Dans la commune de Dassa-Zoumè, les institutions de micro finance ont pion sur rue. A la place des banques très rares et peu accessibles, elles proposent aux femmes une gamme variée de services afin de les aider à acquérir l’autonomie financière. Mais malgré ces accompagnements financiers, les difficultés sont légion et entravent l’épanouissement des bénéficiaires.
A Dassa-Zoumè, la culture du prêt est une habitude ancrée dans les mœurs des femmes revendeuses, transformatrices de produits vivriers. Les bénéficiaires de ces microcrédits proviennent souvent des associations ou regroupements de femmes identifiés comme tels et connus du grand nombre. Les institutions spécialisées dans le crédit sont suffisamment présentes dans la commune et offrent une large gamme de prêts à leurs clientèles.
L’expérience de dame Ruffine dite « Ya Ifè » commerçante de produits agricoles au marché central de Dassa est très enrichissante. Elle a débuté les prêts au moment où son père est décédé à la fleur de l’âge. A 23 ans, sa tante l’aide à contracter un prêt de 100.000 FCfa avec lequel elle a démarré une activité commerciale. Le respect de l’échéancier est une obligation, fait-elle savoir. « Le paiement se fait en fonction du délai accordé par l’institution financière. J’ai débuté il y a déjà 14 ans. Je n’ai jamais manqué de payer. Aujourd’hui, je suis autonome et je m’occupe bien de ma famille », nous a déclaré Ya Ifè.
Genèse du microcrédit à Dassa…
L’historique du microcrédit dans la commune de Dassa-Zoumè remonte aux années 2000 où la région, zone rurale par nature, fut secouée par une morosité financière. En effet, en dehors des travaux domestiques, les femmes rurales mènent plusieurs activités dont l’artisanat, la transformation des produits vivriers, le tricotage, le commerce et biens d’autres. Les difficultés des femmes se résument à comment trouver les ressources pour s’approvisionner en matières premières. D’où leur recours au crédit dont les conditions d’octroi sont draconiennes dans les banques et relativement abordables dans les structures de micro-finance.
Les activités génératrices de revenus ne nécessitent pas un grand apport financier mais rapportent assez de gains qui contribuent quelque peu à la satisfaction des besoins des familles. Le microcrédit a permis le développement des activités génératrices de revenus, d’autant plus que les institutions financières traditionnelles ne sont pas accessibles aux populations rurales. Il s’agit d’activités comme le commerce, la vente de divers, la transformation de produits, l’artisanat, les prestations de service. A Dassa, les activités génératrices de revenus sont en grand nombre et permettent aux femmes de sortir de leurs précarités.
Une gamme de propositions
La caution solidaire est un engagement de paiement à la place d’un débiteur sans aucune contestation possible et exprime la solidarité des codébiteurs. Pour bénéficier du microcrédit, les femmes qui ne peuvent placer des biens meubles en garantie, doivent se constituer en groupe et prendre l’engagement d’être la caution pour les uns et les autres. C’est le système adopté par la plupart des institutions de microcrédit en vue de garantir le remboursement effectif des fonds octroyés. La condition majeure de l’autoconstitution en caution solidaire est l’assurance de la crédibilité et la contrainte morale de chaque candidate du groupe au microcrédit. En d’autres termes, chaque femme doit être sûre de la crédibilité de l’autre postulante à son groupe. Car, chacune d’elle constitue la garantie de l’autre, son avaliseur à telle enseigne que dès qu’un membre du groupe n’arrive pas à solder son compte, les autres membres sont obligées de rembourser à sa place au risque d’être toutes sanctionnées.
Le remboursement collectif c’est le paiement de la somme due par les femmes bénéficiaires du microcrédit. Ce paiement est mensuel avec parfois un délai de grâce d’un mois. A Dassa où ailleurs, c’est le remboursement effectif et à temps qui conditionne le renouvellement du microcrédit. Ce remboursement devait être issu directement des revenus de l’activité. Mais le montant remboursé est souvent celui emprunté à nouveau chez d’autres emprunteurs à l’instar des tontiniers ou encore une épargne tontinière hors du microcrédit préalablement reçu, fait remarquer Euphrasie Hountchémè, agent de crédit dans une institution de micro-finance à Glazoué. De ce fait, les femmes sont membres de plusieurs structures d’octroi de prêt à la fois pour répondre aux impératifs de remboursement.
Il y a aussi l’épargne journalière déposée auprès d’un tontinier qui marque ce dépôt journalier sur une carte suivant le nombre du jour du mois. Au cas où la bénéficiaire ne peut rembourser intégralement le montant mensuel dû sur la base des bénéfices de son activité, elle puise dans son épargne auprès du tontinier pour pouvoir être à jour dans le remboursement. De même, la bénéficiaire peut recourir à un prêt, chez le tontinier moyennant remboursement avec intérêt, afin de rembourser le microcrédit. « Nous avons des agents tontiniers que nous envoyons vers les femmes qui souscrivent quotidiennement. Cette épargne leur permet d’amortir le paiement », indique Epiphane Toundie, responsable d’agence de micro-crédit à Dassa-Zoumè.
Risques du microcrédit…
Le grand risque auquel sont confrontés les bénéficiaires du micro-crédit reste le risque d’impayés. A cela s’ajoute le détournement de fonds et le surendettement. En ce qui concerne le détournement de fonds, il s’observe au sein des groupements de femmes. « Dès que nous remettons les prêts aux responsables d’associations ou de groupements, les fonds ne parviennent pas directement aux bénéficiaires. Les fonds sont saucissonnés pour des raisons de dettes ou de commission », nous dit une source proche du fonds national de micro-finance qui a confié que l’institution a fait de vives recommandations aux systèmes financiers décentralisés les exhortant entre autres à remettre en main propre le prêt à son bénéficiaire.
A Dassa Zoumè, l’octroi des micro-crédits permet aux femmes qui n’ont pas accès aux services bancaires de renforcer leurs activités et contribue efficacement à leur autonomisation. Les systèmes financiers décentralisés renforcent à travers ce canal, l’activité commerciale des bénéficiaires qui se répercute sur leurs familles. « En moyenne par an, plus de 50 femmes bénéficient des prêts avec des modalités qui varient entre 1.400.000F et 16.000.000F Cfa», insiste Charles Ogouyomi, agent de crédit dans une structure financière.« Avec l’implantation de plusieurs structures de micro-finances dans la commune, les sollicitations sont régulières et le nombre de bénéficiaires accroît. Les rapports adressés à la cellule nationale de surveillance des institutions financières l’évoquent clairement », renchérit notre source proche du fonds national de l’institution. Les taux d’intérêts appliqués sont beaucoup plus flexibles que dans les banques, nous dit Virginie, productrice de Coton.
En toute conscience, les micro-crédits renforcent l’autonomisation des femmes et contribuent au bien-être familial. Les autorités communales disent mettre en place des politiques d’accompagnement en vue de la facilitation du processus d’octroi des prêts et offrent des conditions souples pour l’installation desdites structures sur le territoire de la commune.
Jacob ANANI, Partenariat OSIWA-LNT
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