Alors que les avancées scientifiques modernes relancent les débats sur l’allongement de la vie, la quête d’immortalité fascine depuis des millénaires. En Chine, une inscription gravée il y a plus de deux mille ans refait surface et raconte l’histoire d’un empereur obsédé par l’éternité informe South China Morning Post. De Qin Shi Huang aux projets actuels de Xi Jinping et Vladimir Poutine, la frontière entre mythe, science et pouvoir demeure ténue. L’obsession pour défier la mort traverse les époques, révélant un même désir : contrôler le temps.
Un empereur prêt à tout pour défier la mort
Bien avant les prouesses médicales et biotechnologiques du XXIᵉ siècle, le premier empereur de Chine, Qin Shi Huang, avait déjà placé l’immortalité au centre de son règne. Une récente découverte archéologique vient raviver ce pan méconnu de l’histoire chinoise : une inscription vieille de 2 246 ans, retrouvée sur le plateau Qinghai-Tibet, révèle qu’il avait ordonné une expédition exceptionnelle pour trouver un élixir de vie.
Selon la gravure, dans la 26ᵉ année de son règne, l’empereur confia à cinq grands maîtres alchimistes la mission de conduire un groupe d’explorateurs jusqu’aux montagnes Kunlun, réputées abriter des secrets divins. Les hommes auraient parcouru plus de 150 li — environ 75 kilomètres — après avoir atteint le lac Zhaling, perché à 4 300 mètres d’altitude, dans l’actuelle province du Qinghai. Leur objectif : rapporter une potion capable de prolonger indéfiniment la vie de l’empereur.
Cette découverte a aussitôt suscité des débats passionnés parmi les chercheurs chinois. Certains y voient une pièce inestimable pour comprendre les croyances impériales de l’époque ; d’autres doutent de l’authenticité de l’inscription, rappelant que les faux archéologiques ont déjà semé la confusion dans l’historiographie du pays.
Des ambitions modernes aux résonances millénaires
Si l’histoire de Qin Shi Huang semble appartenir à un passé lointain, elle trouve un écho troublant dans les aspirations contemporaines des dirigeants actuels. Ces dernières années, Xi Jinping et Vladimir Poutine ont discrètement manifesté leur intérêt pour les projets liés à l’allongement de la durée de vie, voire à l’immortalité biologique.
En 2023, plusieurs think tanks chinois et russes se sont rapprochés de géants de la biotechnologie et de laboratoires spécialisés dans le rajeunissement cellulaire. Selon des sources scientifiques, des échanges confidentiels auraient porté sur des techniques innovantes comme la reprogrammation génétique, la régénération tissulaire et l’utilisation d’intelligences artificielles pour ralentir, voire inverser, le vieillissement. Xi Jinping, attaché à l’idée de placer la Chine à la pointe des technologies du futur, verrait dans cette quête une manière de renforcer l’influence du pays. Quant à Poutine, ses ambitions dépasseraient le simple cadre scientifique : prolonger la vie des élites serait, selon certains analystes, un outil pour préserver la stabilité du pouvoir.
L’analogie avec l’empereur Qin s’impose d’elle-même : là où ce dernier envoyait des alchimistes aux confins de son empire, les dirigeants modernes mobilisent d’immenses ressources scientifiques et financières pour explorer les confins du vivant. La différence réside dans les moyens, pas dans l’obsession.
Entre mythes ancestraux et science de pointe
L’expédition commandée par Qin Shi Huang, si elle s’est réellement déroulée, illustre une constante de l’humanité : la mort demeure la limite ultime à franchir. Pour les anciens Chinois, l’élixir d’immortalité s’apparentait à une quête spirituelle, entre croyances taoïstes et visions cosmogoniques. Les montagnes Kunlun étaient décrites dans les récits anciens comme un lieu sacré, seuil entre le monde terrestre et les royaumes des immortels.
Aujourd’hui, l’approche se veut rationnelle et technologique, mais l’ambition reste fondamentalement la même. Les projets contemporains sur l’extension de la durée de vie, qu’ils viennent de laboratoires californiens, de centres de recherche russes ou chinois, poursuivent un rêve millénaire : repousser l’inévitable. La science remplace l’alchimie, les cellules souches prennent la place des potions secrètes, mais l’horizon reste inchangé.
Pourtant, la quête d’immortalité pose des défis éthiques et politiques considérables. Qui pourrait bénéficier de ces avancées ? Si une poignée de dirigeants ou de privilégiés accédaient à une forme de « longévité extrême », le déséquilibre entre classes sociales et nations pourrait s’aggraver. Les débats actuels sur les technologies anti-âge rappellent que le pouvoir et la survie ont toujours été intimement liés.
Une obsession intemporelle
L’histoire semble former une boucle : des montagnes Kunlun aux laboratoires ultramodernes, la même question hante les esprits puissants : et si nous pouvions vaincre le temps ? Qin Shi Huang échoua dans sa quête, ironiquement emporté à 49 ans par une intoxication due… à des pilules censées lui garantir l’éternité.
Rien ne dit que les ambitions modernes aboutiront. Mais si Xi Jinping et Vladimir Poutine parviennent, ne serait-ce qu’à ralentir le vieillissement, les équilibres géopolitiques et sociaux pourraient être bouleversés. L’immortalité, ou du moins une longévité radicale, n’est plus un mythe : elle devient un enjeu de pouvoir, tout comme elle l’était déjà il y a deux millénaires.



