Le Sénégal a toujours eu du mal à couvrir par lui-même ses besoins alimentaires. Le riz, par exemple, demeure la principale denrée consommée mais dépend encore des importations de plus d’un million de tonnes chaque année. Ce constat historique de fragilité pousse aujourd’hui les autorités à explorer d’autres filières où l’autosuffisance paraît plus accessible. Parmi elles, la banane se détache désormais comme un symbole de ce nouvel élan.
Des chiffres qui révèlent un potentiel réel
En 2024, le pays a mis sur le marché 72 350 tonnes de bananes locales. Un volume remarquable, surtout si l’on tient compte des 37 500 tonnes perdues à cause des intempéries. La demande nationale, estimée à 101 993 tonnes, a été complétée par 29 643 tonnes importées. Ces chiffres montrent qu’avec une meilleure gestion des récoltes et une réduction des pertes, la balance pourrait rapidement basculer en faveur d’une production entièrement nationale. Pour le ministre de l’Agriculture, de la Souveraineté Alimentaire et de l’Élevage, Dr Mabouba Diagne, « l’objectif est clair : financer et accompagner les coopératives pour atteindre l’autosuffisance avant 2029, tout en réduisant les pertes et en remplaçant progressivement les importations par notre production nationale ».
La perspective de cette autonomie ne repose pas uniquement sur la volonté politique. Une réunion stratégique doit prochainement rassembler le Projet FSRP, la Direction de l’Horticulture, le Ministère du Commerce, l’ISRA, Seneguindia et l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Cette synergie inédite vise à définir un plan d’action axé sur la recherche scientifique, la diffusion de techniques modernes de culture, la structuration des chaînes de valeur et la lutte contre les pertes post-récolte. L’approche se veut globale : améliorer la productivité, stabiliser les marchés et renforcer les capacités des coopératives.
La banane comme levier symbolique
Atteindre l’autosuffisance en banane d’ici 2029 serait bien plus qu’un succès agricole. Ce serait une première victoire concrète dans la longue quête d’indépendance alimentaire du pays. Contrairement au riz, marqué par une dépendance structurelle aux importations, la banane offre un horizon atteignable en quelques années. Elle deviendrait ainsi une vitrine de ce que peut produire un secteur agricole modernisé, soutenu par la recherche et coordonné par l’État. Pour un pays souvent perçu comme vulnérable aux aléas du marché international, la banane pourrait incarner la preuve qu’un modèle d’autonomie alimentaire est possible, à condition de réunir volonté politique, savoir-faire technique et organisation collective.
L’échéance de 2029 si elle est respectée permettra au Sénégal non seulement de manger ses propres bananes ; mais elle démontrera aussi que la dépendance alimentaire n’est pas une fatalité et que chaque filière peut devenir un pilier de souveraineté lorsqu’elle est accompagnée avec méthode et persévérance.



