La crise politique au Niger, qui s’est accentuée depuis le coup d’État du 26 juillet 2023, connaît un nouveau tournant. Selon les informations relayées par nos confrères de Radio France Internationale, dans la soirée du jeudi 10 octobre, le président Abdourahamane Tiani a signé un décret frappant de déchéance de nationalité nigérienne neuf personnalités considérées comme proches de l’ancien président Mohamed Bazoum. Toujours selon RFI, ces personnalités, pour la plupart en exil, sont accusées d’actes de trahison et de complot contre l’État nigérien.
La décision de retirer la citoyenneté nigérienne à des opposants marque un précédent dans l’histoire du pays. Parmi les neuf personnes concernées, toutes étaient des proches collaborateurs de l’ex président Bazoum. Le plus emblématique d’entre eux est sans doute Rhissa Ag Boula, ancien ministre d’État et conseiller à la présidence. Ag Boula est surtout connu pour son rôle historique dans les rébellions touarègues de 1991 et de 2007. Après le putsch de 2023, il a fondé un Conseil de résistance pour la République, visant à contester la légitimité du pouvoir CNSP (Conseil national pour la sauvegarde de la patrie). Depuis, il a trouvé refuge en France, où il bénéficie de l’asile politique.
Les accusations pesant sur Rhissa Ag Boula et ses compagnons sont graves. Les autorités nigériennes les soupçonnent « d’intelligence avec une puissance étrangère », de « trahison » et de « complot ». En plus de Rhissa Ag Boula, d’autres figures importantes sont visées, dont les généraux Abou Mahamadou Tarka, ancien responsable de la Haute Autorité à la consolidation de la paix, et Karingama Wali Ibrahim, ex-chef de la garde présidentielle. Tous deux sont désormais en exil et recherchés par les forces de sécurité nigériennes.
Malgré leur fuite, Niamey a inscrit leurs noms sur un fichier national récemment instauré. Ce fichier répertorie les individus suspectés d’actes de terrorisme ou d’atteinte à la sûreté de l’État. La gendarmerie nigérienne les considère comme « en fuite », selon des avis de recherche diffusés à leur encontre. Cette mesure de déchéance de nationalité, qualifiée de provisoire par le gouvernement, est dénoncée par plusieurs observateurs internationaux.
Les sanctions infligées par le CNSP suscitent de vives critiques, notamment de la part de diverses organisations de défense de droits de l’Homme comme Human Rights Watch (HRW), qui dénonce une « entrave aux droits fondamentaux ». Selon l’organisation, le retrait de nationalité comme outil de répression politique constitue une violation flagrante des principes de la liberté d’expression et du droit à la contestation. HRW estime que la situation actuelle au Niger est préoccupante, alors que la junte militaire semble resserrer son emprise en éliminant toute voix dissidente.
Cette décision intervient dans un contexte où le pouvoir Tiani, sous pression internationale, doit faire face à des sanctions de la part de la CEDEAO. Alors que Mohamed Bazoum demeure en détention, ses alliés, éparpillés à travers le monde, continuent de mobiliser la communauté internationale contre le régime de Niamey.
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