Lettre à Hillary Clinton : Halte aux violences faites aux femmes

Alors qu’Irina BUKOVA et quatre autres femmes se sentent compétentes et armées pour diriger la prestigieuse organisation des Nations Unies (ONU), alors qu’Hillary Clinton a mené une campagne intense et va être déposée dans le fauteuil redoutable de la Maison Blanche et que l’Angleterre s’est déjà offerte une Première Ministre pour conduire le nouveau programme économique hors Euro que son peuple s’est librement donné, ici au Bénin, après avoir crié notre indignation face à la marginalisation dont nous femmes de ce pays sommes exposées depuis tant de décennies, nous devons une fois encore sortir pour hurler notre douleur face aux violences, à la barbarie dont nous sommes victimes, étant confrontées en première ligne à tous les maux qui minent notre société.

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Ne sachant plus à quel Saint se vouer, je viens à travers cette lettre, implorer le secours du first Lady H. CLINTON pour nous sortir, nous femmes béninoises de toutes ces camisoles de force que les hommes nous font porter.

Et pourtant, activiste de la société civile, très au fait des préoccupations féminines, j’avais initié il y a deux ans au sein de mon association de femmes écrivains Plumes Amazones,  un projet d’écriture collectif pour sonner l’alarme sur ce fléau de violences faites aux femmes (VFF), qui sont le lot quotidien des femmes africaines en général. Malgré l’accord de l’UNPFA qui devait recevoir le financement de l’Ambassade de France, depuis deux ans rien de concret ne se fait, en dehors des rencontres préparatoires qui ont pris fin dès l’annonce des résultats des élections présidentielles. Aux dernières nouvelles, « tous les projets culturels et autres qui devaient recevoir un financement de la France sont suspendus », m’a déclaré mon interlocuteur à l’ambassade. Les élections sont passées par là et la France, pays des droits de l’Homme, pays de la Révolution de 1897, qui a emmené mon père à combattre pour elle en Algérie pour une cause qui ne le concernait guère, ne reconnait pas aux Béninois le droit d’élire celui qui a la lourde mission de présider aux destinées de leur pays.

Quel gâchis mais tant que je vis…

C’est le cœur meurtri que je confesse publiquement cette situation incompréhensible. Tant de nuits à veiller pour écrire l’histoire traumatisante de toutes ces femmes battues, violées, excisées et puis, plus rien. Silence radio de tous côtés. L’UNFPA ne répond plus aux courriels ni aux coups de fil. Qu’est-ce que Plumes Amazones et les pauvres lycéennes du Lycée des jeunes filles de Natitingou qui se sont échinées pour produire des témoignages émouvants sur la violence dans leur environnement immédiat ont à voir avec le choix d’un candidat au lieu d’un autre par la France ?

Mes étudiants de l’Ecole Normale Supérieure aussi que j’avais associés au projet y ont cru et ont mis en route leurs talents de scribouillards. Il a fallu que je m’inscrive dans une totale réécriture de leurs textes. Mais que de joie sur les visages lorsqu’ils apprirent que enfin, l’Ambassade de France était intéressée par notre projet d’écriture et allait enfin financer le livre après une si longue attente. Que d’amertume à gérer en tant que Présidente de l’Association Plumes Amazones, alors que le projet avait déjà enfin atterri dans les locaux de l’Ambassade de France. Comment mettre en doute la parole de ces deux prestigieuses institutions ? J’en reviens pas. L’ambition suprême du projet était, sous l’égide de l’UNFPA, de vulgariser le livre dans tous les départements. Tous les leaders d’opinion, toutes les confessions religieuses, les organisations de la société civile, les corps constitués, bref la société béninoise toute entière devait être au fait des violences faites aux femmes chez nous, au Bénin, à travers des récits de vie racontées par des auteures, des élèves et des étudiants. Mon association n’a pas les moyens d’entreprendre un travail de cette envergure nationale. Même le Fonds d’aide à la culture qui n’octroie que des miettes aux non  initiés ne permettait pas de réaliser cet exploit. Et c’est pourquoi je pousse ce cri de cœur à l’endroit de la future présidente des USA, afin qu’elle vole au secours des femmes africaines, des Béninoises, véritables damnées de la terre.

