Leçons d’Asie

Les Dragons d’Asie. L’expression est bien connue. Elle a fait florès avec la montée en puissance, en un temps record, de certains pays d’Asie du sud-est. Fulgurante croissance qui n’a pu que créditer ces pays d’un développement de l’ordre d’un véritable miracle. N’y a vu que du feu l’Occident rassasié et repu. Il tenait alors les peuples de ces contrées dans un mépris souverain. Ces masses humaines pauvres et misérables étaient vues comme une menace. On parlait alors de « péril jaune ».

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L’exemple des Dragons d’Asie ne peut laisser indifférent l’Afrique. C’est sur notre continent qu’on continue de dénombrer des pays sous-développés ou en développement, des pays les plus endettés ou des pays les plus pauvres de la terre. Ce constat ne doit laisser aucun Béninois de marbre. Pourquoi ? En 1960, l’année référence des indépendances africaines, la Corée du Sud, par exemple, était sur la même ligne de départ que le Bénin. Aujourd’hui, soixante ans plus tard, il est difficile de risquer une quelconque comparaison entre les deux pays.

Qu’est-ce qui explique, en Corée, cette envolée formidable vers les cimes ? Pourquoi, au Bénin, ce tassement dans notre berceau, comme si on refusait le développement, pour parler comme Axelle Cabou ?  Un début de réponse à ces questions à partir de quelques indices.

– Les Dragons d’Asie ont connu, comme nous, la loi d’airain de la domination étrangère, de l’exploitation coloniale. Mais ils s’en étaient débarrassés sans traumatisme déstructurant, accédant à la fierté et à la dignité de peuples libres. Ce qui leur a permis de s’ouvrir les chemins de tous les possibles. L’espace premier de conquête pour ces peuples d’Asie, c’est moins l’espace géographique de leur pays que l’espace infini de leur esprit. Chez nous, les sphères du pouvoir sont infestés de ce que Franz Fanon tenait pour les « Peau noire, masques blancs ». Il faut parler le français de France et tenir à portée de main la cantine de ses diplômes. Après qu’on eut transféré dans des paradis extérieurs ses raisons de vivre et d’espérer.

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– Les Dragons d’Asie n’ont jamais abandonné leur langue, ayant délibérément décidé de pousser sur leurs propres racines. La référence constante à leurs cultures a boosté la machine du développement. Elle a réveillé le génie qui sommeille en eux. Elle a libéré tout le potentiel de force et de puissance concentré en leur esprit. Le développement est le fruit intégral d’un esprit libre, en ce qu’il se pense et se dirige vers des objectifs précis librement admis comme tels. Un esprit qui n’a pas cette flexibilité de choix n’est pas libre. C’est la raison pour laquelle, c’est une immense illusion de croire qu’on peut penser avec la tête d’autrui ou qu’on peut se développer par procuration. On s’enveloppe plutôt de mauvaise graisse, l’autre nom de la surcharge pondérale. Ce qui interdit toute envolée vers les hauteurs de l’excellence. On ne peut voir ni grand ni loin. On réalise peu. On reste petit.

– Les Dragons d’Asie ont fait du travail leur crédo. Non le non travail dans le travail, simple présence sur un lieu de travail, sur un chantier, mais sans rendement probant. Non le travail des ouvriers de la onzième heure, de ceux que nous appelons ici, chez nous, « Il s’est levé », champions toutes catégories en retard et en absentéisme.   Non le travail qui ne s’inscrit ni ne s’insère dans une dynamique de service rendu, dans la recherche constante de la qualité et de l’efficacité. Non le travail constamment semé et troublé de grèves au détriment d’une saine production. Ces peuples, plutôt que de copier des formes de grève venues d’ailleurs en ont intelligemment inventé d’autres. Qui ambitionne de gagner plus se doit de protéger au premier chef la chaîne de production. On ne gagne rien à tuer la poule aux œufs d’or.

– Les Dragons d’Asie, avec désormais de réels atouts en main, entrent dans la mondialisation la tête haute, non en victimes résignées auxquelles les autres dictent leur volonté, mais en partenaires, en conquérants. Ils exigent leurs justes parts de marché. Ils s’imposent comme des interlocuteurs respectés et incontournables. Pendant que d’autres, à la traîne, rasent les murs et adoptent un profil bas. Que reste-t-il à dire ? Edifiant, l’exemple des Dragons d’Asie. Il s’inscrit dans le droit fil de ce proverbe anglais que nous devons méditer : « Rien ne vient sans peine, sauf la pauvreté »

2 réponses

  1. Avatar de GbetoMagnon
    GbetoMagnon

    « …la Corée du Sud…était sur la même ligne de départ que le Bénin. Aujourd’hui…Qu’est-ce qui explique, en Corée, cette envolée formidable vers les cimes ? »
    La stratégie d’opposition au péril communiste (la guerre de Corée: armes russes, marée humaine Chinoise). Un rempart de milliers de milliards de $ US ont été déversés sur la péninsule coréenne pour créer une accumulation de biens telle, que chaque sud coréen, ne craigne – à raison – que le communisme ne l’en prive.

    Comme en Europe (Plan Marshall), comme au Japon en 45.
    Comme au Rwanda pour s’assurer le point haut de contrôle, couloir entre l’Afrique de l’Est et Centrale.
    Comme au Vietnam aujourd’hui pour contrer l’hégémonie de la Chine, après leur avoir fait la guerre dans le même objectif.

    1. Avatar de GbetoMagnon
      GbetoMagnon

      « Un rempart de milliers de milliards de $ US QUI ont été déversés »

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