Bientôt onze mois que dure ce qu’on appelle aujourd’hui la crise anglophone au Cameroun. Ce qui avait commencé comme de simples revendications corporatistes des citoyens d’expression anglaise, est devenu par défaut de dialogue, une véritable tension sociale, avec comme conséquence déplorable l’escalade de la violence. C’était le cas le 1er octobre dernier, jour de la commémoration douloureuse de la réunification par la partie anglophone du pays. Votre journal vous retrace ici l’origine, le développement et l’actualité de cette crise.
Sept morts et des dizaines de blessés, c’est le bilan officiel avancé par le gouvernement Camerounais après la journée de haute tension du 1er octobre 2017. Les activistes entendaient proclamer l’indépendance des deux régions en cette date symbolique du 1er octobre. Le gouvernement a par conséquent déployé dans les deux régions un important dispositif de sécurité : la police et l’armée. La tension était à son comble ce 1er octobre 2017 dans toutes villes des deux régions anglophones qui étaient fortement militarisées. Des colonnes de militaires de gendarmes et de policiers étaient visibles sur la voie en plus des éléments du Bataillon d’intervention rapide, BIR, corps d’élite de l’armée réputé pour la lutte contre le terrorisme. Mais ces impressionnants dispositifs de l’armée n’ont pas pour autant dissuader les manifestants qui ont tenu à marcher et à tenter d’hisser le drapeau de leur Etat virtuel : l’« Ambazonia ».
Des échauffourées entre manifestants et forces de l’ordre ont été enregistrées. La police a recouru au gaz lacrymogène pour disperser les manifestants comme à Buéa, à Limbé etc. Dans d’autres localités comme Bamenda et Kumba, l’armée a tiré à balles réelles pour empêcher les manifestants de proclamer l’indépendance. Mais depuis le 2 octobre, on parle d’un calme relatif.
Les origines de la crise
C’est courant novembre 2016 que des avocats de la partie anglophone s’étaient retrouvés à Limbé pour exprimer leurs récriminations sur le nouveau code de procédure pénale. Ils trouvent que ce nouveau code a été rédigé sous inspiration du droit français, alors que le droit inspiré de la Common Law qui doit être appliqué dans la partie anglophone. Peu après, ce sont les enseignants de cette même partie anglophone qui ont organisé des marches pour protester contre leurs conditions de travail. Au lieu de prêter oreilles à leurs revendications, c’est plutôt la police qui est allée les disperser. Procédant à des arrestations et violentant dangereusement certains.
Cette répression violente des mouvements d’humeur des avocats et des enseignants, a suscité l’indignation et la colère des populations anglophones. Des marches de protestations ont été organisées dans les deux régions, suivies d’un mot d’ordre d’arrêt des cours. De ce mois de novembre 2016 à avril 2017, les cours ont été arrêtés dans ces deux régions malgré les démarches du gouvernement. Les élèves ont frôlé une année blanche. Entre temps, le gouvernement a procédé à l’arrestation de centaines d’activistes, considérés comme meneurs des contestations. D’abord placés comme prévenus dans des prisons, puis traduit devant le tribunal militaire. Leur libération a été présentée par les activistes comme la condition sine qua non de toute négociation.
Le dialogue comme voie de sortie
Le président Biya fait un pas et signe un décret d’abandon des poursuites des mis en cause devant le tribunal militaire. Malheureusement, tous les activistes ne seront pas libérés. D’où le regain de tension qui a abouti à l’idée de sécession de la part des activistes. Leur détermination à créer leur Etat indépendant semble non négociable. Pendant que le gouvernement annonce l’indivisibilité du pays. Cette situation aurait pu être évitée si le gouvernement avait su calmer les premiers soulèvements en acceptant de recevoir les avocats et les enseignants.
L’option de la violence du gouvernement a été contreproductive et malencontreuse. Mais il n’est donc pas tard pour que le pouvoir se rattrape, en mettant sur pied un véritable dialogue pour proposer des voies de sorties de crises aux manifestants. Le gouvernement n’a pas intérêt à conserver l’option des réactions militaires qui enveniment la crise et radicalisent les positions du camp d’en face. Il ne faudrait non plus écouter les apôtres du chaos qui continuent de suggérer la répression violente des manifestants comme solution idoine à la crise. Recourir au dialogue ne signifiera pas que le gouvernement a perdu son autorité. C’est dans ce sens que Mahamat Gandhi attirait l’attention sur le fait que : « la violence génère toujours la violence »
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