Depuis son arrivée au pouvoir en octobre 2022, Giorgia Meloni, la Première ministre italienne, a fait de la lutte contre l’immigration illégale l’un des piliers de sa politique. Issue de l’extrême droite, elle a promis de réduire drastiquement le nombre d’arrivées sur les côtes italiennes. Pour y parvenir, son gouvernement a mis en place une série de mesures controversées, allant du durcissement des conditions d’accueil des migrants à l’intensification des patrouilles en mer Méditerranée. Meloni a également renforcé la coopération avec les pays d’origine et de transit, notamment la Tunisie, pour tenter d’endiguer le flux migratoire à la source. Cette approche musclée a suscité des critiques de la part des organisations humanitaires, mais semble porter ses fruits, du moins en termes de réduction des arrivées.
Un changement radical à Menton
Les effets de cette politique se font ressentir jusqu’à Menton, ville française des Alpes-Maritimes située à la frontière avec l’Italie. Longtemps considérée comme un point de passage privilégié pour les migrants cherchant à entrer en France, Menton connaît depuis plusieurs mois une baisse significative des traversées illégales. Les habitants de la commune, habitués à voir un flot quasi quotidien de migrants, notent désormais leur absence. Ce changement de dynamique est particulièrement visible à la gare de Menton, où la présence policière reste importante malgré la diminution des arrivées.
Cette évolution marque un tournant pour une ville qui, pendant des années, a été soumise à une forte pression migratoire. Alain Comman, membre d’un collectif de riverains, rappelle qu’auparavant, « il y avait un flot qui était quasi quotidien à un moment donné, en provenance de Lampedusa, qui passait forcément par cette frontière qui est assez accessible ». La situation actuelle contraste fortement avec ce passé récent, témoignant de l’efficacité des mesures mises en place.
Les raisons d’un succès inattendu
La clé de ce changement réside dans la stratégie adoptée par l’Italie. En l’espace d’un an, le pays a réussi à réduire de 65% le nombre de migrants arrivant sur son territoire. Cette baisse spectaculaire s’explique en grande partie par la pression exercée par les autorités italiennes sur leurs homologues tunisiens. Rome a exigé de Tunis un renforcement des contrôles au départ de la Tunisie, un pays qui constitue l’un des principaux points de départ des traversées en Méditerranée.
Laurent Martin de Frémont, du syndicat Police Unité 06, explique que cette collaboration a conduit à « moins de migrants sur le sol italien« . Cette réduction en amont a naturellement entraîné une diminution des tentatives de passage vers la France, notamment par Menton. La stratégie italienne ressemble à un barrage qui, en retenant l’eau en amont, assèche les rivières en aval.
Toutefois, cette apparente réussite cache une réalité plus complexe. Les flux migratoires, tels des cours d’eau, ont tendance à trouver de nouveaux chemins lorsqu’on les bloque. Ainsi, face aux obstacles dressés sur la route Italie-France, les migrants se tournent vers d’autres itinéraires, privilégiant désormais des passages par l’Espagne ou la Grèce. Ce phénomène de vases communicants illustre la difficulté de gérer les flux migratoires à l’échelle d’un seul pays ou d’une seule frontière.
La situation à Menton révèle les défis auxquels l’Europe est confrontée en matière de gestion des migrations. Si la politique de Giorgia Meloni semble avoir atteint son objectif de réduction des arrivées en Italie et, par ricochet, à Menton, elle soulève des questions sur la durabilité et l’équité d’une telle approche. La pression migratoire, plutôt que d’être résolue, semble simplement déplacée vers d’autres régions, appelant à une réponse coordonnée et humaine à l’échelle européenne.
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