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Bénin: quelle presse avec une Haac sans moyens

A l’installation de la 6ème mandature de la Haac au Bénin, hier, le président de la République a exprimé  ce qu’il attend des nouveaux conseillers. Mais que feront ces derniers face au manque de moyens pour leur mission de régulation des médias et de protection des libertés publiques ? Et que feront à leur tour les médias handicapés par l’absence de financements conséquents et réduits à la mendicité par des contrats occultes de sujétion ?Une nouvelle mandature est en place depuis hier, lundi 22 juillet 2019, à la Haute autorité de l’audiovisuel et de la communication (Haac) en République du Bénin. Le chef de l’Etat attend d’elle des initiatives « pour engager les uns et les autres dans les voies qui permettront de sortir le métier –journalisme, ndlr- de l’amateurisme et de la vénalité». Le président Talon attend d’elle, l’accomplissement de sa mission de préservation et de protection mais aussi de régulation de la liberté de presse.

Cela dépendra aussi bien de ces conseillers, des professionnels de la presse mais aussi de l’Etat qui devra y mettre aussi les moyens au risque de voir cette 6ème mandature passer à côté notamment de la protection comme celle qui l’a précédée. On a vu une 5ème mandature conduite par Adam Boni Tessi prompt à fermer des organes dans  le mépris total des textes qui régissent la profession mais jamais apte  à protéger et défendre les intérêts de ses organes.

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Ce n’est pas toujours par manque de volonté pour assurer cette protection, à en croire le président sortant quand il évoque le cas par exemple de Soleil Fm. La fréquence de cette station est brouillée depuis des mois. Balayant du revers de la main des soupçons d’une main politique, Adam Boni Tessi évoque une incapacité matérielle de la Haac à régler le problème.

Dans une interview accordée à Frisson radio, il fait croire que la Haac n’a pas pu rechercher et retrouver les sources du problème par manque de moyens. Dans le cas d’espèce, à l’en croire, l’institution dispose d’un camion acquis à plus de 800 millions F Cfa mais dont l’antenne serait cassée. Et pour remplacer cette dernière, l’institution devrait débourser  la modique somme de … 30 millions.

A en croire le Président sortant de la Haac, les sollicitations de l’institution vers le ministère des Finances à ce sujet auraient été vaines. « Il faut avoir les équipements requis ; si nous ne disposons pas de cet équipement on va faire quoi ? » se demande Adam Boni Tessi dont la mandature s’est achevée sans résolution de ce problème comme d’autres.

Il est à rappeler que bien avant, la Haac s’est empressée de couper la fréquence de cette même radio au motif qu’elle émettait d’un siège qui n’est pas celui mentionné dans la convention. Mais lorsque le client ne bénéficie pas de l’entièreté de cette fréquence, l’institution se trouve incapable d’aller à son secours  pour mettre fin aux désagréments infligés à ses auditeurs. C’est un paradoxe qui n’est pas sans conséquence sur l’économie de ce média.

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Vous avez dit « amateurisme et vénalité » ?

Dans le même temps, c’est le pouvoir qui par des contrats occultes avec certains médias n’accepte pas que ces derniers laissent entendre d’autres sons de cloche. Ceux qui au début ont tenté de rechercher un équilibre de l’information tout en étant sous ce contrat ont été très tôt recadrés. « Le cadrage » est devenu le mot clé. La conséquence, ce sont les titres siamois qu’on retrouve dans les kiosques et les revus de presse tous les matins.

Bon nombre des acteurs des médias en souffrent dans une passivité totale au risque de se créer des ennuis au regard du sort fait à ceux qui ont fait l’option de s’opposer à l’embrigadement. Comment de grands médias peuvent-t-ils naître ou subsister dans ces conditions de déstructuration du modèle économique de la presse ?

L’amateurisme et la vénalité qu’on pourrait dénoncer dans la presse béninoise sont donc entretenus par le pouvoir en place pour ne pas dire qu’il les a même renforcés et à son seul profit au détriment de la qualité. La Haac seule n’aura pas le pouvoir de résoudre cette question.

C’est avant tout une question politique. Il faut d’abord une volonté politique du gouvernement Talon qui devra décider déjà de laisser vraiment la presse béninoise libre mais aussi d’œuvrer pour un financement public conséquent de cette presse pour la renforcer dans son rôle de pilier de la démocratie.

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