Bénin : Grogne, grogneurs et rupture

A qui profite-t-il le fait d’être dans l’informel ? Difficile question. L’informel est et reste, dans notre pays, le marigot privilégié de millions d’entrepreneurs et d’entreprises. On y coasse à l’envi, à l’abri et en marge de toutes normes.

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Prennent part à cette vie de grenouilles, les « grogneurs » béninois. Le mot est inconnu du dictionnaire français. Mais on comprend qu’il s’agit de tous ceux et de toutes celles qui utilisent les canaux des médias pour manifester leur mécontentement. Ils dénoncent ce qui ne leur semble pas aller bien dans le pays. Ils sont omniprésents sur nos médias. On ne peut plus les ignorer. On ne doit plus les minorer.

Mais on peut regretter qu’ils soient dispersés, qu’ils ignorent tout des médias sur lesquels ils interviennent. Ce sont des atomes libres qui ne s’adossent à rien, ne s’accrochent à rien. Il n’existe pas encore une conscience de « grogneurs ». Avec des gens s’identifiant comme tels et entretenant un véritable esprit de corps. Nos « grogneurs » s’ignorent les uns les autres. Ils méconnaissent la portée sociale de ce qu’ils font. Il n’est pas sûr qu’ils sachent, de manière claire et précise, les raisons et des motivations de leur action. Chacun d’eux s’accroche à son téléphone. Tous attendent que le dieu de la communication les connecte et leur ouvre la ligne. Tout simplement.

Il est temps que les « grogneurs » béninois changent leur fusil d’épaule. « La rupture » doit les visiter. « La rupture doit les obliger à se donner une maison commune, à créer entre eux des synergies gagnantes. « La rupture » doit les aider à mutualiser leurs capacités d’intervention pour être plus forts dans la République. « La rupture » doit les conduire à se former pour se donner le statut honorable de « faiseurs d’opinion », « d’objecteurs de conscience ». Organisés, les « grogneurs » ne peuvent plus être ignorés par la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC). Cadrés et encadrés, ils deviennent des partenaires qui se soumettent à une régulation d’ensemble, gage de la bonne santé mentale et morale de notre société. Structurés, les « grogneurs » ne peuvent plus être vus comme des utilisateurs périphériques des médias. Ils gagnent le droit d’exiger une juste place dans le système de communication de notre pays. Ils gagnent le visa pour être reconnus comme une force de propositions. Mais comment y parvenir ?

Il faut nourrir l’ambition de réunir, à l’échelle nationale, dans le cadre d’un congrès, tous nos « grogneurs ». L’objectif serait prioritairement de donner un visage à un corps d’activité dont le rôle n’est pas moindre dans notre expérience démocratique. Le Maire d’une localité de notre pays nous a confié qu’il doit son efficacité dans sa commune à l’action des « grogneurs ». Et il ne s’agit pas là d’une exception, d’un cas isolé. Des citoyens que l’on crédite d’actions à forts coefficients d’utilité publique ne doivent plus se couvrir de ténèbres. Ils ne peuvent plus se réfugier dans l’informel. Les « grogneurs », comme citoyens de droits et de devoirs, doivent avoir un statut, obéir à des règles, être reconnus comme une force sociale organisée et d’utilité publique.

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En plus de ce cadre formel que nous appelons de nos vœux, les « grogneurs » doivent assurer la police en leurs propres rangs. Il faut absolument assainir le milieu, en séparant le bon grain de l’ivraie. On parle de l’ordre des médecins, des architectes ou des experts-comptables. Pourquoi pas de l’ordre des « grogneurs » ?

Un « grogneur » ignorant est aussi dangereux, aussi nuisible à lui-même et à sa société qu’un « grogneur » qui voit tout en noir, qui peint tout sous les couleurs lugubres du malheur. La formation tiendra une place de choix dans l’action des « grogneurs » enfin sortis de l’informel et décidés de jouer la carte de la compétence et de l’excellence dans leur action sociale. C’est Martin Luther King qui nous conforte dans cette idée. (Citation) « Un homme devrait faire son travail si parfaitement que les vivants, les morts et ceux encore à naître ne puissent faire mieux ». (Fin de citation) Il ne devrait pas y avoir de demi-grogneur. Il faut appeler à l’avènement d’un « grogneur » nouveau, un « grogneur » qui a une conscience aigue de sa mission, un « grogneur » qui sait bien faire son travail. Car ce « grogneur » là vaut et en vaudra toujours deux. Voilà qui est dit. Avons-nous trop rêvé ? Répondez-nous, amis « grogneurs ».

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