes et les projections, l’ «engagement citoyen» du professeur Joël Aïvo n’est sans doute pas loin d’un élan vers la conquête du pouvoir d’Etat. 2016 nous réserve bien de surprises. Le tout, dans ce nouvel espoir d’un «Bénin plus fort et plus digne». Qui sait !?

Aïvo, une oasis dans le désert

Quadragénaire à peine et déjà agrégé des facultés de droit, Joël Frédéric Aïvo a de quoi faire rêver tous ses interlocuteurs. Un franc parler qui séduit maintes personnes, une richesse intellectuelle intarissable qui lui permet de débiter en peu de temps mille et une merveilles. Des réflexions lumineuses et des réponses à presque tous les problèmes de son temps. En un mot, c’est un intellectuel en métal plus durable que l’airain. Et d’ailleurs, sur son talent et ses capacités intellectuelles, on ne peut guère en douter. Puisque n’étant pas « l’enfant de… », il ne doit sa réussite professionnelle qu’à son intelligence. Hier, lors de l’interview qu’il a accordée à certaines chaînes de télévision, il a prouvé tout le bien qu’on pense de lui. Il a fait connaître ses idées, ses recettes contre les nombreux problèmes qui minent notre pays. Près d’une heure d’exposé sur la gouvernance du pays sur le plan politique, mais aussi, et c’est là qu’il surprend,  social et économique. Une fois encore, Aïvo a montré la plénitude de son talent. Dans cet environnement national caractérisé par une grosse misère intellectuelle, il devrait incarner l’espoir. Telle une oasis dans le désert, il devrait être la source à la laquelle doivent venir s’abreuver les politiciens assoiffés d’idées et de propositions. Mais doit-il seulement rester dans cette posture ? Face à la disparition en douce d’une classe politique crédible et la cacophonie politique, il doit aussi glisser du champ de la réflexion et de la proposition vers celui de l’action. Et sur ce challenge, il ne s’y dérobera pas. Joël Aïvo remplit toutes les conditions pour être candidat. Au cours de son grand oral, il a montré sa disponibilité. Plus que ça, il a affiché sa volonté de servir. Il n’est pas pour autant étranger à ce monde. Directeur de cabinet de Me Adrien Houngbédji pendant près de cinq ans, il a côtoyé toute la crème politique du pays. Il fera donc son come back en homme averti et prudent pour ne pas être vite dévoré par les nombreux prédateurs et autres rapaces qui essaiment le microcosme politique béninois. Il doit apprendre à jouer le rôle de l’ouvrier qui prend son temps à colmater les brèches, à discuter et unir le plus grand nombre des hommes politiques- actuellement dispersés- autour de sa personne et de ses idées. Cette tâche transcende tout. Réussira-t-il là où son ancien maître et bon nombre de personnalités politiques de grande valeur ont échoué ?

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