Bénin : Le modèle économique comme frein à la liberté de presse

Le dernier classement de Reporters sans frontière (Rsf), qui a placé le Bénin à la regrettable place de 84e, relance le débat sur la qualité de la liberté de presse dans notre pays. Si plusieurs causes peuvent expliquer cette dégringolade, la plus importante semble bien être la trop grande vulnérabilité financière des entreprises de presse béninoises.

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« Il n’y a pas de démocratie sans liberté d’opinion ». Cette citation de Montesquieu, montre à bien des égards l’importance de la liberté de presse pour la démocratie. Depuis la conférence nationale des forces vives de la nation de février 1990, le Bénin fait son bonhomme de chemin dans le concert des nations démocratiques.

Pendant l’ère Kérékou, le Bénin passait pour le meilleur élève du continent en matière de liberté de presse. Mais depuis l’avènement de Boni Yayi au pouvoir, le pays a commencé à dégringoler dans le classement de la liberté de presse. Le dernier classement le met à la 84e place mondiale.

Un rang peu honorable pour un pays qui se vante d’être un modèle de démocratie sur le continent. Ceci dit, un tel recul ne peut laisser personne indifférent, surtout que le contenu du rapport semble dénoncer des atteintes fragrantes à la liberté de presse.

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On parle de médias bâillonnés, de la difficulté des opposants à accéder à certains médias de service public, etc. Tous ces problèmes auraient pu trouver solution si les médias étaient plus indépendants sur le plan économique. Ceci devrait passer par des réformes profondes qui doivent affecter la superstructure des médias béninois.

Plaidoyer pour un modèle économique différent

Le souci d’une plus grande liberté de presse au Bénin, devrait passer par l’indépendance réelle des médias béninois. Que faire ? Lorsqu’on analyse en profondeur les obstacles au professionnalisme et à la vraie liberté de presse, on devrait diagnostiquer en premier la vulnérabilité économique des médias. Celle-ci se manifeste par la modicité des ressources propres des organes de presse, et des bilans comptables toujours déficitaires.

Les recettes dans la plupart des organes sont souvent en dessous des dépenses. Ces recettes comprennent les ventes, les publicités et les financements au noir, composés des aides et soutiens des lobbys politiques et financiers, et des frais issus des « communications » désignées comme tout article commandé et rémunéré grassement. Au Bénin, la vente des journaux et la publicité ne rapportent pas grand-chose aux promoteurs de journaux.

Certains n’hésitent même plus à réduire le nombre de parution. C’est uniquement les « financements noirs » qui sauvent parfois ceux qui résistent encore, ou tentent de paraître vaille que vaille. Ces financements noirs sont captés par les plus malins qui ont des accointances dans les milieux politiques et d’affaires. Il en est de même pour ceux qui sont capables de vendre leur âme, d’écrire quelque chose et de se dédire l’instant d’après.

Un tel environnement n’est pas propice à une indépendance réelle des médias, car ces promoteurs pour mériter la confiance de leurs bailleurs, sont obligés de protéger ceux-ci et se mettent de facto dans une relation de compromission qui les empêche de faire un travail professionnel. Le premier travail à faire est de réinventer une nouvelle économie des médias. Celle-ci sera basée sur un marché de publicité assez florissant, plus organisé et plus équitable.

Une régie devrait s’en occuper afin d’octroyer selon la taille et les spécificités de l’audimat de chaque média, des contrats de publicité assez intéressants. L’Etat veillera à privilégier les médias privés. Il faut ensuite travailler à avoir de véritables entreprises.

Pour y parvenir, il faut faire entrer des hommes qui ont des moyens dans l’actionnariat de ces entreprises, afin qu’elles puissent s’autodéterminer. A ce niveau, il faut veiller à ce que ces actionnaires restent purement dans le rôle d’administrateur, et leur éviter d’interférer sur les prérogatives professionnelles des journalistes à la rédaction.

En conclusion, il faut travailler à rendre les organes de presse moins dépendants des contrats politiques obscurs, qui les aliènent et les contraignent à fermer les yeux sur les sujets intéressants, et faire les seuls louanges du gouvernement qui contracte avec eux

3 réponses

  1. Avatar de Saibos
    Saibos

    Intéressant

  2. Avatar de Ulrich
    Ulrich

    Quand on invite les opposants et consorts à la télévision nationale, ils ne viennent pas, mais ont la largesse de dire qu’ils sont embêtés par le.gouv

    1. Avatar de Saibos
      Saibos

      Bien sûr, ils préfèrent la victimization qui marche très bien au Bénin que de jouer leur rôle. Encore faut-il savoir à quoi ils s’opposent. Généralement, c’est parce qu’ils ne sont pas au pouvoir qu’ils sont opposants. Le seul parti véritable au Bénin est le PCB

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