(ENQUETE) Insécurité dans l’Atacora : Quand la pègre défie Natitingou !

La ville de Natitingou, dans le département de l’Atacora, a connu ces dernières semaines,  de graves actes d’insécurité orchestrés par de vils  individus armés. Ils  abattent froidement des gens pour leur arracher des motos et autres biens. Si l’accalmie semble revenir depuis peu avec le déploiement d’un renfort de forces armées sur le terrain et autres mesures prises, la psychose demeure visible au sein de la population; très peu de ces délinquants armés ayant été mis aux arrêts. L’autorité communale  et plusieurs sources locales crient à l’insuffisance  criarde des moyens nécessaires pour y faire face et en appellent vivement à une meilleure sécurisation de la ville par les structures et responsables compétents au plan national.

Un homme d’environ 70 ans, son épouse, la cinquantaine et une petite fille de quatre ans, tous froidement abattus par un individu non identifié à ce jour. Un  « dégénéré » soupçonne l’opinion locale. La macabre scène de ces trois cadavres découverts dans le troisième arrondissement de Natitingou, il y a trois semaines,  a été le déclic d’une psychose qui ne cesse de s’intensifier dans toute la ville. Les trois autres cas de tueries perpétrées sur des conducteurs de taxi-motos dans la même période ont fini par alarmer toute la population.  Ils sollicitent les services de ces conducteurs de « Zém » pour de prétendues courses, les amènent dans les zones périphériques de la ville, les poignardent mortellement ou les tuent à base de balles réelles à l’aide des armes artisanales et emportent leurs motos.

Karim Tassouan, jeune conducteur de taxi- moto à Natitingou y a perdu un de ses amis et en parle le coeur meurtri :  » On s’était vu dans la matinée et il a souhaité vite  rentrer ce jour- là à la  maison parce qu’il ne se sentait pas bien. Quand j’ai appris la nouvelle de son assassinat par la suite, j’ai été très révolté. C’était un homme très calme et très courtois envers les clients » se rappelle-t-il à propos de cet ami qui ne vit plus aujourd’hui, du fait de la méchanceté de ces délinquants tueurs.  » Il y a de cela plus d’un mois que notre commune a vécu un moment très difficile, et nous avons toujours la peur dans l’âme. Un moment inhabituel qui a dévoilé une page sombre de la sécurité des populations. Nous avons eu des pertes en vies humaines et c’est très déplorable » regrette un sage rencontré dans une rue de Natitingou qui a requis l’anonymat. Qui sont- ils, ces malfrats ? Pour ce qu’il en sait, ils ne seraient pas des fils de Natitingou, mais des étrangers qui y résident ou qui y  viennent opérer dans la ville.

A peine 20 agents de police pour sécuriser plus de 100.000 habitants

La commune de Natitingou compte neuf arrondissements dont trois urbains et 6 ruraux. Mais c’est le seul commissariat central de police qui assure la sécurité dans ces trois arrondissements urbains avec juste une vingtaine de policiers chargés de veiller sur la sécurité de plus de 100.000 habitants. Deux autres commissariats d’arrondissement frontaliers s’échinent aussi aux côtés de la structure centrale pour une couverture sécuritaire pénible de tout le territoire de Natitingou. L’Etat central,  face aux récents actes perpétrés,  a dû déployer un renfort conséquent constitué notamment des éléments de la 6ème BIA des forces armées béninoises pour donner un coup de pouce à la police locale.

Pour mieux faire face à la situation, le ministre de l’intérieur et de la sécurité publique, Sacca Lafia n’a pas hésité à décharger l’ancien commissaire central Natitingou de ses fonctions et a nommé un nouveau, assez jeune mais très dynamique, selon plusieurs témoignages. Abalonorou Abdou Raziz est son nom, ex commissaire central de Djougou, une commune proche de Natitingou, fraîchement revenu d’une mission sécuritaire de l’Union Africaine au Tchad contre la secte Boko Haram. Il serait donc assez aguerri pour mieux traquer la pègre locale. Très peu bavard, il rassure de ce que la situation est actuellement « sous contrôle » à Natitingou et en appelle à une franche collaboration entre la police et la population.

