Présidentielle 2016 : Richard Flash parle de Lionel Zinsou et de combat patriotique

Artiste béninois de renom, Richard Flash est de retour au Bénin pour se mettre au service de la préservation de l’unité nationale dans son pays. Rencontré dans son appartement sis au quartier Vêdoko à Cotonou, l’artiste partage avec La Nouvelle Tribune, le contenu de son nouvelle album intitulé « Kpatagnon », ses projets artistiques et évoque la présidentielle du 28 février prochain en se penchant entre autres sur le combat pour l’unité nationale et la candidature du premier ministre Lionel Zinsou.

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Richard Flash, en guise de bonne année à tes fans, aux mélomanes, tu as sorti un nouveau disque, « Kpatagnon ». On voudrait bien savoir de quoi il s’agit

Je salue tous ceux qui nous suivent à travers La Nouvelle Tribune. Kpatagnon veut simplement dire « tout est bon. Tout ce que Dieu fait est bon ». C’est ce que nous avons l’habitude de dire en langue Mina. Kpatagnon c’est aussi le nom de l’un de mes grands frères. Ce nom qui signifie beaucoup. Kpatagnon veut également dire que tout est bon sur le nouvel album. Du premier titre au dernier, tout est bon.

Tout est bon sur cet album. C’est combien de titres ?

Il y a huit titres sur cet album. Des titres faits sur des rythmes différents. Les gens me connaissent en tant que chanteur de zouk, mais cet album est un album-projet qui normalement devrait s’appeler « No format ». No format parce que simplement, il y n’y a pas de formatage là-dessus. C’est un album sur lequel je me suis donné une libre expression, je me suis donné une liberté pour me faire plaisir en touchant à plusieurs rythmes et pour montrer à tous mes fans que j’ai encore d’autres potentialités en moi et que je ne voudrais pas être fermé exclusivement dans le zouk.

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En d’autres termes, tu révèles une autre face cachée de toi, que d’autres ignorent. Mais quand on parle de variétés, il y a combien de variétés musicales du Bénin sur cet album ?

Je voudrais d’abord dire aux gens que la musique est universelle. Le rythme appartenant exclusivement à un pays, une région, n’existe pas. Aujourd’hui, on a raté le coche d’utiliser le Tchink comme rythme de chez nous. On avait déjà raté le coche d’utiliser le Soyoyo, rythme créé par le célébrissime et légendaire Robinson Sipa, quelqu’un que je respecte encore jusqu’aujourd’hui et qui n’a pas son égal dans le milieu Soyoyo pour l’instant. Dès qu’il avait commencé, toute la jeunesse devrait suivre ce rythme-là et on n’aurait une création du Bénin pour le monde aujourd’hui, mais on n’en a pas. Concernant mon album, il y a du Agbadja et il y a d’autres rythmes qui pour moi sont de la musique universelle. Il y a de la Salsa, Gnonas Pedro faisait de la Salsa, mais ce n’est pas un rythme du Bénin. Pourtant il a été célèbre et a porté très haut le drapeau du Bénin dans le monde à travers son groupe, Africando. Donc l’essentiel c’est de bien faire ce qu’on fait, qu’importe le rythme.

Qu’importe le rythme, mais quand on te voit faire de la variété à côté du zouk pour lequel on te connaît, on ne peut pas s’empêcher de se demander qu’est-ce que motive ce choix ?

Je ne pars pas du zouk. Je reste dans le zouk parce que j’ai cette chance d’être le N°1 du zouk sur toute l’Afrique, ce qui n’est pas forcément connu des Béninois. On peut avoir des projets sur son parcours musical et ça fait partie d’un de mes projets. C’est comme si demain je me réveille et que je dois participer à un album rap avec des artistes rappeurs du Bénin. Ça ne veut pas dire que je quitte le zouk pour aller faire du rap. Mais c’est un projet et cet album Kpatagnon reste purement un projet. Des projets comme ça, viendront par moment. Il peut arriver que je fasse un album avec rien que de la percussion où il n’y aura même pas de chanson. Ça dépendra de l’inspiration que j’aurai en ce moment-là pour mettre des percussions qu’il y a au Bénin en exergue.

