L’inflation galopante qui sévit actuellement dans les pays du Maghreb n’épargne pas le secteur alimentaire, touchant de plein fouet les produits de base comme la viande. Cette hausse vertigineuse des prix, qui met à mal le pouvoir d’achat des consommateurs, pousse les gouvernements à prendre des mesures drastiques pour tenter de juguler la crise. En Algérie, où le prix du poulet a récemment atteint des sommets à 500 dinars le kilogramme et celui de la viande rouge a frôlé les 3000 dinars, les autorités ont décidé d’intervenir de manière décisive pour reprendre le contrôle d’un marché devenu incontrôlable.
Une stratégie étatique pour maîtriser les prix
Face à cette situation alarmante, le gouvernement algérien a opté pour une approche interventionniste en annonçant une reprise en main du secteur de la production des viandes blanches et rouges. Cette démarche, annoncée par le ministère de l’Agriculture et du Développement rural, vise à réguler l’approvisionnement du marché et à stabiliser les prix. Pour ce faire, un accord a été conclu entre plusieurs organismes publics, marquant ainsi le retour de l’État comme acteur principal dans ce domaine crucial pour l’économie et la société algériennes.
Le plan d’action prévoit la mise à disposition de structures d’élevage appartenant aux unités de production agricole de la DCAS (Entreprise de développement des cultures agricoles stratégiques) au profit des groupes ALVIAR (Algérienne des viandes rouges) et ONAB. L’objectif affiché est ambitieux : produire pas moins de 10 000 tonnes de viande blanche et élever 50 000 têtes de bétail. Cette production massive vise à constituer un stock stratégique capable de répondre à la demande nationale, notamment durant les périodes de forte consommation comme le mois de Ramadan et l’Aïd El Kebir.
Les défis d’un secteur en mutation
La reprise en main étatique du secteur de la viande en Algérie soulève néanmoins des questions quant à son efficacité et sa pérennité. En effet, le secteur privé, qui détient la majorité du cheptel national avec près de 19 millions de têtes de moutons, se trouve de facto exclu de ce nouveau dispositif. Cette situation pourrait créer des tensions entre les acteurs publics et privés, et potentiellement perturber l’équilibre déjà fragile du marché.
Par ailleurs, le manque de réglementation dans le secteur avicole, où près de 80% des éleveurs de poulets opèrent sans agrément, constitue un défi majeur pour les autorités. La création de cartes d’éleveurs provisoires, suggérée par certains acteurs du secteur, pourrait être une piste pour formaliser cette activité et mieux contrôler la production et les prix.
Vers une autosuffisance alimentaire ?
La stratégie mise en place par le gouvernement algérien va au-delà d’une simple régulation des prix à court terme. Elle s’inscrit dans une vision plus large visant à renforcer l’autosuffisance alimentaire du pays. En mobilisant les infrastructures sous-utilisées, comme les anciennes fermes pilotes, les autorités espèrent non seulement augmenter la production nationale, mais aussi réduire la dépendance aux importations.
Cette démarche pourrait s’avérer bénéfique à long terme, en permettant à l’Algérie de mieux maîtriser sa sécurité alimentaire. Toutefois, le succès de cette initiative dépendra de la capacité du gouvernement à moderniser les structures de production, à former une main-d’œuvre qualifiée et à mettre en place des mécanismes de contrôle efficaces pour garantir la qualité et la traçabilité des produits.
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