En faillite démocratique depuis 2016, le Bénin ne suscite pas grand espoir au regard du tableau qu’il présente. Presque toutes les institutions républicaines donnent des signes de caporalisation avancée, la classe politique est cloisonnée et balkanisée -avec l’opposition et la mouvance qui se regarde comme en chiens de faïence- la justice et la presse totalement réduises au silence et à la soumission. Dans un tel contexte, le dialogue des acteurs politiques devient une solution inévitable, urgente et surtout impérative.
Au cours d’une convention de L’Union fait la Nation (UN) en 2013, Bruno Amoussou, alors président de cette coalition de partis politiques de l’opposition avait affirmé que les acteurs de l’opposition n’en pouvaient plus d’être toujours là à apporter de l’eau pour éteindre les différents feux que le régime d’alors allumait et qu’ils commençaient à avoir mal de porter l’eau. Aujourd’hui, les responsables du parti Les Démocrates (LD) en font plus car les feux sont plus nombreux et plus intenses. Obligés qu’ils sont de quémander un minimum de droits, de liberté pour eux et pour les populaires, ils ne s’empêchent guère d’appeler à la paix, au retour à un régime plus ouvert et à la fin de la vendetta politique.
Julien Kansou Kandé fait partie de ces porteurs d’eau. Dans ces différentes adresses et messages, il critique les travers du régime mais surtout propose des solutions pour le retour de notre pays dans le cercle envieux des pays ancrés dans la démocratie. Son dernier message présente une situation critique et inquiétante du mal-être national actuel qui a gangrené la classe politique et qui s’est métastasé dans les institutions de la république. « La crise institutionnelle est si aiguë qu’aller devant la Cour Constitutionnelle pour un dossier n’est plus la peine. Si c’est l’opposition qui a raison, le dossier est déclaré irrecevable ou à la limite la cour se déclare incompétente. Les élections passées ont été la preuve selon laquelle il y a la crise institutionnelle au point où la cour ne pouvait pas ordonner à la CENA de sortir les documents qui lui ont servi de base de compilation de résultats. Pour les présidents de commission, la règle de proportionnalité dictée par cette Cour a mis en cause une décision de 2011 », déplore le politicien-poète.
Et son diagnostic ne s’arrête pas là, il présente la justice et la presse, normalement 3è et 4è pouvoirs comme des laquais au service du pouvoir central. « La justice est la cheville ouvrière qui permet de mettre toutes les voix discordantes sous scellées. Les opposants les plus en vue sont condamnés et d’autres contraints à l’exil. En ce qui concerne la presse, elle n’est pas indépendante, les journalistes engagés sont souvent devant la justice, les plus faibles ont abandonné le travail pour se jeter dans les bras du pouvoir qui broie tout » déplore-t-il.
Dans un tel système de délitement des pouvoirs, le chef de l’Etat s’octroie tous les pouvoirs et tous les droits. « Aujourd’hui, quand le président de la République sort du pays en prenant de l’avion, personne ne sait combien il met dans son avion. Les lois sont votées pour protéger le pouvoir en place. Par ailleurs, la liste électorale qui depuis l’indépendance à 2016 était gérée par les institutions indépendantes est désormais dans la main du président de la République qui contrôle tout », dénonce Kansou Kandé.
Le dialogue pour des élections pacifiques en 2026
« Alors, pour que le pays retrouve le chemin de la paix, pour que les élections ne se soient plus des élections de sang, il faut s’asseoir pour discuter des conditions de leurs organisations, les conditions de libération et du retour des exilés politiques. Le dialogue est la solution à nos problèmes. Le monde est vieux et l’avenir sort du passé, on a vu nos aînés faire un tel dialogue pour jeter les bases de notre démocratie. Si nous aimons ce pays, c’est le moment à jamais de se libérer des liens de l’exclusion de discuter sincèrement. Le reste, telles les choses sont faites, la violence est déjà à notre porte ». Ce message s’adresse à une seule personne : Patrice Talon, Président de la République à qui il propose un meilleur départ du pouvoir que celui que lui réservent les fruits de sa propre gouvernance. « Monsieur le Président, n’oubliez pas que vous êtes à la fin de votre mandat, vous avez intérêt à organiser le dialogue politique inclusive pour la paix qui va accompagner votre départ. Le dialogue crée un consensus et le consensus à une valeur constitutionnelle. Ce qui ne peut pas se faire avec les institutions actuelles, peut se faire avec le dialogue. Le dialogue est une vertu. Dans la sous région, c’est le dialogue qui a permis aux autres, le Sénégal par exemple, de retrouver le chemin de la paix. Si les institutions diront toujours qu’elles ne sont pas incompétentes, on va tout droit dans le gouffre », a-t-il dit pour conclure. La balle est donc dans les mains de Talon. Son usage dépend de lui seul.
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