J’ai envie de commencer cette chronique par un jeu. Pourriez-vous prendre quelques instants pour jeter un coup d’œil sur l’endroit exact où vous vous trouvez en ce moment, et d’où vous parcourez ces lignes ? Que ce soit au bureau, dans votre maison, dans votre chambre, regardez juste ce qui vous entoure. Vous pouvez compter sur le bout des doigts tout ce qui a été fabriqué au Bénin. Meubles, rideaux, tableaux, pots de fleurs, objets d’art, électro ménager…
La première fois que j’ai fait cet exercice il y a quelques années, c’était en regardant dans la salle de bain où il n’y avait que le savon Palmida et le beurre de karité, comme produits locaux. Même le papier toilette venait d’ailleurs. J’étais tellement attristée par ce constat, que depuis lors j’essaye de chercher et de consommer d’abord made in bénin.
Mais, pratiquement tout ce que nous consommons vient d’ailleurs. Jeudi dernier, j’étais catastrophée à la vue d’un panneau de publicité dans les rues de Cotonou, magnifiant de petits légumes « made in France ». Il est vrai que l’agriculture en Europe est subventionnée et permet de déverser en Afrique des produits souvent moins chers que ceux produits ici. Mais il serait temps que nous prenions la mesure des choses, et que nous nous mobilisons pour promouvoir et faire développer nos propres produits.
L’un des produits alimentaires les plus utilisés chez nous au Bénin par exemple, c’est la tomate. Pourtant, nombreux sont les ménages qui utilisent ces soit disant « tomates en boites », déversées sur nos marchés sans scrupule. Et malgré le débat autour de leur qualité, nos populations continuent de s’intoxiquer au quotidien.
L’aberration, c’est que nous avons au Bénin des tonnes de tomate qui pourrissent soit dans nos villages, soit sur nos axes routiers, faute d’unités de transformation. Avec nos nombreuses terres fertiles, nos populations au chômage, ne serait-ce pas le moment de développer cette filière de production de purée de tomate locale de bonne qualité, pour nous mêmes et ensuite pour l’export ? Ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres.
Il faut reconnaître que nous consommateurs aussi, ne savons pas faire la promotion et encourager ceux qui s’investissent dans les productions locales. La semaine dernière, avec une vingtaine d’amies expatriées au Bénin, nous avons visité le Centre International Basile Kossou (CIBAKO), situé à Calavi. Même si c’était la deuxième fois pour moi, j’ai été émue par la visite guidée de la Promotrice du centre, qui a enrichi notre intellect sur le métier du pagne tissé au Bénin. Dans le passé, le tissage du pagne était l’œuvre d’habiles tisserands et dans les cours royales de l’époque, le Roi disposait de tisserands très créatifs qui proposaient des modèles de tissage de grande recherche. La conception d’un pagne tissé à l’époque était facilement apparentée à un spectacle, tant le travail de détail et de génie était remarquable. Aujourd’hui, hélas, ce métier de pagne tissé se perd petit à petit pour plusieurs raisons.
L’une des raisons fondamentales, c’est le manque d’intérêt des Béninois eux mêmes à ce pagne tissé, et de façon générale aux produits fabriqués chez nous au Bénin. Combien de Béninois portent aujourd’hui le pagne tissé ou l’utilisent dans leur intérieur ? Et pourtant, ce produit local est d’une beauté inouïe, car le pagne tissé est le textile africain par excellence de par son élégance et sa finesse. Je voudrais ici faire la différence entre le tissu Java, Wax ou autres, qui sont fabriqués en Europe ou en Asie, et qui font travailler des populations d’ailleurs et leurs économies.
Le Kente, pagne tissé du Ghana ou le Danso Fani du Burkina, ont réussi à s’insérer dans le quotidien des populations de ces pays, parce qu’à un moment donné il y a eu une volonté politique et nationale de faire développer ces secteurs. Chaque citoyen qui s’en procure, fait honneur à son peuple et valorise le patrimoine culturel. Chaque achat est aussi une volonté individuelle et collective de faire travailler des milliers de personnes dans cette filière.
Notre pays le Bénin, est très riche culturellement et de part ses ressources agricoles. Il est donc temps que chacun s’efforce à valoriser tout ceci au quotidien. Il est temps que nous consommions avec fierté le « Made In Bénin ». Personne ne le fera à notre place, surtout pas les étrangers. Soyons de ceux qui encouragent nos artisans en achetant leurs œuvres, en les motivant à s’améliorer. Décidons de relever aujourd’hui ce défi majeur, qu’est la préservation et la valorisation de notre artisanat, notre agriculture et les produits fabriqués au Bénin. Il y va de notre développement, de notre fierté nationale
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