Dictateur et fier de l’être, Yaya Jammeh aura été jusqu’au bout, fidèle à sa réputation de roi Ubu, fantasque, grossier, arrogant, imprévisible et insaisissable .Deux revirements spectaculaires en moins de huit jours, avec à la clé, ce sentiment indéfinissable qui fait froid dans le dos qu’avec lui, tout est encore possible et le pire reste à venir.
Alors que le décompte des voix était en cours, le dictateur téléphone au président de la commission pour reconnaître la victoire de son challenger, à la surprise générale, à commencer par celle du vieux président de la commission électorale. Les moins crédules, habitués à ses frasques légendaires avaient prédit dans la foulée que cette reconnaissance du bout des lèvres de la victoire d’Adama Barrow n’était qu’une farce, au moment où les plus optimistes s’extasiaient devant ce qu’ils considéraient comme une double ‘’divine surprise’’ : la reconnaissance de la victoire de son challenger et l’acceptation de facto de l’alternance. Ils ne croyaient pas si bien dire! Les Gambiens, eux, sont coutumiers de ses revirements à 180° .Le ton glacial et menaçant qu’il a adopté pour marteler son refus d’accepter l’évidence de son échec moins d’une semaine plus tard ne leur est pas étranger. L’homme est bien connu pour ses coups de gueule et ses sorties tonitruantes. Mais la vacuité de son argumentaire est patente lorsqu’il évoque la mauvaise foi supposée du président de la commission électorale ,accusé à tort d’avoir tripatouillé les chiffres en sa défaveur..
On peut aujourd’hui expliquer ce qui a pu se passer dans la tête du dictateur de Banjul, le jour de la proclamation des résultats et après; Yaya Jammeh qui, la veille du vote proclamait encore urbi et orbi qu’il gagnerait dès le premier tour, ne s’attendait visiblement pas à la victoire de son challenger, obscur trésorier d’un parti dont le principal opposant, l’avocat Oussainou Darbo croupissait en prison Mal, lui en a pris! Cependant, très vite il a pris la mesure de ce qui lui arrivait. Il s’est visiblement rendu compte que les populations en avait assez de ces 22 ans de folie meurtrière. Et elles le lui ont prouvé les jours suivants, .Yaya Jammeh a dû penser tour à tour à Gbagbo, entêté jusqu’au bout de son humiliante capture et surtout à Compaoré qui a été contraint de prendre la poudre d’escampette vers la Côte d’Ivoire voisine. Peut- être s’est il souvenu du triste sort de Charles Taylor, acculé par Bush et habilement contraint par Obasanjo à rejoindre un exil doré dans l’Etat de Calabar, avant d’être exfiltré manu militari vers la Sierra Léone puis à la Haye. Mais les dictateurs sont incorrigibles. Jusqu’au bout, ils restent sourds aux appels à la sagesse. Le dernier coup de poker de Yaya Jammeh a été, contre toute attente, l’acceptation de se soumettre au verdict de la Cour suprême qu’il devrait saisir ce jour même, dans l’espoir de conserver son fauteuil.
Cependant, la partie est bel et bien terminée pour lui et sa soldatesque. Les juges de la cour suprême quels qu’ils soient, portés par le vent de liberté qui souffle sur ce minuscule pays , grand comme un département du Bénin ne devraient pas faire moins que leurs pairs de la cour d’appel de Banjul qui ont libéré Darbo et ses compagnons d’infortune sous caution la semaine dernière. Pourvu que le trio des chefs d’Etat de la Cedeao attendus ce jour à Banjul ne tombe pas dans les mêmes errements qui les ont conduits à accorder naguère au putschiste malien Sanogo des avantages dus aux anciens chefs d’Etat! Pourvu aussi qu’ils se souviennent de la rebuffade subie par Macky Sall et Boni Yayi à Ouaga, quand eux et leurs pairs de la Cedeao avaient tenté de composer avec les putschistes du général félon Diendéré contre l’avis de toutes les forces vives du Burkina! Les urnes des Gambiens ont parlé et Yaya Jammeh est bel et bien fini et il n’y a plus rien à négocier avec lui!r
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