Droits fonciers des femmes : « Nous devons changer de mentalité pour un Bénin prospère »

Oumar Sangaré Zénabou : Les femmes n’ont pas accès à la terre au Bénin. Il faudrait que nous ayons le courage de le dire. Dans une interview accordée à notre rédaction, la conseillère communale de Bembèrèkè, Oumar Sangaré Zénabou, a expliqué que les femmes continuent d’être marginalisées dans l’accès aux droits fonciers, du fait de la mentalité des béninois, et qu’il est temps de dénoncer cette pratique discriminatoire.

Lnt : Que pensez-vous des droits fonciers des femmes au Bénin ?

Oumar Sangaré Zénabou : Nos pesanteurs socioéconomiques ne sont peut-être pas à occulter, mais je pense qu’il y a une mauvaise volonté de la part des hommes politiques en la matière. Nous devons changer de mentalité pour que les fils et filles de ce pays aient les mêmes droits, l’avenir du Bénin en dépend.

Etes-vous sure que la responsabilité revient aux autorités politiques ?

Je l’affirme sans ambages. Nos autorités politiques à divers niveaux ne s’impliquent pas suffisamment pour que le tir soit corrigé. Pour preuve, le Bénin a ratifié des textes internationaux relatifs aux droits fonciers des femmes, mais ceux-ci ne sont pas appliqués. Mieux, au plan national, le Code domanial et foncier et la constitution béninoise sont appliqués partiellement. Le projet de révision de la constitution en son article 26 nouveau, a mis un accent particulier sur la question. Malheureusement, cela a été rejeté par le parlement.

Il est facile de tenir l’autre pour responsable. En tant qu’élue locale, qu’avez-vous fait concrètement pour que ces femmes soient imprégnées de ces textes ?

Nous avons organisé des journées de sensibilisation sur les droits fonciers des femmes. De plus, je travaille avec la radio de Bembèrèkè sur la question, pour que ces femmes soient suffisamment informées de leurs droits. Ce que je peux relever à ce niveau, c’est la lecture que font les hommes des sensibilisations que nous organisons. Ces derniers pensent que nous voulons pousser leurs femmes à la révolte, ce qui complique parfois nos activités. Mais nous travaillons à ce que les femmes ne soient plus lésées.

Est-ce à dire que les femmes rurales ne peuvent pas s’acheter un lopin de terre si éventuellement elles en possèdent de l’argent ?

Les femmes n’ont pas accès à la propriété terrienne, c’est une réalité dans ma localité et aussi ailleurs. Si elles doivent travailler, cela se fait dans les champs de leurs mari, elle n’en possèdent pas. Si une femme décide d’avoir sa propre parcelle, elle est aussitôt soupçonnée de divorce ou de vouloir jouer les émancipées. Même si le mari la comprend, les grands parents vont lui créer des problèmes. Il y a cette pesanteur coutumière qui agit sur le droit des femmes. Ça crée un conflit entre le chef coutumier et les délégués, parce qu’un délégué qui délivre une convention de vente à une femme se crée des problèmes. Pour donner la possibilité à ces femmes d’acheter une parcelle, nous leur avons demandé de se constituer en groupement d’intérêt économique. Nous allons continuer le combat et à faire le plaidoyer au côté de la fondation Konrad Adenauer, pour un accès équitable pour tous aux droits fonciers au Bénin.

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