Présidentielle : profils de candidats

Motus et bouche cousue. C’est la ligne de conduite que la plupart des états-majors politiques s’imposent à quelques encablures de l’élection présidentielle. Ces états-majors traînent les pieds.

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Mais le bon peuple, qui entend se démarquer de tous jeux et calculs politiciens, s’occupe comme il peut. Il identifie différents profils de candidats, faisant cohabiter les bons et les moins bons, les plus brillants et les plus farfelus.

Le candidat « Ahouan noukon sia ». C’est celui-là qui montre de réelles qualités de leader, en ce qu’il s’affirme tout à la fois comme un visionnaire, un rassembleur, un bâtisseur. Il se porte à l’avant de sa troupe comme un chef d’armée. « Ahouan noukon sia » signifie littéralement en fongbé le soldat de tête, le porteur du drapeau d’une compagnie en action. Il montre et indique la voie.

Le candidat « Ho nougbo do to ». C’est le candidat véridique. Il s’interdit de tricher, en quelque manière, avec la vérité. Il assène ainsi des vérités qui donnent des migraines aux uns et des insomnies aux autres. Tiendra-t-il longtemps ce rythme endiablé à cultiver les champs de la vérité ? Les Haoussa du Niger nous rappellent fort opportunément cette vérité : « Que l’homme sincère achète un bon cheval pour fuir lorsqu’il dit la vérité ».  

Le candidat « Toun doto », c’est-à-dire le candidat patient. Il ne cède pas à la provocation. Il cherche constamment à se mettre au-dessus de la mêlée. Il est maître de ses nerfs. Pour lui, une élection, ce n’est pas la guerre. Pourquoi alors se gendarmer pour un rien ? Pourquoi alors se bouffer le nez à longueur de temps ? « La patience est un arbre dont les racines sont amères, mais dont les fruits sont doux » disent les Bambara du Mali.

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Le candidat « Assouka ». C’est la figure emblématique de l’homme fort, mais dans le sens de celui qui a une grande capacité à tout mener à bon port. Sa force n’est pas que physique. Elle est aussi et surtout mentale. C’est un personnage de défi. Il ne jette pas la hache après la cognée. Il ne renonce jamais par découragement à une entreprise. Il va au bout de son engagement.

Le candidat « Gnin wê ». C’est celui qui se dresse en permanence sur ses ergots d’orgueil, se vantant d’être « le phénix des hôtes de ces bois ».  En somme un manitou, maître du ciel et de la terre, maître du sol et du sous-sol. C’est Dieu en son paradis ou Jupiter en son Olympe.

Le candidat « Toli vê to ». C’est le têtu, à savoir celui-là qui, par nature ou par caractère, est attaché à ce qu’il a en tête, au point que rien ne peut l’amener à changer d’avis. C’est de lui qu’il s’agit dans l’un des tubes à succès de l’artiste musicien Don Métok, « A tri to ». C’est donc quelqu’un qui s’entête dans son opinion, qui s’enkyste dans son refus de comprendre.

Le candidat « Dèkpè jojodja ». C’est le jeune prétentieux, encore largement immature, mais qui estime venu le temps de mettre ses pères et mères au rancart. Ce qui reviendrait, pour ce type de candidat, à engager une guerre sans merci des générations. Ici et maintenant. Les « vieux », dit-il, sont dépassés. Le temps est donc venu de nettoyer les écuries d’Augias en expédiant ces derniers le plus loin possible. Le pouvoir et tout le pouvoir aux jeunes.

Le candidat « Gblo do to ». C’est le parfait plaisantin. Il trouve, dans une campagne électorale, l’espace et le moyen de s’amuser à loisir et d’amuser la galerie. Il est remarquable par ses mots amers ou aigres-doux. Il se distingue par ses comportements décalés qui tranchent avec le sérieux de la grand-messe classique des campagnes électorales. Le candidat « Gblo do to » se sent à l’aise comme un poisson dans l’eau sur le registre de la plaisanterie destructrice. Il décape sans merci. Il lessive sans pitié. C’est un puissant détergent. Il lave blanc et fait saigner à blanc ses adversaires.

Voilà comment le bon peuple amorce sa campagne présidentielle, en libérant les ressources de son imagination. Pendant que les politiciens s’évertuent à faire la fine bouche, sa galerie de portraits de candidats est pleine.  En projetant ainsi des profils de candidats sur l’écran de nos consciences, ce peuple tient à rappeler aux politiciens retardataires cette vérité qui nous vient des sages peuls du Mali : « Un peu vaut mieux que rien et avoir vaut mieux qu’espérer »

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