 » La hiérarchie  a mis en place une stratégie pour redonner confiance à tout le monde ici. Je n’en dirai pas plus » a-t-il lâché,  contraint aux obligations de réserve inhérentes à  tout responsable en charge de sécurité. Des citoyens de la ville rencontrés dans les rues aussi ne semblent plus tant paniqués aujourd’hui mais se préservent  de ne plus trop s’exposer en circulant à des heures indues la nuit. Étudiant à Université d’Abomey Calavi, Dassagaté Karim, de passage à Natitingou, d’où il est originaire,  le samedi  lundi 07 décembre,  se veut très méfiant.  » Déjà à 19h, tout le monde est à la maison chez moi. Il vaut mieux prévenir que guérir, parce que ces bandits circulent toujours dans la ville » craint-t-il.

Le retour des repris de justice, les doléances et assurances de la mairie

Ils seraient pour la plupart des repris de justice, d’après les informations glanées ça et là sur le terrain. A peine sont-ils  sortis de prison qu’ils ont repris le sale boulot. Les enquêtes se poursuivent pour traquer tout le groupe. Mais l’autorité communale rassure sur le début de l’accalmie dans la ville. Le maire Ouindeyama Taté  nourrit l’espoir que cela puisse être de façon définitive. « Nous ne sommes pas restés les bras croisés depuis que la situation a commencé. Nous avons sollicité des renforts qui nous ont été octroyés de facon diligente par les autorités sécuritaires nationales, ce qui a permis de vite maîtriser la situation » se réjouit-il même s’il se préoccupe de ce que plusieurs de ces malfrats ne soient pas encore arrêtés et seraient toujours dans le maquis.  » Nous avons foi aux  résultats des enquêtes policières en cours » ajoute, confiant, le maire de Natitingou.

Son plus gros souci reste qu’à la date d’aujourd’hui,  sa commune fait l’objet d’une  présence insuffisante d’agents de sécurité. Il souhaite que pour la seule agglomération urbaine constituée de trois arrondissements où l’insécurité sévit plus qu’ailleurs à Natitingou, il y ait deux autres postes de police pour renforcer le seul existant qui sert de commissariat central.  » Si au moins le problème crucial de manque d’agents est réglé pour ramener la paix  dans la ville  comme ce fut le cas  avec l’arrivée du renfort, les populations en seront très soulagées, car les malfrats profitent du vide actuel pour frapper » fait- il savoir. Mais il n’y a pas que l’insuffisance du personnel sécuritaire. Les moyens financiers nécessaires pour assurer la gestion du peu font également défaut.  » Il n’y aucun fond octroyé à la sécurité de la ville au niveau de la commune alors que cela est de notre responsabilité » déplore le maire  Ouindeyama. Depuis plus de cinq mois qu’il est aux commandes de la ville, à l’issue des dernières élections communales et municipales, il a dit avoir  mis plusieurs fois déjà, la main à la poche pour payer des frais destinés aux questions sécuritaires. Le budget  exercice 2021 que le conseil communal a récemment adopté a heureusement prévu une ligne dans ce sens. 

A en croire  l’autorité communale, l’existence de plusieurs ghettos â Natitingou où des jeunes désœuvrés s’adonnent davantage à la consommation des produits prohibés comme la drogue, malgré les traques menées contre eux, constituent une autre source d’insécurité qui appelle à des moyens conséquents. Entre autres mesures actuelles, la mairie a également sommé tous les bars et buvettes de fermer leurs portes au plus tard à 22h tous les soirs. Une mesure peu respectée jusque là dans l’ensemble de la ville, regrette le maire de Natitingou qui invite chaque habitant à penser à assurer d’abord sa propre sécurité en respectant les consignes données avant l’apport de la mairie et de l’État. Pour lui, «  la police ne peut être efficace que lorsqu’elle est suffisamment renseignée et de façon pointue. » Il donnera aussi cette assurance:  » Le nouveau commissaire qui a pris service a laissé son numéro ouvert aux chefs d’arrondissements et à toute autre personne qui peut l’appeler directement pour lui  filer des informations liées à tout acte d’insécurité à tout moment et où qu’il se déroule sur le territoire de Natitingou.  » Mon numéro de téléphone est également disponible. Il faut une coopération forte entre les populations, les autorités locales et la police pour venir à bout de  l’insécurité dans la ville » croit-il fermement.

Erickson Assouan, Partenariat OSIWA-LNT

Une réponse

  1. Avatar de Le flux
    Le flux

    Félicitations

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