Sénégal : Barthélemy Dias conteste sa destitution et dénonce une manœuvre ciblée

Installé dans son nouveau siège politique, Barthélemy Dias a lancé ce lundi 21 juillet une charge frontale contre ce qu’il considère comme une éviction politique déguisée. Se déclarant toujours maire légitime de Dakar, il accuse l’administration de vouloir priver les Dakarois du choix exprimé lors des élections municipales de 2022. Pour l’ex-maire révoqué, cette procédure n’est ni neutre ni administrative, mais relève d’une opération ciblée contre sa personne.

Un ancien allié de Khalifa Sall

Après sa rupture avec Khalifa Sall, dont il fut longtemps le bras droit au sein du Parti socialiste, Barthélemy Dias a tracé sa propre voie en fondant le mouvement Sénégal Bi Nu Bokk. Depuis, il s’est affirmé comme l’un des visages les plus virulents de l’opposition, critiquant sans relâche la gouvernance actuelle. Cette indépendance revendiquée a rapidement cristallisé les tensions. Le pouvoir central n’a cessé de croiser le fer avec lui, notamment à travers des décisions administratives controversées.

Dans ce contexte déjà tendu, la décision de le démettre par arrêté préfectoral en décembre 2024 a agi comme un catalyseur. Alors que plus de cinq cents mairies existent dans le pays, une seule – celle de Dakar – aurait fait l’objet, selon lui, d’une mesure aussi brutale. Pour Dias, ce n’est pas une fonction qu’on a voulu lui retirer, mais une voix qu’on a voulu faire taire. Il insiste sur le fait qu’aucune décision judiciaire définitive ne valide cette destitution, et que seule la Cour suprême, encore saisie, est habilitée à trancher.

Une bataille sur le terrain institutionnel

À travers ses déclarations, Barthélemy Dias ne se limite pas à dénoncer une injustice personnelle. Il pose la question du respect des institutions locales et du droit des électeurs à voir leur choix respecté. Il n’y a pas eu de faute grave, ni de vacance déclarée du poste, rappelle-t-il. Son éviction serait donc, selon lui, un détournement administratif du suffrage exprimé à Dakar.

La ligne de défense repose aussi sur la procédure elle-même. L’arrêté préfectoral du 13 décembre 2024 est qualifié par ses partisans d’illégal et précipité. Pour eux, il ne saurait produire d’effets tant que la Cour suprême n’a pas confirmé sa validité. En attendant cette décision, Dias appelle les membres du Conseil municipal à se ranger derrière la maire par intérim, non pour entériner une transition, mais pour défendre une légitimité bafouée.

Une mairie au cœur d’un jeu de pouvoir

Derrière la bataille juridique se cache une réalité politique que nul n’ignore : la mairie de Dakar est un centre stratégique, autant pour ses ressources que pour sa visibilité nationale. Le contrôle de cette institution dépasse de loin le simple cadre local. Historiquement, plusieurs figures de l’opposition y ont bâti leur influence, de Khalifa Sall à Pape Diop, et Barthélemy Dias s’inscrivait dans cette lignée.

Son éviction, si elle venait à être confirmée, réactiverait le débat sur l’instrumentalisation des procédures administratives pour écarter les opposants. De son côté, Dias refuse toute perspective d’élection de remplacement tant que la plus haute juridiction ne s’est pas prononcée. Organiser un scrutin dans ces conditions reviendrait à légitimer un coup de force déguisé, martèle-t-il.

À Dakar, cette affaire dépasse le seul sort d’un homme. Elle cristallise les tensions autour de la décentralisation, de l’équilibre des pouvoirs et de la volonté populaire. Pour les Dakarois, l’enjeu n’est pas seulement de savoir qui occupera le fauteuil de maire, mais qui décidera vraiment de leur avenir politique.

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