L’Afrique est en passe de relever un défi, celui de juger sur le continent un ancien Chef d’Etat par un tribunal spécial : les Chambres africaines extraordinaire à Dakar au Sénégal, créé par l’Afrique elle-même.
Ce tribunal est chargé de juger l’ex-Président tchadien Hissène Habré, poursuivi pour actes de torture et de crimes contre l’humanité. Attendu pendant des années, c’est finalement le 20 juillet 2015 que ce procès a débuté pour le plus grand soulagement des familles des victimes qui se réjouissent de voir celui qu’elles considèrent comme le commanditaire des actes de torture et de meurtres. La première phase du procès qui est allée jusqu’en décembre 2015, a donné des lueurs d’espoir, non seulement aux victimes, mais aussi à l’opinion africaine quant au bon déroulement du procès. Du moins pour ce qui concerne les conditions d’équité et de transparence. En dehors de quelques critiques formulées par la défense et qui portent sur la partialité du tribunal, le déroulement du procès laisse présager une fin satisfaisante.
La détermination du tribunal à faire comparaître Hissène Habré de force, constitue la preuve que le tribunal veut faire avancer le procès et qu’il n’est pas prêt à céder aux caprices de l’accusé. La décision du tribunal de désigner trois nouveaux avocats à l’accusé et de leur accorder quarante cinq jours pour étudier le dossier, participe aussi vraisemblablement du souci du tribunal à établir l’équité et d’assurer d’équilibre des parties au procès. C’est dans le même sillage que doit être perçue, la variation des témoins auditionnés, soit plus de quatre-vingt dix. Un nombre considérable de témoignages que le tribunal appréciera avec objectivité, en tenant compte des observations de la défense. Laquelle estime que les témoins présentés jusqu’ici n’étaient que des témoins à charge. Et qu’en plus, ils ne sont pas parvenus à démontrer l’implication directe de l’accusé. La reprise de ce procès hier lundi, qui peut être considérée comme la seconde phase du procès, fera face à un défi. Celui de réussir à faire parler l’accusé Hissène Habré qui a adopté dès le début du procès, une attitude d’arrogance et de dénie du tribunal.
Après avoir réussi à le faire arriver au tribunal de force, la prochaine équation du tribunal, sera de trouver des stratagèmes pour le pousser à parler. A moins que le refus de l’accusé à articuler la moindre parole ne soit considéré comme un consentement tacite des accusations qui sont portées contre lui. Pour dire que le refus de parler d’Hissène Habré risquerait d’être une stratégie qui pourrait le desservir. L’attitude de défiance du tribunal par l’accusé ne devrait pas décourager les juges encore moins altérer leur obligation d’objectivité. Car le procès de cet ancien Chef d’Etat qui est une grande première en Afrique, apparaît en même tant comme un ballon d’essai pour les africains à expérimenter le procès des anciens dirigeants sur le continent et par un tribunal africain. Les Chambres africaines extraordinaires, ce tribunal d’expérimentation est en même tems en mission. Celle de prouver qu’un tribunal africain peut juger avec efficacité et objectivité, des personnalités aussi célèbres que les anciens Chefs d’Etats.
Une mission qui impose au juge de conserver son indépendance, de résister à toute influence politique quelle que soit son origine et de prononcer le jugement en toute objectivité, en son âme et conscience. Il serait donc souhaitable que d’ici le mois de mai 2016, période prévue pour la prononciation du verdict, que les juges continuent de conduire ledit procès dans la sérénité. Que rien n’entrave la poursuite du procès et que le tribunal garde la lucidité face à l’attitude de condescendance de l’accusé qui posera certainement des actes vilains, dont le but sera de mettre à vif les nerfs des membres de la Cour. Le verdict de ce procès doit refléter l’équité et la justice. Un verdict dont les profanes qui auront suivi le procès, devront accorder leur assentiment. Et que pour une fois, qu’on entende l’opinion dire que la justice africaine a marqué des points. Elle qui a souvent brillé par des procès iniques et éhontés. La réussite du procès actuel, pourra constituer un message pour les autres dirigeants africains
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