Richard, tu n’es pas sans savoir que quand on écoute ton zouk, il y a la              sensualité, les paroles, la qualité du texte et autres. Retrouve-t-on, toutes ces choses dans Kpatagnon où tu fais plusieurs autres variétés ?

C’est la même chose. J’ai un objectif précis. Chaque fois que je veux faire quelque chose, je me dis c’est pour me faire plaisir mais je me dois de faire de la qualité pour respecter l’image de mon pays. Dans chaque domaine, chaque béninois doit travailler de cette façon. Si je fais ça, les gens doivent se demander, il est d’où, il est de quelle nationalité ? Il faut être fier de dire, il est un Béninois. Si tout le monde fait ainsi, je pense qu’il y aura ce que j’appelle, un esprit de patriotisme à travers l’Afrique et à travers le monde entier. Donc à chaque fois que je rentre au studio pour faire un album, je me dis, il faut que ça soit du bon parce que ça va traverser les frontières du Bénin. Et si les gens se posent des questions sur mes origines, sur ma nationalité, il faut que les frères béninois qui seront dans les parages soient fiers de dire, c’est notre frère. C’est de cette façon que je travaille sur chaque album. Je mets de la sensualité, de la philosophie, toute la passion que j’ai pour la musique et pour mon pays.

Justement, parlant de philosophie, quand tu dis Kpatagnon – tout est bon-, n’y a-t-il pas une sorte de fatalisme, de penchant à admettre la fatalité, à tout laisser à la charge  de Dieu?

Non. Ne faisons pas de confusion. Il y a la fatalité de celui qui ne veut pas travailler et qui dit je remets tout entre les mains de Dieu. Ça c’est autre chose. Mais un croyant fervent, c’est quand vous vous battez normalement comme il faut, lorsque vous défendez vos objectifs comme il faut mais dans la vie, il vous arrive souvent des choses qui vous dépassent et que vous n’avez pas prévu forcément sur votre parcours. Parfois, ces choses-là, il faut les accepter. Il y a des choses contre lesquelles vous ne pouvez pas lutter. C’est en ce moment qu’on dit Kpatagnon, tout ce que Dieu fait est bon.

Autrement dire, tu conseilles de prendre la vie du bon côté !

Oui. Il faut toujours lutter, mais considérez tout ce qui vous arrive, tout ce que vous n’avez pas prévu, toutes les choses contre lesquelles vous vous battez et qui vous arrive quand même, il faut les prendre sportivement et dire que tout ce que Dieu fait est bon.

Richard Flash, tu as également un côté engagé dans ta musique. On l’a plus découvert avec « Fausses promesses ». Actuellement le Bénin, ton pays se prépare pour une élection présidentielle autour de laquelle il y a beaucoup de mouvements, d’effervescence. Penses-tu que tout va bien se passer et on dira Kpatagnon ?

De toutes les façons, dans n’importe quel pays, le peuple lutte chaque fois qu’il y a des élections présidentielles. Il y a des tractations et les gens sont toujours inquiets. Cette inquiétude que nous avons chaque fois est due au fait qu’on se demande si va bien se passer. Ça permet d’être sur le qui-vive et de réveiller la conscience de la jeunesse et de la population pour les conscientiser, les sensibiliser pour l’unité nationale. Parce qu’un pays qui n’est pas uni va toujours à la guerre et on sait que la guerre fait peur, la guerre ne fait pas du bien. On sait peut-être quand ça commence mais on ne sait pas quand ça finit. Donc tout ce que je veux aujourd’hui, c’est qu’il y ait parmi tous ces hommes politiques, quelques conscients, quelques vrais patriotes qui soient capables de sortir les moyens pour qu’on aille vers les populations afin de leur parler de l’unité nationale.

