En pleine transformation énergétique mondiale, l’Afrique de l’Est voit émerger un projet minier qui pourrait redessiner la place de la région sur l’échiquier des matériaux stratégiques. L’Ouganda, longtemps en retrait des grandes exploitations de minerais critiques, entend tirer parti de ses ressources naturelles pour intégrer les chaînes de valeur mondiales. Le site d’Orom-Cross, riche en graphite, s’impose progressivement comme un levier clé de cette ambition nationale. Ce minéral, essentiel à la fabrication des batteries lithium-ion, suscite un intérêt croissant, notamment de la part d’acteurs financiers panafricains désireux d’accompagner la transition énergétique du continent. Si les phases de développement se déroulent comme prévu, cette exploitation pourrait permettre à l’Ouganda de devenir l’un des rares fournisseurs africains de graphite destiné aux technologies propres.
Dès les premières évaluations, le potentiel du gisement a retenu l’attention de plusieurs investisseurs, dont l’Africa Finance Corporation (AFC). Cette institution, spécialisée dans le financement d’infrastructures sur le continent, envisage non seulement d’apporter des fonds pour les infrastructures initiales, mais aussi de participer directement à la gouvernance du projet en entrant au capital de la société détentrice des droits d’exploitation. Le plan initial repose sur une enveloppe estimée à 62 millions de dollars, destinée à couvrir les premiers travaux d’infrastructure et l’achat d’équipements nécessaires au démarrage de l’exploitation. Dès 2026, la première phase d’exploitation devrait permettre de produire environ 5 000 tonnes de concentré par an. À mesure que les infrastructures s’étendront et que les opérations s’optimiseront, cette capacité devrait être multipliée pour atteindre 50 000 tonnes annuelles autour de 2027-2028, avant de viser un volume total de 100 000 tonnes par an à l’horizon 2030 avec une montée en puissance progressive adaptée à la demande croissante du marché mondial des véhicules électriques et des énergies renouvelables.
Cependant, l’enjeu dépasse largement la seule extraction de minerai. Consciente des limites du modèle économique fondé sur l’exportation brute de matières premières, l’Ouganda ambitionne d’aller plus loin en développant une véritable filière industrielle autour du graphite. Un projet d’usine de transformation est d’ores et déjà à l’étude, avec pour objectif de produire localement du graphite purifié répondant aux standards les plus exigeants de l’industrie des batteries. Cette stratégie d’intégration locale, encore rare en Afrique pour ce type de ressource, permettrait de capter davantage de valeur ajoutée, de créer des emplois qualifiés et d’attirer de nouveaux investisseurs, aussi bien locaux qu’internationaux.
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