Trésors pillés par la France: « Ils n’ont qu’à rendre la totalité» dixit Ousmane Alédji

La demande de restitution d’objets de valeur issus du patrimoine national culturel faite par le Bénin à la France, est un sujet d’actualité qui parfois fait monter la température dans certains fora, chez des passionnés.Le débat de plus en plus se fait. Davantage, il prend de l’ampleur. Même dans des milieux insoupçonnés où seul le sujet politique est de mise, on s’y intéresse et les opinions et arguments des uns et des autres sont revisités.

La demande de restitution d’objets de valeur issus du patrimoine national culturel faite par le Bénin à la France, est un sujet d’actualité qui parfois fait monter la température dans certains fora, chez des passionnés. Ousmane ALEDJI, fondateur du centre culturel ArtisttikAfrica, qui aussi, est un passionné, va plus loin et qui souhaite que le gouvernement entreprenne la même démarche en direction de tous les pays qui possèderaient les richesses culturelles et historiques béninoises ; y compris auprès des collectionneurs privés. A lui en premier sur le sujet, nous avons tendu le micro.

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Enthousiasme et Fierté

« C’est une cause à défendre. Aucun Africain digne du nom, attaché à sa culture ne peut laisser faire une telle chose. Quand le gouvernement de mon pays vient à prendre une décision comme celle-là, comprenez que je le soutienne ; c’est pour moi un motif de fierté ! ». Ousmane ALEDJI, entrepreneur culturel béninois félicite l’Etat béninois lorsque celui-ci demande à la France de rendre au Bénin son patrimoine culturel et historique pillé à l’époque de la colonisation. Le promoteur du centre culturel en fait même « un lieu d’orgueil » en comparaison à certaines anciennes colonies françaises d’Afrique qui n’ont pas encore entamé une telle démarche. Celui qui pourrait rivaliser de taille et de corpulence avec Usain Bolt, l’athlète jamaïcain, droit dans ses bottes, espère vivement, mieux, porte la conviction de l’heureux aboutissement de cette requête. « Nous ferons tout, ça peut prendre des mois, des années mais nous ferons tout pour aller jusqu’au bout » affirme-t- il le regard porté au loin. Généralisation de la demande

Ce sur quoi il compte par-dessous tout, c’est la généralisation de la demande. «Moi, je vais plus loin.  Pour aujourd’hui, c’est vrai que c’est à l’adresse de l’Etat français que la demande est faite. Mais je souhaite que ce qui est allé dans tous les sens : aux Etats-Unis, au Japon, dans des collections privées et qui nous appartiennent comme objets relevant du patrimoine national historique, que nous les récupérions partout, que nous les chassions partout » affirme le prince Yoruba, certain que le vent qui souffle en cet instant porte ses espoirs dans les oreilles des esprits, des mânes des ancêtres, notamment du roi Béhanzin, pour avoir leur bénédiction. Autrement, le Bénin ne doit pas s’arrêter en si bon chemin mais doit plutôt élargir son champ d’action et réclamer « au monde entier » ce qui lui est dû. IL prend l’exemple de nations qui ont réussi cela et propose de leur emboîter le pas.

Hélène Le Gal a-t- elle menti ?