Est-ce à dire que Richard Flash a un projet de sensibilisation des populations à la préservation de la paix ?

Oui ! Nous le faisons déjà avec nos maigres moyens, sans l’aide de quelqu’un. Je suis avec Kamal Radji, un slameur qui aussi un esprit très fort. Avec lui, je vais voir les jeunes dans des quartiers et des villages. Bientôt, on sera également dans d’autres villages et des villes pour rassembler les jeunes. Quand vous rentrez dans un quartier et vous retrouvez, ne serait-ce que cinquante jeunes avec qui vous partagez votre opinion, en leur disant, vous êtes tous des enfants du Bénin, vous êtes des enfants de Dieu, vous méritez de vivre, vous méritez d’être ensemble, c’est notre patrie. Et quand on dit la patrie, le sens étymologique, l’explication même, c’est la terre de nos pères.   On ne peut pas laisser la terre de ses pères dans la main d’une autre personne. Ça veut dire que c’est nous qui gérons. Quelle que soit la personne qui sera au pouvoir, nous on doit rester unis parce qu’ils font leur politique en haut et nous, nous devons être soudés pour changer les choses.

A t’entendre, j’ai envie de savoir si tu crains pour tes fans avec toute la tension, toute l’électricité qu’il y a dans l’air aujourd’hui ?

Je crains pour mes fans, mes frères, mes amis, mes cousins, ma famille, mon pays. Il faut que le Bénin reste un et indivisible. Moi, personnellement je m’en fous que le Président soit du nord, du sud, de l’est ou de l’ouest. L’essentiel c’est qu’il soit un bon dirigeant, un bon Béninois qui arrive à comprendre les problèmes de chaque Béninois et qui vient avec un esprit de patriotisme pour dire ‘’ je veux faire évoluer mon pays’’. Si on me trouve celui-là, moi, je m’en fous qu’il soit de teint clair, de teint noir, qu’il soit de l’est ou de l’ouest, du sud ou du nord. On s’en fout complètement, pourvu qu’il soit conscient des problèmes du pays.

Evidemment que tu n’as que faire de la couleur de la peau du prochain Président, mais tu n’es pas sans savoir qu’il y a une candidature qui fait couler beaucoup d’encre et de salive. Celle du premier ministre, le franco-béninois Lionel Zinsou. Quelle est position à son sujet ?

Je n’ai pas de position par rapport à un candidat. Un candidat béninois reste un candidat. Ce que chaque candidat devrait faire, c’est de se prononcer sur son projet de société. Vous avez quoi à nous proposer ? C’est le plus important. Qu’on se concentre sur les problèmes de la nation. Qu’on ne se concentre pas sur une personne. On ne doit pas regarder une personne. On regarde les projets de société et le combat se trouve sur le terrain. Que ce ne soit pas la guerre entre les candidats par médias interposés. Qu’est-ce- qu’on propose réellement aux Béninois ? Quel changement on veut nous amener ? C’est ça la question. En parlant de personne, on est en train de se tromper de débat.

Selon toi, comment comprendre qu’on en arrive là ?

On n’a eu un échec politique. Concernant nos partis politiques, il y a eu un échec politique. Quand je constate aujourd’hui que le plus grand rassemblement politique d’opposition qu’est l’Union fait la nation (UN) n’est pas arrivé à proposer un candidat malgré tout ce qu’ils ont fait, je crois qu’il y a un échec au niveau de nos partis politiques. Et donc qu’aujourd’hui, on ne nous parle plus de personne. Si on n’est arrivé à ce niveau-là, c’est parce qu’il y a eu cet échec, c’est parce que les gens sont incapables de proposer des choses concrètes pour la nation, qu’ils sont incapables de partir au combat politique avec des idées, idée contre idée, projet contre projet. Ils n’ont pas su le faire. S’ils avaient su faire ça, on ne saurait pas là aujourd’hui. Le patriotisme a déserté le forum. Il n’y a pas d’opposants politiques aujourd’hui, il n’y a que du clientélisme. Les gens viennent simplement parce qu’il y a quelque chose à gagner ici, quelque chose à gagner là-bas. On ne va plus au combat politique pour défendre la nation, et ça, c’est dommage !

