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Pour que vive le patrimoine africain
Qui a volé le masque du peuple ? Qui a osé dérober le rubis de l’Afrique ? Le roi Diogoma pose la question à mainte reprise à sa cour. Il est préoccupé. Préoccupé par la disparition du masque qui est un trésor précieux du peuple. Arsène Kokou Yémadjè, metteur en scène et directeur de la compagnie Théâtre Kokou et Scène d’Ebène, plante ainsi le décor de «Le procès de l’oreille rouge». La pièce jouée le dimanche dernier au centre culturel français de Cotonou capte l’attention dès les premières minutes. Sur scène, des comédiens béninois, camerounais et congolais. Avec eux, le public forme la cour royale face à Diogoma haut perché en face.
Il décide donc de retrouver le voleur. Il soumet le peuple à un interrogatoire. Personne n’ose se déclarer auteur du vol. Il demande au sage Diabaté de consulter les dieux. Celui-ci dans sa divination tombe sur le nom de l’étranger blanc à qui sa majesté a offert son hospitalité. La princesse Assata entre en jeu et se fait l’avocat de l’accusé par contumace. Une guerre verbale sans merci se déclanche entre la princesse et le sage. Elle est si engagée à prouver que «l’oreille rouge» n’est pas l’auteur du vol du masque qu’elle faillit manquer de respect à son père, un roi assez puissant et craint.
Tapis dans le public, les autres acteurs commentent de temps à autres en soutenant Diabaté. Tout d’un coup, le masque est retrouvé à sa place. Mais Diogoma tient à savoir qui est venu le déposer à sa place. Sa fille soutient mordicus que l’auteur est le même «devin». Pour voir clair dans cette histoire, le roi propose aux deux antagonistes une potion magique à boire. Ce qui permettra de déterminer qui des deux dit la vérité. C’est de là que le pot aux roses se fait découvrir. Diabaté est bel et bien le voleur. Sa prescription divinatoire n’était donc qu’un leurre. Il a fait dire aux dieux ce qu’ils n’ont jamais révélé.
Le succès de ce spectacle tient à deux choses. Cette tendance qu’a le metteur en scène à œuvrer pour la promotion et la défense du patrimoine africain. Arsène Kokou Yémadjè se révèle ainsi engagé pour une cause bien déterminée. La thématique première de ces créations a toujours été de porter un regard critique sur la gestion du patrimoine en Afrique et surtout au Bénin. C’est une question d’actualité que récemment j’ai soulevé dans une chronique que j’ai titré «Du vodoun bradé au Ccf». La deuxième force de ce spectacle est l’implication du public dans le jeu d’acteur. Mais la difficulté à ce niveau est de savoir si les cadreurs qui filmaient le spectacle pourraient bien réussir leur travail. Car sur la scène, on voyait essentiellement le roi et la princesse. Les autres en étaient bien hors.
Fortuné Sossa