Elle est la conseillère Afrique de l’Elysée. Dans sa parution du 1 er aout 2016 titré « Trésors pillés : ‘’ La France doit répondre positivement à la demande du Bénin’’ », le journal LE MONDE AFRIQUE www.lemonde.fr , a cité Hélène le Gal en disant ceci : « …il n’y a pas eu de pillage colonial. Simplement, en 1894 juste avant d’être déporté en Martinique… le roi Béhanzin avait, dans un geste magnanime, offert son spectre royal, son trône, les portes sacrées du palais, les statues non moins sacrées de son père et de son grand-père, et tout cela librement, ‘’conformément au droit international’’ ». Interrogé sur l’éventuelle véracité de ces propos, celui qui dirigeait dans les années 2000 la Compagnie de théâtre Agbo-N’koko a rétorqué : « C’est des ragots. C’est des propos rapportés pour se donner bonne conscience. Même si cela était vrai, le roi, tout roi qu’il fût, n’avait pas le droit de brader ce qui relève du patrimoine public commun. Ça ne lui appartenait pas. Les rois se succédaient donc aucun roi n’avait le titre foncier sur le patrimoine ancestral » Il va plus loin et insiste sur le fait qu’objets donnés et pillés doivent être rendus par la France parce qu’il n’est pas possible de distinguer, de faire la différence entre les objets. « Pillés ou donnés, il n’y a aucune façon de faire la différence. Ce qui est donné, illégitimement donné doit être rendu. C’est du recèle. Le roi lui-même était un patrimoine national. Il ne s’appartenait pas. Donc on récupère ça aussi » insiste Ousmane ALEDJI.

Rapport de force ou la réputation de la France ?

Cinq mille objets (5.000) appartenant au patrimoine béninois seraient actuellement répandus en France dans des musées et chez des collectionneurs privés. Alors que dans certains documents à l’Unesco et en France, on parle de quarante (40) objets seulement présents sur le territoire français. Afin de récupérer tout cela, « le bras de fer n’est pas nécessaire. Le Bénin perdrait face à la France dans un rapport de force ou de rapport de puissance. C’est l’avis de l’écrivain-dramaturge Ousmane ALEDJI. « Mais je crois que les lois internationales sont de notre côté. Il faut espérer, j’insiste là-dessus que nous fassions à la fois le travail scientifique et technique mais aussi le travail juridique et le travail au niveau diplomatique ». Il poursuit en ces termes : « Ça doit être structuré de sorte que les gens ne nous voient pas ça comme un affrontement avec la partie française mais comme une réclamation légale et légitime» Il demeure convaincu grâce aux fondamentales dont se réclame la France, qu’elle a intérêt à préserver sa réputation de pays de grands esprits, de mériter par l’acte, les nobles valeurs d’humanisme, de droits de l’Homme, de droits universels, de démocratie et liberté qu’on lui prête. Selon M. ALEDJI, « la France que je respecte n’accepterait pas qu’une histoire comme celle-là vienne entacher sa réputation. C’est de la grande France que je parle bien entendu ».

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Disponibilité et sécurité pour accueillir

C’est un secret de polichinelle : le pourcentage réservé à la culture chaque année par le budget national béninois, selon Thanguy AGOÏ, l’un des journalistes culturels les plus en vue dans le pays, ne dépasse jamais un pour cent (1%). La marge qui est réservée à ce secteur est souvent en dessous, depuis 1960. Une cagnotte qui ne permet pas véritablement l’essor du monde culturel béninois notamment, la construction de musées appropriés pour conserver, protéger et promouvoir ces objets. Raison pour laquelle certains nationaux préfèrent que ce patrimoine demeure en France pour éviter une éventuelle détérioration par abandon une fois repris. Ousmane ALEDJI face à cet argumentaire se désole en ces termes : « Ce sont des pessimistes et des gens amers. Je les comprends. Quand vous avez lutté, milité pour les mêmes causes pendant des années, vous finissez par désespérer. C’est du défaitisme positif.

Ceux qui disent ça, sont les premiers à détester ce qu’eux-mêmes disent» Ce que l’homme de culture ne conçoit pas. Il ajoute : « Nous sommes là dans une projection. Nous voulons construire. Bâtir. Révéler… comme dirait l’autre. Le futur nous appartient. Alors pourquoi ne pas projeter des constructions de musées et des conservatoires. Solliciter de là où on en manque pour bien prendre soin de ces objets. » Il finit en disant ceci : « Je souhaite que ceux qui disent cela ravalent leur propos, ravalent leur colère et se mettent du côté du pays. C’est une cause nationale. Et moi, je suis au front.»

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