Nous avions évoqué autrefois les 7 péchés capitaux du régime de la rupture. Ceux qui ne nous ont pas compris pensaient que nous en voulions à ce régime. Pourtant, notre objectif reste de déceler et répertorier lestares et les faiblesses du gouvernement de la rupture susceptibles, de le conduire à la déroute. C’est ce même exercice que nous poursuivons en relevant ci-dessous ce qui apparait comme deux autres fléaux de cette gouvernance. Il s’agit de la manie de ce pouvoir à être réfractaire à l’écoute des partenaires sociaux et des populations, avec l’obsession de ne faire que ce qui lui importe, quel que soit l’avis de l’opinion.
L’une desdites tares est cette prédisposition du pouvoir à se fermer à l’écoute. C’est la rencontre du chef de l’Etat avec les secrétaires généraux des centrales syndicales qui a permis de la mettre en évidence. Sur plus de 5 heures d’échanges, le temps de parole cumulé des hôtes du chef de l’Etat, n’excède pas 60 mn. C’est dire que Talon seul s’est exprimé pendant au moins 3 heures et demi. Les trente autres minutes revenant aux membres du gouvernement présents.
Cette confiscation de la parole par le chef de l’Etat exprimait son désir non pas d’écouter ses interlocuteurs, mais de leur imposer sa vision et de leur prouver par tous les moyens qu’ils se trompent, et ce sur tous les points. On a observé un chef de l’Etat qui interrompait ses convives et qui oubliait de leur redonner la parole. En même temps, même lorsqu’il versait dans de longs développements, il n’admettait pas d’être interrompu voire relancé.
Sa posture, son intonation et sa gestuelle, n’étaient pas celles de celui qui échangeait, mais de celui qui professait et qui voulait être écouté religieusement. Cette attitude du chef de l’Etat a été contre productive puisque le silence apparent des secrétaires généraux dans la salle, n’a pas été signe d’approbation de ses démonstrations et envolées oratoires. On a même vu le président de la République lancer des défis à ses invités. Puis, lorsqu’un d’entre eux était preneur, c’est une kyrielle d’arguments qui était servie pour le confondre sans lui laisser le temps de répliquer. Ce fut le cas de la discussion sur le retrait du droit de grève. C’est comme si le chef de l’Etat à côté de la force des arguments, voulait aussi associer l’énergie physique pour faire admettre à ses invités que le droit de grève peut être retiré à travers une étude comparée des articles de la constitution.
L’objectif poursuivi par cette fermeture à l’écoute de ses interlocuteurs, est d’annihiler leur opposition à sa vision pour s’offrir un boulevard sur lequel il pourrait à volonté réaliser ses aspirations. D’ailleurs, il a fini par extérioriser sa pensée en faisant remarquer aux secrétaires généraux des centrales syndicales que lorsque quelqu’un prend le pouvoir, on le laisse faire ce qu’il a à faire, jusqu’à ce qu’on lui arrache ce pouvoir par la voie des urnes. Par ces propos, le chef de l’Etat a exprimé son aversion pour la contradiction ou pour toute position contraire à sa philosophie de gouvernance.
Une posture bien curieuse qui rappelle les années lumières de la gouvernance obscurantiste. Cette obstination à se fermer aux discours extérieurs pour s’enfermer dans sa vision endogène, constitue à coup sûr un grand handicap au régime de la rupture qui à l’épreuve du gouvernement participatif et de l’obligation de comptes trouvera de écueils. Pour preuve, les secrétaires généraux insatisfaits de l’issue de cette rencontre n’ont pas hésité pour la plupart à reconduire le mot d’ordre de grève, comme pour dire que la gouvernance moderne rime avec concertation, écoute et concession.
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