Ce qui est également dommage, c’est qu’à l’université d’Abomey-Calavi, les jeunes ont chassé le premier-ministre Lionel Zinsou et l’ex-premier ministre Pascal Irénée Koupaki. Ça sent le roussi de ce côté-là. Qu’est-ce-que tu as à dire aux jeunes étudiants qui t’apprécient particulièrement ?

Je suis toute l’actualité et j’ai suivi la déclaration la déclaration de Emmanuel Assimada, un des responsables des étudiants. Je crois que leur réclamation, leur revendication est juste. Ils ont été clairs, ils ont dit ‘’ nous ne sommes contre personne. Aucun candidat ne nous a soutenu sur des projets. On a des problèmes sur le campus. On veut que les problèmes soient réglés et si un homme politique veut utiliser le campus pour faire passer des messages, il faut qu’il demande notre permission’’. Je crois que c’est leur territoire, même si c’est quelque chose qui appartient à l’Etat.

Ils sont sur leur territoire, mais quand la réclamation doit basculer en des actes de violence !

Non ! Ce qui est arrivé avec le premier ministre, il n’y avait pas de violence. Ils ont juste dire qu’ils ne veulent pas recevoir.

Mais certains ont échangé des coups de poings. On a vu des images !

C’est ça qu’on doit essayer de régler. Quand je parle d’aller à la rencontre de la jeunesse béninoise pour parler d’unité. On peut aller sur le campus. Je vais en parler avec Kmal Radji, on ira sur le campus pour discuter avec des responsables d’étudiants à chaque niveau et leur dire, ne faut pas qu’on en arrive à ça. Ils sont tous des Béninois sur le campus. Et s’ils revendiquent que les gens les préviennent d’abord avant de venir chez eux, c’est normal. Si vous venez chez moi alors qu’on n’a pas de rendez-vous, je ne vous reçois pas et c’est légal. Le respect que le premier ministre ou un autre homme politique peut donner aux étudiants, c’est d’envoyer un émissaire les avertir. Comme ça, les étudiants ont le temps de rédiger leurs problèmes et doléances pour les poser à la rencontre qui serait convenue. Quant aux violences, il faut tout faire pour éviter ça, l’éradiquer. Le peuple n’a pas besoin de ça aujourd’hui. Le peuple a besoin d’eau potable, d’électricité, d’école, d’éducation. C’est pour ces besoins qu’on doit se battre. On ne doit pas se battre pour les hommes politiques qui vendent nos têtes pour se faire enrichir.

Au-delà du campus, ton message s’adresse à tes milliers de fans qui te suivent à travers les réseaux sociaux ?

Le message reste le même. Pensons à l’unité nationale. Nous sommes des frères et sœurs et nous devons nous battre pour garder notre unité nationale. Le jour des votes, chacun ira dans l’isoloir et mettre ce qu’il veut, choisir qui lui semble bon. Mais cela ne va pas nous amener à ne pas se saluer dans la même maison, à ne pas s’entraider. Le Bénin reste un et indivisible.

Nous avons commencé par ta musique, je voudrais qu’on finisse cet entretien par tes projets artistiques pour 2016.

Mes projets pour 2016, partent aussi dans le sens de l’unification. On doit parcourir toutes les villes du Bénin pour faire des concerts gratuits afin de permettre à ceux qui sont dans les confins du Bénin, de vivre ce qu’on appelle de grands concerts parce qu’on a comme impression que tous les grands concerts se passent à Cotonou et ces gens n’ont pas les moyens de venir jusqu’ici, en plus s’acheter les billets d’entrée, penser où ils dormir avant de rentrer le lendemain chez eux. Nous allons amener ce que nous savons faire vers eux. Je veux faire ce tour du Bénin là mais ce sera avec beaucoup d’autres artistes.

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