Dieu aime le Bénin… et après?

Lorsqu’on se retrouve subitement en face d’un monstre, reculer peut passer pour une attitude normale, un réflexe salutaire, l’instinct de survie nous manœuvrant aussi malgré nous.

Publicité

Mais, entendons-nous bien, la première fois seulement ! Parce que, reculer chaque fois devant le même monstre revient au final à lui laisser la place, une question de responsabilité donc, tout comme l’est : lui résister, l’affronter, le combattre.

La peur du pire nous amène très souvent à renoncer et, dans certains cas, à taire nos convictions les plus têtues. L’on nous apprend que lutter n’est pas sage, que prendre la parole c’est offensé, que résister c’est être violent. Ils ont fait de nous des citoyens passifs et mous. Dans quel but ? Pour ne rien craindre. Ils nous laissent sans eau, sans électricité, sans soins de santé, sans sécurité sociale, sans toit. Nous ne bronchons pas. Sages comme des enfants dressés ! Or,nous connaissons parfaitement nos droits et nous savons aussi que, même si aucun monstre ne nous engloutit, nous mourons un jour, emportés par le temps et quelques mystères.

Certains parmi nous auxquels je ne saurais faire le procès d’avoir foi en Dieu, prient avec un tel acharnement que les haut-parleurs dont ils se servent, explosent. Tant ils insistent pour se faire entendre de Dieu. Il est à parier qu’ils sont les plus nombreux. Ils prient tous les jours pour notre pays. Et, Dieu de toute évidence leur a dit, (nous sommes libres de ne pas les croire), qu’il nous aime. C’est une excellente nouvelle. Ils nous la répètent abondamment. Je dois avouer que je suis de ceux qui préfèrent les croire.

Pour autant je pense que ceux qui nous gouvernent prient et croient aussi en ce même Dieu. Et, vu qu’il est AMOUR, il est probable qu’il leur parle aussi. Sauf que nous ne sommes pas au courant de ce qu’il leur dit et ils ne font aucun effort pour nous mettre dans la confidence. Alors je propose, sérieusement, que, et citoyens et gouvernants, nous laissions pour une fois Dieu à ses occupations et que nous réglions nos problèmes dans des dimensions humaines. Il nous aime …? Tant mieux! Rendons lui grâce. C’est très généreux de sa part.

Publicité

Notre destin se joue dans des arènes sordides où la politique politicienne s’autorise tout, y compris : voler nos suffrages, nous imposer un chef, nous marcher dessus. On devine à leur élan que la machine à broyer est entrain d’être finalisé, une fois de plus, sous nos yeux : Le code électoral est violé par ceux qui sont payés pour veiller à son application, les médias privés sont mis en demeure ou fermés, les cartes d’électeur sont indisponibles ; bref !Il ne s’agit pas d’une élection, il s’agit bien de se défendre, de bien se défendre. Après, Dieu nous aimera quand même.

C’est un piège.

Lionel Zinsou a un passeport béninois. Il est donc béninois et à ce titre, il a des droits dont celui de postuler au fauteuil présidentiel. La légitimité est une autre affaire. Je vais y revenir.

Il faut rappeler qu’il y a de nombreux étrangers au Bénin, des libanais, des nigérians et des indiens notamment qui circulent avec des passeports béninois sans jamais essuyer une insulte raciste. Ce n’est donc ni du racisme ni de l’exclusion que de dire à quelqu’un qu’on ne connaît pas, qu’on ne le connaît pas. Ils sont nombreux les béninois de l’étranger qui rentrent pour occuper des postes de responsabilité chez eux. Zinsou lui-même en est la meilleure illustration. Les chapelles qui tentent d’opposer les béninois de la diaspora à leurs compatriotes, le font pour vicier le débat politique et pour faire passer tout contradicteur pour un raciste immature et vulgaire. Un raccourcis qui les arrange parce qu’il a l’avantage de vider le débat de sa substance et de le réduire à un sujet unique : il n’est pas béninois !!! C’est un béninois. Trop pauvre pour tout esprit critique ! Trop pauvre pour qu’on nous prenne au sérieux. C’est justement cela, le but de la manœuvre. Arrêtons de patauger dans leur piège, comme les gabonais. A ce jeu, ils gagneront parce que c’est le leur.

