Le politologue béninois Mathias Hounkpè est l’invité Afrique de RFI ce mercredi 8 avril 2020. Il a indiqué que la pandémie a des conséquences politiques qu’il faut veiller à circonscrire. L’Administrateur du Programme de gouvernance politique et de consolidation démocratique de OSIWA Mathias Hounkpè a précisé que la première conséquence politique pour lui, «c’est déjà la restriction des libertés, des mouvements sociaux et des mouvements de contestation ».
Mais, il relève que «partout où on peut utiliser ce genre de restriction pour de bonne raison, on peut également l’utiliser pour gagner répit surtout pour les pays où ces derniers mois, on peut dire que les citoyens ou une partie des citoyens au moins avait des raisons de ne pas être contents et de manifester ». Il donne en exemple pour appuyer ses propos, les cas de la Guinée, du Togo et du Sénégal. Il estime que dans tous ces pays les responsables au pouvoir vont gagner un peu de répit.
Opposition sans voix
Selon Mathias Hounkpè, le vrai problème qui se pose et ce n’est pas seulement en Afrique, «lorsque vous avez le sentiment d’avoir en face de vous un danger qui menace la nation, c’est difficile d’accepter que des désaccords politiques s’expriment trop ». Donc c’est très difficile aujourd’hui pour l’opposition de s’exprimer. Mais, il pense que ceux qui sont dans l’opposition ou par exemple au niveau de la société civile, «devraient aider à ce que les actions restent dans les limites qu’il faut ». Le politologue fait remarquer qu’actuellement surtout dans les pays francophones, qu’il y a une série de lois d’habilitation qui ont été adoptées pour conférer donc au pouvoir exécutif la capacité de prendre des initiatives qui devraient relever du domaine de la loi. Normalement, «il faut le faire avec un peu de mesure pour s’assurer que rien n’est utilisé pour sortir des limites de ce qu’il faut pour lutter contre la pandémie et plutôt utiliser pour des raisons purement politiques ».
Risque d’explosion sociale ?
L’invité Afrique de RFI relève que «nous traversons une époque, et ça ce n’est pas seulement en Afrique, où les citoyens manifestent un déficit de confiance suffisamment élevé à l’endroit des pouvoirs ». Et donc, aujourd’hui, «vous voyez un peu partout avec quel acharnement les pouvoirs tentent de s’assurer et de montrer aux citoyens qu’ils font tout ce qu’ils peuvent ». Parce qu’une fois le cap passé, «les pouvoirs auront à rendre des comptes ». Mais, il ne pense pas qu’il y a un risque d’explosion sociale où vous allez voir les pouvoirs tombés un après les autres en Afrique. Tout de même, je préviens «que tous ceux qui sont au pouvoir feraient une grossière erreur en pensant qu’ils peuvent gérer la crise comme ils veulent et s’en sortir ». Alors, les dirigeants ont intérêt à faire très attention parce que cela peut accentuer la tension politique qui existe déjà dans certains pays.
Des élections en vue
Mathias Hounkpè rappelle, à propos des élections en vue sur le continent, qu’on a vu déjà en Côte-d’Ivoire, «l’opposition dans sa quasi-totalité qui est sortie pour demander l’arrêt du processus d’enregistrement des électeurs ». Pour lui, l’idéal ne devrait pas être que cette question de réaménagement des calendriers électoraux se fasse dans un environnement de bras de fer. L’idéal devrait être que «les acteurs politiques et les organes en charge de la gestion des élections se retrouvent pour voir est-ce que c’est nécessaire de réaménager les calendriers électoraux afin d’éviter qu’à un mois ou quelques semaines des élections, on se retrouve à ajouter une crise politique à la crise sanitaire ».
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