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Les violences refont surface à une allure vertigineuse

Face à l’urgence de ce drame qui habite dans nos maisons, dans nos quartiers, du nord au sud du pays, l’Etat souverain, à travers ses structures nationales telles que la Direction du Genre et l’Institution nationale pour la promotion de la Femme, devra s’autosaisir pour châtier tous ces mâles transformés en animaux sauvages qui exercent leur force animale contre la femme. Kofi OLOMIDE l’a appris à ses dépens, la femme est un être sacré. Un pays qui maltraite la mère de la patrie attire sur lui les foudres des dieux. C’est un pays condamné à s’autodétruire. Allons-nous accepter ceci mes chers compatriotes ?                                     

Au secours Hillary Clinton

Au secours de nos économies anémiées qui ne nous permettent plus de vivre convenablement. Vous êtes une mère et vous savez qu’en de pareilles circonstances, ce sont les femmes et les enfants qui trinquent. Nos enfants ont faim et meurent comme des mouches dans les hôpitaux, du fait de la malnutrition et de la malaria. En aidant nos pays, vous volez au secours des mères et des enfants, les personnes les plus vulnérables de la société. Vous exigerez une pleine participation des femmes, afin que les aides nous soient effectivement distribuées et non détournées à des fins électoralistes par ces hommes avides d’argent et de pouvoir. Pour sortir nos familles de la précarité. Et arrêter l’animalité qui refait surface chez nos hommes.

PITIE POUR NOS FEMMES ! Pitie pour mon genre !

Tout le monde sait que les temps sont très difficiles. Les femmes plus que quiconque le ressentent encore plus. Mais les hommes pensent qu’ils sont plus victimes de la crise économique que quiconque. La plupart des femmes que je côtoie me confient que leurs conjoints se contentent de déposer « ce qu’ils peuvent sur le meuble du salon avant de disparaitre au lever du jour ».

Certains partent pour toute la semaine en laissant 1000 frs, je dis bien mille francs CFA pour les besoins de la femme et cinq enfants. Il y en a qui ne s’inquiètent même pas de ce que femmes et enfants auront à manger durant leur absence. Et on s’étonne que la pauvre épouse aille voir ailleurs. Quelle femme a le cœur assez dur pour voir sa progéniture pleurer de faim toute une journée, sans chercher une solution, peu importe laquelle, pourvu que ces chers petits aient quelque chose à caler dans leur ventre. Si les hommes rencontrent des difficultés dans leur quête de travail, de ressources financières, et se heurtent à un mur, est ce notre faute pour qu’ils dévorent leur rage sur nous, pauvres femmes ? S’ils n’ont plus de quoi s’offrir leurs bières béninoises quotidiennes, est ce notre faute pour qu’ils nous mutilent à vie, de manière à ce que en quittant leur toit, nous ne puissions plus jamais plaire à quelqu’un d’autre ?

Au secours Hillary Clinton

Avec l’avènement de cette dame à la Maison blanche, je vis dans l’espoir que beaucoup de choses changeront dans nos vies, à nous les femmes des pays sous-développés. Elle viendra nous sortir des griffes de nos hommes machistes qui n’accordent aucune importance à notre genre. En effet, l’arrivée d’une femme de la trempe d’Hillary Clinton comme présidente des USA, toutes les femmes du monde se sentiront fières, honorées et plus confiantes en leurs capacités managériales. Si une femme a pu s’asseoir dans le fauteuil prestigieux de la Maison blanche, si une femme peut diriger la Nation la plus puissante du monde, alors, je crois que les hommes porteront un regard nouveau sur nous, le sexe dit faible. L’humanité entière connaîtra aussi un nouveau départ, car Hillary CLINTON viendra rehausser notre cote, et damer à tous ces machos qui nous dirigent  et nous relèguent aux rôles subalternes quand il s’agit de nous associer aux postes de décisions dans nos pays en Afrique.

Quant aux postes électoraux, les places sont vendues aux plus offrants. Et Dieu seul sait que ce sont toujours eux les hommes qui savent le mieux dérober les deniers publics pour s’offrir des moyens colossaux de conquête du pouvoir à tous les niveaux lors des élections.  