La question de la double nationalité de Zinsou quant à elle, devrait être, à priori, aussi négligeable que l’est la couleur de sa peau. Mais à priori seulement, vu qu’il n’aspire pas à vendre de l’essence de contrebande au bord des voies, ses intentions ne devraient souffrir d’aucune équivoque. Ce monsieur brigue la plus haute fonction de notre pays et le citoyen lambda ne sait pas dire s’il est en mission pour les héritiers de Jacques Foccart ou s’il est venu de lui-même offrir ses services à Yayi »pour continuer sa gouvernance » ou encore s’il est là pour les deux. Il y a, visiblement, quelque chose qui mériterait d’être clarifié de ce coté là. Parce que, comme l’a dit Martine Aubry : « quand c’est flou c’est qu’il y a un loup ».

S’agissant toujours  de la question de la double nationalité, il ne serait pas superflu de tenir compte de l’avis des juristes. Certains professionnels de droit, (maître KatoAttita entre autres) pensent que nous aurions des comptes à rendre à la France si monsieur Zinsou venait à perdre une seule mèche de ses cheveux sur le territoire béninois. En somme, Yayi Boni et sa bande nous demandent de confier notre destin à un monsieur que nous ne pourrons même pas punir s’il venait à trahir son serment… Bien entendu, dans l’hypothèse malheureuse où la conspiration en cours venait à triompher de nos résistances. Que dis-je ?Cela n’arrivera pas, vu que Dieu nous aime.

Dieu nous aimera quand même

Revenons maintenant à la question de la légitimité de monsieur Zinsou.  Un Président de la République, avant d’être le défenseur des intérêts de son peuple en est d’abord l’incarnation ; l’incarnation de l’identité culturelle, le meilleur reflet de ce peuple. Monsieur Zinsou croit-il correspondre à ce profil ? En quoi quelqu’un qui a vécu 61 ans en France sans y avoir occupé une seule fonction élective est-il légitime à devenir en six mois, le Président de la République d’un pays où il vient irrégulièrement passer ses vacances de noël ? Encore que les deux parrainages dont il se réclame (la françafrique et Yayi Boni) sont plus à charge qu’à décharge. Le président Soglo l’a démontré.

Que diront la presse et l’opinion internationales en découvrant le couple présidentiel béninois à un sommet de la CEDEAO ou de l’UA ? Les autres chefs d’Etat d’Afrique seront-ils rassurés au point d’aborder avec le sérieux requis, les questions délicates en face d’un ancien patron de Roschild, de PAI et bras droit de Fabius, promoteur d’un CFA poison et dépositaire de ‘’l’Afrique appartient à l’Europe’’, l’Europe servant ici de camouflage à la France ?  C’est à nous de débattre et de répondre à ces questions et plus encore. Mais pourquoi se donner tant de mal, vu que Dieu nous aime.

Que faisons-nous, ne serait-ce que pour mériter le respect de l’autre ? Nous reculons, nous chantons, nous dansons, nous nous couchons, nous rampons, nous offrons nos services à l’insulte pour des miettes, nous nous déchirons pour des miettes. Rien de grave! Dieu nous aime. Nous sommes des gens de foi. Il faut continuer de croire que Dieu viendra nous sauver un jour de nous-mêmes. Il finira par arriver.

En attendant, plions nous sans retenue aucune aux désidératas de nos maîtres. Allons, faisons grossir notre chéri. Voyez comment il sourit, fier de son œuvre. Les contestations  » le laissent de marbre ». Normal ! Depuis le temps qu’il nous entend geindre sans plus, il a fini par s’y faire. Il a pour lui: le chantage, l’argent, les réseaux et les appareils. Il a fini d’acheter certains de nos leaders, leurs partis et leurs enfants, il a infiltré nos institutions républicaines par le haut, il sait instrumentaliser une large partie de la presse locale à son profit, bref ! Il est ravi d’avoir orchestré un spectacle aussi pathétique autour de son triomphe certain, il peut maintenant faire venir ses médias au masque de Boibouvier pour montrer à la communauté internationale notre primitivité et pour justifier la nécessité de sa présence.

De toutes les façons,  »ce petit continent lui appartient », ce minuscule pays ne peut donc pas lui échapper. Les amazones dont il craignait la vaillance sont toutes mortes et leurs prétendus descendants passent le plus clair de leur temps à attendre que Dieu vienne les sauver.

Surtout ne blasphémons pas. Dieu aime le Bénin.  Attendons-le sagement. Ainsi soit il

Ousmane Aledji
Metteur en scène
Dramaturge

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Publicité