Où nous conduit le régime « néo-émergent » ? Quand on fait un sondage dans la population au Bénin, le malaise social est à son paroxysme ; quand on fait un tour des villes de Cotonou et de Porto-Novo, aucun chantier phare et obvie n’accroche le regard ; quand on va à l’intérieur du pays, la misère alarmante du peuple captive l’attention ; et même quand on ne fait pas ce tour et qu’on reste derrière son poste téléviseur à la maison, on ne voit pas beaucoup de choses bouger dans le pays.
Se focaliser sur certaines réformes et quelques réductions des charges de l’Etat sans impacter le concret du quotidien du Béninois est un leurre. Mieux, c’est essayer d’abuser du peuple. Et de fait, en général, la politique béninoise est en faillite morale. L’idéal politique qu’est le service du peuple, est bafoué avec désinvolture au profil de l’intérêt personnel ravageur.
Les nouvelles colorations politiques au niveau du parlement viennent corroborer ce déclin politique au lieu d’aider à bien tenir le gouvernail. Car les partis politiques sont appelés à interpréter les aspirations de la société civile en les orientant vers le Bien Commun. Ils doivent être capables de synthèse politique et de programmation.
La planification politique béninoise est par contre un processus de division, de déstabilisation et de spoliation. Une intelligentsia politique au service du mal, de la cassure et de la forfaiture, est inexorablement hostile au bien et au bien-être du peuple. De promesses en promesses, de temporalité en temporalité, les situations exécrables que vivent les populations sont relativisées par les dirigeants politiques.
Par exemple, il ne s’agit pas d’abord d’emprunter, comme nous les populations, la voie principale très dégradée traversant une partie du département de l’Ouémé, avant de mesurer la gravité de sa dégradation. Il s’agit davantage pour les dirigeants de cultiver des vertus de jugement, d’engagement, de prévision et d’assiduité. L’application de ces différentes vertus par l’homme politique éloigne de la rapacité et de la rugosité.
La vision se concrétise sans perdre de temps et sans se précipiter non plus. Le programme d’action d’un gouvernement s’accompagne d’échelle de valeur, de plan d’exécution et de promotion des ressources humaines internes. Les caprices des « mains-d’œuvre chères », décrédibilisent la réduction des charges de l’Etat tant prônée, et relancent de nouveaux débats sur les finances publiques.
A l’heure actuelle, le peuple a simplement besoin d’actions tangibles. Les inerties et les inepties ne se cachent pas longtemps derrière des réformes institutionnelles et politiques mal engagées et maladroitement ficelées. Il n’est pas encore tard pour la conversion du régime « néo-émergent », avant que les masques ne tombent !
Engluée par les richissimes faiseurs de roi, la cohérence politique a laissé place à l’hypocrisie et la myopie systématique. En effet, l’activisme politique au Bénin rime beaucoup plus avec le carriérisme social et matériel. La majorité des hommes politiques béninois s’accrochent sans scrupules et se repositionnent très vite pour continuer à bénéficier des avantages habituels, sinon plus qu’auparavant.
La rupture ne concerne point cette petite tranche de la population béninoise qui se singularise et abuse de la population entière. Le règne de l’argent surpuissant écrase le peuple souverain qui n’a pas les armes morales, spirituelles et intellectuelles nécessaires pour tenir avec fermeté et dignité. La misère ambiante, l’analphabétisme, la faiblesse cognitive, la paresse, l’argent facile et les exclusions de tout genre, participent de la résignation et de la marginalisation du peuple.
Un peuple jouisseur et imprévisible, mais pourtant constamment abusé. Les hommes politiques sont donc à l’image du peuple qu’ils gouvernent et de notre pays, le Bénin. Sous ce prisme, le maniement du concept « Bénin » ne devrait être uniquement la prise en compte des ressources naturelles des différents terroirs et de leurs cultures, mais d’abord et surtout un regard nouveau et salvateur posé sur le Béninois d’une part, et d’autre part un regard de vision patriotique posé sur les institutions du pays, dans le but de les consolider par le relèvement du dedans.
Ensuite, il faudrait valoriser les compétences de la fonction publique béninoise, et procéder aux recrutements planifiés des jeunes formés dans les structures publiques et privées d’enseignement supérieur. Enfin, nous devons abandonner toutes les pratiques qui consistent à politiser intentionnellement le développement, les actions publiques et la valorisation des ressources humaines. A la vérité, la polarisation, la prétention, la précipitation, la perversité et la témérité, n’ont pas leur place dans la gestion efficiente de la cité pour le progrès épanouissant de tous et de chacun.
Que chacun y participe par le don de lui-même, dans la veille citoyenne et le travail au quotidien!
Abbé A. Éric AGUENOUNON (Contribution)
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