Le procès d’intention fait par certains observateurs de la vie politique au chef de l’Etat Patrice Talon, d’être arrivé au pouvoir pour relancer ses affaires et agrandir son empire financier, semble se vérifier peu à peu. C’est du moins ce qui transparaît de l’orientation du secteur agricole du gouvernement, qui a fait du coton la seule culture, sujette de toutes les attentions. La vision du gouvernement sur le développement du secteur agricole repose sur la diversification des cultures, à travers la création sur l’ensemble du territoire national, de sept pôles agricoles.
Il s’agit de promouvoir aussi bien des cultures de rente comme : le palmier à huile, la noix d’anacarde, le coton et l’ananas, que des cultures de subsistance comme le riz, le maïs, l’igname et le manioc, mais aussi les produits maraichers. Le développement agricole se présente comme un impératif catégorique au Bénin, qui connaît une faible production de vivres. Certains produits comme la tomate, la pomme de terre et la banane, proviennent du Burkina-Faso et au Togo. Il y a donc nécessité de relancer l’agriculture, et cela est possible, puisque le pays regorge de terres fertiles à l’instar de la valléede l’Ouémé.
La population béninoise est aussi essentiellement jeune. Mais le gouvernement a sa propre conception de ce qu’il appelle la relance du secteur agricole. Elle se résume au développement de la seule filière du coton. Le gouvernement a exprimé cette cristallisation sur la filière coton dès les premiers jours d’exercice du pouvoir.
La réduction du secteur agricole à la filière du coton
Parmi les résolutions du tout premier conseil des ministres en avril 2016, figurait la décision du gouvernement de débloquer environ 100 milliards de Fcfa pour, arguait-on, solder la dette des trois dernières campagnes cotonnières aux producteurs  sous le régime Yayi. Certains analystes avaient écrit à l’époque que : «Talon se paie ses dettes», mais ces observations n’avaient pas eu d’écho favorable auprès de l’opinion, puisque l’actualité était plus marquée par la décision de suppression des concours dits frauduleux, suivie de la rencontre de conciliation entre Talon et Yayi à Abidjan. Plus d’un an après, le gouvernement n’a pas changé d’orientation, et le coton continue de bénéficier de toutes les attentions. On observe une communication excessive sur les réalisations du gouvernement dans la filière coton.
Toutes les phases de campagne cotonnière 2016-2017 sont médiatisées, avec en prime le trophée de guerre qui parle d’un taux de production record estimé à plus de 450 mille tonnes. Le matraquage médiatique rapporte aussi la restructuration de l’Association interprofessionnelle du coton AIC, la signature d’un accord entre le gouvernement et l’AIC, par lequel l’Etat cesse de subventionner les producteurs.  A grand renfort de publicité dans les journaux proches du pouvoir, on apprend que la campagne s’est terminée sans fausses notes, et que toutes les parties prenantes : producteurs, transporteurs, égreneurs, contrôleurs de qualité, assureurs et banques, ont obtenu satisfaction. Le montant de 13 milliards a été avancé par une certaine presse, comme ayant été distribué aux différents intervenants de la filière.
L’abandon des autres filières
Mais pendant que le coton dit-on, a connu une campagne réussie, on n’entend rien sur les autres cultures, en l’occurrence des cultures de subsistance, pour satisfaire la consommation intérieure. Les autres cultures de rente ne reçoivent aucun appui du gouvernement, même pas le 10e des moyens consacrés à la filière coton. Mais cette attention du gouvernement pour le coton, au détriment des autres cultures, prête flanc aux interrogations. Comme celles de savoir si cet engouement du gouvernement pour cette filière, ne donne pas raison à ceux qui estiment que Patrice Talon est en train de relancer naturellement son activité de prédilection ? Comment ne pas imaginer, au regard de cette autosatisfaction affichée, que les ressources prétendument engrangées au cours de cette campagne, n’ont pas plus profité aux entreprises des amis et/ou héritiers du président, qu’aux pauvres cotonculteurs de Banikoara ? Et dernière question qui vaut son pesant d’or : quelle est la part de revenus que l’Etat du Bénin a engrangée dans ses caisses, au terme de cette campagne célébrée à cor et à cris, comme la meilleure de tous les temps, après les distributions vantées ? N’est-ce pas désormais une évidence que la recherche et la sauvegarde des intérêts du gouvernement priment sur l’intérêt général ? Ces interrogations nous préoccupent tous et méritent une réflexion profonde de la part de tous
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