» Nous avons vu d’anciens hauts cadres de notre pays faire le pied de grue comme de vulgaires individus. « Scène de grande tristesse et de totale désolation : la semaine dernière, à Cotonou, autour des installations du Trésor public, nos retraités, en rangs d’oignon, se sont vus abandonner à se consumer sous un soleil de plomb. Qu’est-ce qui urge tant pour qu’on n’ait trouvé que cette seule manière, une manière déplorable à tout le moins, de faire le rappel de ces anciens et valeureux serviteurs du pays ? Beaucoup venaient de loin. Certains autres ont dû sortir, contraints et forcés, de leur lit de malades.
Renseignements pris, il s’était agi d’une opération de contrôle. Des réseaux mafieux dribbleraient régulièrement l’Etat. Les membres de ces réseaux empocheraient les pensions de retraite qui auraient dû être suspendues suite à la mort des ayants-droit. Ces réseaux se sucreraient ainsi sur le dos des morts, tirant profit des défaillances de l’Etat.
Nous avons aperçu, délabrées par l’âge et la maladie, dans des queues qui n’en finissaient plus, des personnes qui n’en pouvaient plus. Nous en avons vu d’autres qui, au bout d’un moment, ont renoncé à avancer, littéralement écrasées par un soleil méchant et sans pitié. Aucune assistance n’était prévue. Aucune ambulance n’était visible. Le danger rodait. Le drame flottait dans l’air. Voilà les sacrifiés d’un jour dont on a juste besoin de s’assurer qu’ils sont encore vivants. Et cet exercice dégradant a une périodicité trimestrielle. Une lourde croix à porter dans ces conditions, chaque fois et toutes les fois, pour justifier et pour mériter une pension de retraite : une maigre prime qui cache, souvent, une grande misère.
Est-ce dans le Bénin du « Nouveau départ » qu’on se permet ainsi de traiter des personnes du troisième âge ? On a semblé oublier, du coup, que ceux et celles qui sont ainsi traités ont été des serviteurs de l’Etat parfois à des niveaux très élevés. Comme si la retraite les avait soudain délestés du respect auquel ils ont droit. Pourquoi fait-on semblant d’ignorer que ceux et celles qui sont ainsi malmenés et maltraités ont consacré le plus clair de leur vie à l’Etat, au service du pays ?
A l’ère du « Nouveau départ », aucune réforme de notre système de retraite n’est encore annoncée. Il va falloir bien y penser un jour ou l’autre. Et le plus tôt sera le mieux. On ne peut pas avoir servi l’Etat, le pays, plusieurs décennies durant, pour se voir jeter, au bout du compte, à la poubelle comme un objet inutile. Et plus globalement, on ne peut être une personne du troisième âge et se voir confronter à un déficit total de politiques de prise en charge de citoyens de cette catégorie d’âge. Des expériences concluantes, dans maints pays à travers le monde, devraient nous inspirer.
Il faut accompagner le futur retraité vers une fin de mission paisible en mettant à sa disposition toutes les informations nécessaires à la constitution de son dossier de pension de retraite. Il faut assister le futur retraité pour qu’il passe le témoin de la manière la plus correcte qui soit. Il est entendu que ceux qui prennent le relais doivent avoir beaucoup à capitaliser en termes de savoir, de savoir faire, d’expériences professionnelles. Il faut aider le retraité à rentrer immédiatement dans ses droits, nous épargnant le triste spectacle de ceux de nos compatriotes qui, à force d’attendre, meurent avant de toucher leur toute première pension de retraite. Il faut organiser l’accueil du retraité sur des sites appropriés de payement des pensions de retraite grâce à un service diligent et de qualité. Il faut, d’une manière générale, qu’on soit retraité ou non, se compter au nombre des bénéficiaires d’une politique de prise en charge des personnes du troisième âge.
Partout dans le monde se généralisent des mutuelles, des régimes assurance maladie universelle en faveur des personnes du troisième âge. Les Canadiens ont expérimenté avec succès des loisirs adaptés aux personnes du troisième âge. Ce qui éloigne de ces personnes solitude et oisiveté, des maux qui leur sont dommageables à tous égards. Les Sénégalais ont en chantier une « Université du troisième âge », montrant et démontrant que le savoir n’a pas d’âge. Comme quoi, il n’est pas à jeter un retraité, mais à être bien traité
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