Sénégal : Un bras de fer s’installe entre Guy Marius Sagna et la majorité parlementaire

Dans une publication dense sur les réseaux sociaux, le député Guy Marius Sagna a dressé une longue liste de pratiques qu’il considère comme contraires à l’éthique républicaine et aux exigences de sobriété budgétaire. Il pointe notamment la distribution de colis alimentaires à l’Assemblée, l’absence de traçabilité sur les fonds alloués aux groupes parlementaires, ou encore la dotation en billets pour des pèlerinages religieux. Ces critiques, qu’il ancre dans une lecture militante du rôle de l’élu, ont trouvé un écho particulier à l’heure où le débat sur la rationalisation des dépenses publiques, notamment autour des voitures de fonction pour députés, suscite de vives réactions dans l’opinion. Guy Marius Sagna invoque Mamadou Dia et Thomas Sankara pour appeler à un changement radical de culture politique, affirmant que ces dérives sont en contradiction avec les principes du parti PASTEF auquel il appartient.

Une contre-offensive bien huilée de la majorité

Le premier vice-président de l’Assemblée nationale, Ismaïla Diallo, est monté au créneau dans un long message de réponse où il démonte point par point les accusations de son collègue. Il accuse Sagna de jouer un double jeu, rappelant qu’il perçoit à la fois des indemnités de la CEDEAO et des ressources de l’Assemblée nationale, sans transparence sur les montants cumulés. Il lui reproche également d’entretenir la confusion entre les pratiques de la précédente législature et la présente, et évoque des incohérences dans son propre comportement, notamment une dette contractée auprès du groupe parlementaire Yewwi, ou son absence aux travaux de la Commission de comptabilité dont il est pourtant membre. Pour Diallo, ces critiques relèvent d’une posture morale sélective, visant davantage à capter l’attention du public qu’à corriger les failles de l’institution. Il conclut sa réplique en affirmant que la nouvelle législature a déjà entamé des réformes structurelles, et que l’engagement collectif prime sur les indignations individuelles.

Le malaise d’une Assemblée en quête de crédibilité

Cet échange, rendu public et nourri de part et d’autre, illustre un malaise profond au sein du Parlement sénégalais, entre une volonté de réforme affichée et des pratiques encore marquées par l’opacité. Le fait que ce débat ait été rendu public souligne une transformation dans la manière dont les députés abordent leur rôle : non plus seulement en interne, mais aussi devant les citoyens. Il révèle également une tension croissante entre les principes d’exemplarité politique et les réalités de gestion quotidienne. En pleine crise de confiance entre les représentants et les représentés, cet affrontement expose les fractures entre ceux qui plaident pour une rupture totale avec certaines pratiques anciennes, et ceux qui défendent une réforme progressive sans procès d’intention. Quoi qu’il en soit, le ton est donné pour une 15e législature plus exposée que jamais aux exigences de transparence et de redevabilité.

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