Le torchon brûle à nouveau entre l’Algérie et le Maroc. Tels deux frères ennemis, ces géants du Maghreb perpétuent une querelle ancestrale, ravivant les braises d’un conflit qui ne cesse de couver. Leur antagonisme, enraciné dans l’histoire postcoloniale, s’est cristallisé autour de différends territoriaux, notamment la question épineuse du Sahara occidental. Ce contentieux, véritable nœud gordien des relations bilatérales, a été à l’origine de multiples crises diplomatiques, culminant avec la fermeture des frontières en 1994. Depuis, les tensions n’ont cessé d’osciller entre accalmies précaires et regains de fièvre, au gré des soubresauts politiques et des enjeux géostratégiques régionaux.
Une décision lourde de conséquences
Le dernier coup d’éclat en date est survenu le jeudi 26 septembre 2024, lorsque le gouvernement algérien a annoncé la réinstauration immédiate de l’obligation de visa d’entrée sur son territoire pour les détenteurs de passeport marocain. Cette mesure, tombée comme un couperet, marque une nouvelle escalade dans les relations déjà tendues entre les deux pays. Elle intervient dans un contexte politique particulier, à peine deux semaines après la réélection controversée d’Abdelmadjid Tebboune à la tête de l’État algérien.
La diplomatie algérienne justifie cette décision par des considérations sécuritaires, accusant le Maroc de s’être livré à « diverses actions attentatoires à la stabilité de l’Algérie et à sa sécurité nationale ». Le communiqué officiel dresse un réquisitoire accablant, évoquant l’organisation à grande échelle de réseaux criminels, trafics en tous genres, et même des activités d’espionnage impliquant des agents de renseignements étrangers munis de passeports marocains.
Des accusations qui masquent mal les tensions sous-jacentes
Derrière ce discours sécuritaire se cachent des enjeux plus profonds. La décision algérienne semble être l’aboutissement d’une campagne médiatique orchestrée sur les réseaux sociaux, appelant depuis plusieurs semaines à la réinstauration du visa pour les Marocains. Cette mobilisation virtuelle traduit un sentiment de méfiance grandissant au sein de la population algérienne, habilement exploité par les autorités.
En pointant du doigt le Maroc comme « seul responsable de l’actuel processus de dégradation des relations bilatérales », l’Algérie cherche à consolider sa position sur l’échiquier régional. Cette rhétorique belliqueuse permet au pouvoir en place de détourner l’attention des problèmes internes, tout en ravivant le sentiment nationaliste.
Un pas en arrière pour la coopération régionale
La réinstauration du visa marque un net recul dans les efforts de rapprochement entre les deux pays. Elle remet en question les timides avancées observées ces dernières années en matière de circulation des personnes. L’Algérie, qui se targuait jusqu’alors d’avoir maintenu une certaine « fluidité » dans les déplacements malgré la rupture des relations diplomatiques en 2021, semble aujourd’hui privilégier une approche plus restrictive.
Cette décision risque d’avoir des répercussions importantes sur les liens familiaux et les échanges culturels entre les deux peuples. Elle pourrait également affecter les dynamiques économiques transfrontalières, déjà mises à mal par des années de tensions. Au-delà des considérations bilatérales, c’est tout le projet d’intégration maghrébine qui se trouve une fois de plus fragilisé par ces querelles intestines.
Ainsi, le feuilleton des rivalités algéro-marocaines connaît un nouveau rebondissement, illustrant la difficulté persistante à dépasser les antagonismes historiques. Dans ce climat de méfiance réciproque, la perspective d’une normalisation des relations semble plus lointaine que jamais, laissant planer l’ombre d’une fragmentation durable du Maghreb.
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