Adultère au Maghreb : une décision de justice surprend

Au Maroc, l’adultère est considéré comme un délit punissable par la loi. La justice marocaine traite ces affaires avec rigueur, pouvant entraîner des peines d’emprisonnement allant d’un à deux ans. Cependant, le système judiciaire exige des preuves solides et irréfutables pour établir l’infidélité conjugale. La preuve formelle d’une relation sexuelle extraconjugale doit être apportée, les simples soupçons ou témoignages indirects étant insuffisants pour prononcer une condamnation.

Une affaire récente à Kénitra illustre parfaitement cette complexité juridique. En 2024, une femme a déposé plainte contre son mari, l’accusant d’infidélité après l’avoir surpris en situation intime avec une autre femme. Pour étayer ses accusations, elle a fourni une vidéo montrant clairement son époux et la présumée maîtresse partageant un lit et échangeant des baisers. Lors de son interrogatoire, le mari a admis avoir eu des relations antérieures avec la femme en question, tout en niant formellement tout rapport sexuel la nuit des faits.

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Les failles procédurales : un tournant décisif

Contre toute attente, la cour de première instance de Kénitra a prononcé un non-lieu en faveur des accusés, s’appuyant sur plusieurs éléments juridiques déterminants. D’abord, le procès-verbal de police a été invalidé car non signé, perdant ainsi toute valeur probante. Ensuite, les deux prévenus ayant nié tout contact sexuel devant le procureur, leurs déclarations ont prévalu sur les images présentées. De plus, aucun document officiel attestant formellement de l’infidélité n’a été soumis à la cour.

La vidéo, bien qu’apparemment accablante, n’a pas été retenue comme preuve valable par le tribunal, celui-ci arguant qu’elle n’était pas accompagnée d’un procès-verbal rédigé par un officier de police judiciaire, comme l’exige la procédure. Par ailleurs, le tribunal a établi une distinction juridique claire entre intimité et acte sexuel, considérant que partager un lit et s’embrasser ne constituent pas en soi une relation sexuelle au sens légal du terme.

Une jurisprudence potentielle

Ce jugement pourrait établir un précédent significatif dans la jurisprudence marocaine concernant les affaires d’adultère. En privilégiant la rigueur procédurale et l’interprétation stricte de la définition légale de l’adultère, la cour de Kénitra a démontré que même des preuves visuelles apparemment convaincantes peuvent être écartées si elles ne respectent pas scrupuleusement les exigences formelles du droit marocain.

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