Pitié pour nos femmes : Halte aux violences faites aux femmes

Alors que les braquages battent leur plein, que l’université est en ébullition depuis des mois et a atteint son pic d’effervescence il y a quelques semaines, avec l’invalidation de l’année scolaire à la FLASH et le renvoi pour cinq années de 21 étudiants, un autre phénomène surgit et retient l’attention des citoyens de mon pays. Particulièrement l’attention des femmes, car la plupart d’entre nous avons été choquées par les visages tuméfiés et charcutés de ces deux femmes qui ont circulé sur les réseaux sociaux ces deux dernières semaines. On avait cru naïvement qu’avec la promulgation par l’Assemblée de la loi contre les violences faites aux femmes, on pouvait se frotter les mains et se dire : « Ah !maintenant, nous pouvons dormir tranquilles, les pieds au mur. Nous sommes désormais protégées par une loi… »

Une loi ! Que représente la loi dans un pays ou plus de 70 % de la population sont analphabètes ?

Une loi ! Que représente une loi dans un pays ou la société est si machiste qu’elle ne concède rien à l’autre genre.

Une loi ! Qu’est-ce qu’une loi dans un pays ou les besoins de la femme sont essentiellement réalisés grâce au bon vouloir de son homme ?

C’est-à-dire que se sentant investi d’une mission divine pour régenter la vie et la mort de sa partenaire, il peut lui redresser le portrait, ou la battre jusqu’à ce que mort survienne. Sans avoir de compte à rendre à qui que ce soit. Une vidéo montrait une femme battue à mort par un homme pour avoir découché, sous les huées et encouragements des spectateurs. Les deux femmes dont les faces ont servir de putching ball et de viande à découper à leurs conjoints ont passé un mauvais quart d’heure pour avoir désobéi à leur « maitre », que dis-je, leur propriétaire. Sinon comment comprendre que la première ait tout le visage boursouflé, tellement elle a reçu des coups de poing sur sa face. Monsieur lui reproche d’avoir décroché son téléphone pendant qu’il n’était sûrement pas à côté. Quel crime de lèse-majesté ? Qu’avait-il tant à lui cacher ?

Quant à la seconde, à voir la profonde entaille qui lui barre la joue gauche, on se demande  si l’auteur du découpage de ce morceau de chair et de l’entaille sur sa tête a pu l’anesthésier avant d’accomplir cette macabre besogne. Anesthésie ! De l’anesthésie pourquoi ? Pour cette chienne en chaleur qui a osé aller s’offrir gratuitement au voisin, alors que lui, il avait dû payer vaches, cochons, couvées  à ses géniteurs, avant que ces derniers ne lui offrent leur fille corps et âme !

Mais faut-il désespérer de l’humain ? Non ! a répondu Einstein qui déclare : « Nous ne pouvons pas désespérer des Hommes puisque nous sommes nous-mêmes des Hommes ».

Je conclus enfin en disant à mes sœurs de continuer à se battre aux côtés des hommes pour le bonheur de notre peuple, pour le développement de notre pays. « Bien qu’ici il n’y ait plus rien sous l’herbe nous ne pleurerons pas, nous garderons plutôt notre force de ce qui est resté derrière nous ». Chaque jour, mes ancêtres les Amazones, femmes guerrières de Ghézo m’inspirent dans mon combat contre l’injustice sociale, la marginalisation des femmes et toutes les formes de violences auxquelles nous devons faire face.

Alors du nerf pour la suite, mes chers sœurs, du nerf pour toutes les femmes du Tiers monde en général. Pendant que la femme conquiert partout les bastilles naguère occupées que dis-je régentées par les hommes     (sport= économie=politique…etc.),    nous, femmes béninoises continuons d’être marginalisées, abandonnées sur le quai de la gare. C’est pourquoi je vous appelle au secours Mme Hillary CLINTON, pour nous aider à changer la donne.

Afin que nous soyons considérés à notre juste valeur sur l’échiquier politique, afin que les pesanteurs socio culturelles qui freinent l’épanouissement du plus grand nombre soient rejetées définitivement dans les annales du passé. Afin que cessent définitivement les Violences Faites aux Femmes. Afin que les femmes aient le libre arbitre sur leur corps et sur leur esprit.

Le temps des Femmes est arrivé. Reprenons confiance en nous ! Confiance, estime de soi et plus de solidarité ! Alors, mes chères sœurs, mes chères compatriotes, « A vos marques ! Prêtes, partons » !

Adélaïde FASSINOU ALLAGBADA 
Professeur de Lettres – Ecrivain

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