Bénin : Petits et grands volcans de la rupture

Rupture. Le mot n’est pas banal. Il a une charge explosive certaine. Il marque la démarcation entre quelque chose que l’on rejette et quelque chose d’autre auquel l’on aspire.

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Dans le contexte actuel du Bénin, en fonction de l’état d’esprit général, la rupture prend un sens précis. Elle veut dire qu’on a tourné une page et qu’à défaut d’en écrire une autre, on est prêt à changer de livre. De ce fait, les nouvelles autorités de notre pays doivent se préparer à gérer, les jours prochains, des situations inédites. Ici, des explosions de colère. Là, des éruptions d’indignation. Partout, des déflagrations de rage.

En effet, le feu couve sous au moins quatre ordres de situations. Chacune d’elles est à circonscrire et à surveiller comme un dépôt de produits inflammables. Les populations, après le précieux point marqué dans les urnes, entendent, à présent, transformer l’essai. Quelles sont-elles donc ces situations qui appellent notre attention et notre vigilance ?

1- La médiocratie érigée en système de gouvernance. Les Béninois ne sont plus disposés, au nom de la rupture, à se taire et à « encaisser », comme on dit, face à des cas flagrants de fraude, de favoritisme ou d’injustice. Nous avons commencé par faire avaler la pilule aux Béninois avec la notion plus que contestable de « quota ». L’appétit venant en mangeant, nous avons habillement transformé le « quota » en passe-droit. Ce qui est devenu, à la loterie de la vie, le privilège des bien-nés, des bien placés et des bien-aimés. On peut avoir son diplôme en restant chez soi. On peut être reçu à un concours et à un examen par l’opération du Saint-Esprit. Au nom de la rupture, les Béninois disent non.

2 – Des projets laissés en rade, de véritables éléphants blancs qui insultent l’intelligence des populations. Pour des raisons électoralistes ou par pure démagogie, on a promis monts et merveilles aux populations. Le pont de Womê en une illustration. Quelque chose que l’on tient pour une entreprise joue le jeu. Elle fait déplacer sur le site quelques poteaux. Un semblant de mouvement s’observe sur le chantier. La première pierre est posée, arrosée de moult discours. Puis, un jour, tout s’arrête. Et tout le monde se rend compte, Gros jean comme devant, qu’il y a de la duperie dans l’air. Les populations reconnaissent enfin avoir été proprement flouées. Au nom de la rupture, les Béninois ne sont plus disposés à tolérer ou à vivre une telle imposture. Au fait, que dit-on du chantier de l’Assemblée nationale à Porto-Novo ?

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3- Des scandales financiers qui tardent à trouver une conclusion raisonnable et équitable. On pense essentiellement à l’affaire ICC Services. C’est la bagatelle de 150 milliards de francs CFA qui fait, ici, l’objet d’une inqualifiable escroquerie. Une affaire qui s’est invitée dans le débat des élections, certains candidats ayant laissé entendre qu’ils ont, sur le sujet, une approche de solution. Des milliers de Béninois n’ont plus que leurs yeux pour pleurer. Ils été volés. Leurs économies ont disparu dans le trou noir. Leur épargne s’est dissipée aux quatre vents. A présent et sans perspectives claires, flotte sur toutes les lèvres la question- refrain du jeune artiste-musicien béninois : « On fait comment… » Aujourd’hui, au nom de la rupture, les Béninois ne peuvent montrer le même degré de patience. Les Béninois   ne peuvent faire montre de la même résignation. Alors, la révolte chevillée au corps, les Béninois crient leur ras-le-bol. Et de poser la question à qui veut bien les écouter, les entendre et leur répondre : « On fait comment ? »

4 – Des cas quotidiens de racket des populations ou de corruption. Le Béninois a entretenu, jusqu’ici, la conscience malheureuse d’un citoyen traqué de toutes parts. Il est racketté sur les routes. Il est rançonné dans l’administration. Il est humilié dans les hôpitaux et dans les centres de santé. Voici que la « rupture » semble l’avoir dopé. Voici que la rupture semble l’avoir doté d’un potentiel insoupçonné de révolte. Il y a gros à parier qu’au nom de la rupture, il ne se laissera plus faire. C’est un jour nouveau qui point. C’est une pensée nouvelle qui illumine les esprits. Ce sont des comportements nouveaux qui vont s’affirmer et se développer. Si c’est cela « Le nouveau départ », pour la rupture, nous sommes prêts. En avant toute !

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