Annoncé le 1er août, le Plan de Redressement Économique et Social (PRES) ambitionne de mobiliser plus de 5 000 milliards FCFA en seulement 30 mois, en s’appuyant à 90% au moins sur des leviers de financement internes. Objectif affiché : restaurer l’équilibre budgétaire sans recours à l’endettement extérieur. Ce pari audacieux, qui repose sur une série de réformes fiscales, institutionnelles et administratives, entend faire du Sénégal un État capable de financer ses propres priorités, sans s’en remettre systématiquement aux bailleurs. Mais si l’architecture financière du projet séduit certains observateurs, elle suscite également de vives interrogations quant à sa faisabilité et à sa cohérence sociale.
Défense vigoureuse du plan par le MONCAP
Pour les cadres du PASTEF, réunis lors d’une conférence de presse animée par le Mouvement National des Cadres Patriotes (MONCAP), le PRES représente bien plus qu’un simple plan économique. Ils le présentent comme un changement de paradigme, une tentative de rompre avec un modèle de dépendance prolongée et de réhabiliter une souveraineté budgétaire longtemps compromise. À travers une intervention marquée par la fermeté, Amadou Ba Bobo, vice-coordinateur du MNCP, a accusé certains médias de propager une interprétation biaisée du plan. « Le gouvernement a présenté une feuille de route ambitieuse, réaliste et souveraine pour remettre le Sénégal sur les rails. Face aux déformations et à la mauvaise foi constatées, le MNCP prend ses responsabilités pour éclairer les citoyens. »
Dans cette logique, le PRES est perçu par les soutiens comme une réponse urgente aux déséquilibres structurels. Il propose notamment une révision du Code des investissements, une réforme du Code général des impôts, la suppression ou la fusion de certaines agences étatiques, ainsi qu’une réaffectation ciblée des ressources publiques. Pour ses partisans, ces choix sont non seulement rationnels mais indispensables pour corriger les errements passés. Le message est clair : l’État doit se doter des moyens de ses ambitions en utilisant intelligemment ce qu’il possède déjà.
Une opposition qui pointe des contradictions majeures
Pour les critiques du plan, la dissonance ne réside pas tant dans les intentions proclamées que dans certains arbitrages jugés incohérents. La décision de maintenir une enveloppe de 10 milliards FCFA destinée à des dépenses discrétionnaires – communément appelée « caisse noire » – alimente un climat de suspicion. Aux yeux du mouvement Sénégal Bi Ñu Bokk, cette disposition symbolise une forme d’aveuglement politique.
La question de la hiérarchie budgétaire est ainsi au cœur des critiques. Tandis que les besoins sociaux urgents — santé, éducation, sécurité alimentaire — sont criants, le choix de préserver certaines pratiques opaques est vu comme un frein à la crédibilité de l’ensemble du programme. Le parti APR, lui, ne s’en tient pas à une analyse en coulisses : une conférence de presse a été annoncée pour aujourd’hui afin de pointer ce qu’il considère comme des failles structurelles dans le plan gouvernemental. L’objectif affiché est d’exiger une transparence accrue, une priorisation rigoureuse des dépenses et une meilleure articulation entre discours politique et mesures concrètes.
Dans ce duel d’interprétations, le Plan de Redressement devient le miroir d’enjeux politiques profonds. Chacun y projette sa vision de l’avenir du pays, entre impératif de rupture et nécessité de continuité. Mais à mesure que les débats s’intensifient, une chose devient certaine : ce plan, quelles que soient ses limites, force toutes les parties à poser la question essentielle de la souveraineté économique et de la justice budgétaire dans un pays encore marqué par de fortes inégalités.


