Le dossier nucléaire iranien, longtemps soumis aux tensions diplomatiques entre Téhéran et les puissances occidentales, entre dans une nouvelle phase. Tandis que les États-Unis restent à l’écart d’un retour officiel à l’accord de 2015, trois autres acteurs majeurs s’apprêtent à intensifier leur coordination : l’Iran, la Russie et la Chine se réuniront ce 22 juillet à Téhéran pour aborder l’avenir du programme nucléaire iranien. Ce sommet trilatéral se veut un contrepoids aux pressions croissantes exercées par les pays européens, notamment ceux du groupe E3 – France, Royaume-Uni et Allemagne – qui menacent de recourir aux mécanismes de sanctions prévus par l’accord initial.
Cette configuration illustre un phénomène qui dépasse le seul cadre de l’Iran : l’équilibre global de la diplomatie nucléaire évolue vers une logique de blocs. D’un côté, les signataires historiques de l’accord, de plus en plus divisés sur son application. De l’autre, des puissances comme la Chine et la Russie qui, en entretenant leurs liens avec l’Iran, cherchent aussi à renforcer leur influence au sein des institutions multilatérales où les Occidentaux perdaient du terrain. Ce jeu d’alliances rappelle les tensions énergétiques, où les grands producteurs redéfinissent les règles du marché selon leurs propres priorités.
Un accord nucléaire en sursis
L’accord de Vienne de 2015, censé limiter drastiquement les activités nucléaires sensibles de l’Iran, est aujourd’hui vidé de sa substance. Depuis le retrait unilatéral des États-Unis en 2018, le texte ne survit que par des engagements fragiles et des violations assumées. Pour les membres européens du groupe E3, la situation est critique. Ils accusent Téhéran d’avoir franchi plusieurs lignes rouges : enrichissement de l’uranium à des niveaux élevés, réduction des inspections de l’AIEA, et intensification des activités sur des centrifugeuses avancées.
Face à ces constats, les Européens menacent désormais de rétablir les sanctions internationales par le biais du “snapback”, une disposition intégrée à la résolution 2231 du Conseil de sécurité de l’ONU. Mais cette manœuvre est jugée illégitime par Téhéran, qui conteste la “légitimité morale, politique et juridique” de ses détracteurs. Un ancien négociateur nucléaire iranien, Seyed Abbas Araghchi, a averti que toute tentative occidentale en ce sens minerait l’autorité du Conseil de sécurité. Ce bras de fer révèle que, plus qu’un simple désaccord technique, il s’agit d’une lutte pour redéfinir les rapports de force diplomatiques autour du nucléaire.
Un calendrier chargé, des intentions divergentes
La rencontre de Téhéran entre l’Iran, la Russie et la Chine intervient à trois jours d’un autre rendez-vous décisif : celui prévu le 25 juillet à Istanbul, avec les diplomates français, britanniques et allemands. Ce double calendrier symbolise une fragmentation des discussions : au lieu d’une table commune, chacun campe désormais sur ses alliances régionales et ses intérêts géostratégiques. L’absence d’un format unique de négociation affaiblit la perspective d’un compromis global.
Il reste à savoir si la réunion trilatérale de Téhéran débouchera sur des propositions concrètes, ou si elle servira surtout de démonstration d’unité face aux pressions européennes. Le fait que les identités des représentants ne soient pas encore connues en dit long sur le flou diplomatique ambiant. Mais dans un climat marqué par la prolifération technologique, les tensions régionales et le recul du multilatéralisme, chaque initiative autour du nucléaire iranien devient un signal. Et ce signal, aujourd’hui, est que les lignes de dialogue se multiplient, mais ne convergent plus.




« Ce sommet trilatéral se veut un contrepoids aux pressions croissantes exercées par … France, Royaume-Uni et Allemagne »
A force d’être menaçant, ces « petits pays européens sous-armés » seront à l’origine de la création d’un BLOC asiatique ultra-puissant.