L’accord paraphé à Washington par Félix Tshisekedi et Paul Kagame, sous l’égide du président américain Donald Trump, ouvre une phase politique attendue depuis longtemps entre la République démocratique du Congo et le Rwanda. L’initiative a été saluée par plusieurs dirigeants africains et partenaires internationaux, mais les scènes rapportées depuis l’est de la RDC laissent entrevoir une réalité plus nuancée.
Au fil des décennies, les relations entre Kinshasa et Kigali ont été marquées par une succession de conflits frontaliers, de tensions diplomatiques et d’accusations réciproques de soutien à des groupes armés. Les violences apparues après le génocide de 1994, l’implication de mouvements rebelles dans l’est congolais et les rivalités sécuritaires ont façonné un climat de méfiance durable. Cette succession d’affrontements, d’accords avortés et de phases de dialogue fragiles constitue le terreau sur lequel repose l’accord de Washington, présenté comme une tentative de stabilisation d’un conflit ancien.
Accord de paix RDC-Rwanda et engagements régionaux
Le texte signé le 4 décembre prévoit un cessez-le-feu permanent, le désarmement des groupes armés actifs dans l’est congolais, le retour des réfugiés et l’instauration de mécanismes de justice transitionnelle. Il inclut également un volet de coopération économique et régionale que les parties décrivent comme un moyen de réduire les tensions persistantes. La cérémonie ayant réuni des responsables de l’Angola, du Burundi, du Kenya, du Togo, de l’Ouganda, du Qatar, des Émirats arabes unis et de l’Union africaine montre l’intérêt porté à ce processus.
La MONUSCO a salué cette démarche. Selon son chef par intérim, Bruno Lemarquis, l’accord de Washington, combiné au document conclu le 15 novembre entre la RDC et l’AFC/M23 et à la résolution 2773 (2025) du Conseil de sécurité, ouvre une possibilité de privilégier des solutions politiques. La mission onusienne insiste toutefois sur la nécessité d’une mise en œuvre menée de manière sincère et conforme à la souveraineté congolaise. Elle rappelle son appui aux efforts visant à protéger les civils et à favoriser la démobilisation des groupes armés.
Territoires de l’est congolais et persistance des combats entre l’armée et l’AFC/M23
Alors que les responsables politiques évoquent une nouvelle trajectoire pour les deux pays, les habitants du Nord-Kivu et du Sud-Kivu décrivent une situation différente. Des témoignages relayés par Africanews indiquent que la population de Goma reste prudente. Certains disent ne pas percevoir de changement tangible, tandis que d’autres expriment leurs inquiétudes face aux violences apparues le jour de la signature de l’accord dans plusieurs localités, notamment à Kamanyola et Katogota.
Ces affrontements, attribués à la reprise des combats entre l’armée congolaise et les rebelles de l’AFC/M23, alimentent le scepticisme. Les accusations mutuelles de violation du cessez-le-feu montrent que l’application de l’accord sera étroitement surveillée par les acteurs régionaux et internationaux. Il est possible que la réussite du processus dépende de la capacité des parties à maintenir un dialogue régulier, à contrôler les groupes armés et à coordonner les efforts de désarmement.
La question centrale demeure : l’accord de Washington peut-il modifier durablement la dynamique de la région ? Les engagements sont clairs dans leur formulation, mais leur concrétisation reste conditionnée à des avancées sur le terrain qui tardent à se matérialiser.
