Le cauchemar des étudiants béninois à Cuba

Florent COUAO-ZOTTI,Ecrivain (couao64.unblog.fr)    
Vendredi 4 avril 2008. Sur les antennes de RFI, au cours de l’émission « La parole aux auditeurs », Adama, étudiant béninois en médecine à Cuba, a appelé le standard de la chaîne pour raconter par le menu ses déboires. Boursier de l’Etat cubain, il n’a droit qu’à 3 dollars par mois (1650 FCA), c’est-à-dire juste de quoi acheter deux baguettes de pain et, accessoirement, quelques morceaux de sucre pour rendre moins misérables ses petits déjeuners épisodiques.

En termes platement terrestres, le jeune homme, sur les 30 jours que compte le mois, ne peut honorer son ventre que trois ou quatre fois. Le reste du temps, il a droit à la diète noire.
Car, le complément de bourse que le gouvernement béninois s’était engagé à lui verser mensuellement, s’est évanoui à son arrivée sur place. Il a beau faire le pied de grue devant l’ambassade du Bénin à la Havane, multiplier ses cris de détresse à l’adresse du ministère des affaires étrangères, appeler les services d’aide aux étudiants, il n’y a que les sourds qui lui répondent. Justement, par un silence assourdissant.
Au bord de la clochardisation, Adama a recours à l’antenne de RFI pour décrire son infortune et celle de ses camarades. Puisqu’il est désormais clair qu’il n’est pas le seul à se dépatouiller dans cette galère. De nombreux étudiants béninois, depuis quelque temps, seraient en proie à la même misère. Il cite, le Adama, l’exemple de la plus jeune des bacheliers béninois de l’année dernière, une jouvencelle de 14 ans, que la perspective de faire la médecine à l’étranger a fait atterrir sur le sol des Castro. Depuis lors, la pauvrette a perdu bien des kilos. Comme elle n’était pas en surpoids, on peut imaginer les résultats du régime forcé auquel l’a condamnée cette situation. Et si on y ajoute les douze années que dureront ses études, il est aisé d’imaginer la maigreur qui la guette. Si, bien sûr, la mort n’abrégeait pas entre-temps son calvaire. En comparaison, Golgotha serait plus supportable.
Certes, il y a à Cuba des étudiants dont les parents, plus ou moins nantis, tentent d’équilibrer les revenus de leurs enfants en leur envoyant de l’argent. Mais la plupart sont issue de famille modeste et doivent faire appel à la débrouillardise. Un système D à mi chemin entre la mendicité, la solidarité floue et les arrangements indicibles. Dans un pays où les étrangers ne peuvent guère exercer un métier, même à mi-temps, dans un pays où les gens sont surveillés comme de lait sur le feu, on peut deviner le cauchemar qui attend nos jeunes compatriotes.
 Il y a quelque temps, c’était le cas d’une étudiante ayant bénéficié d’une bourse tunisienne qui avait défrayé la chronique. Une étudiante qui s’était retrouvée à Tunis avec une autre qui aurait été enregistrée à sa place. Les cris de détresse des parents de la malheureuse ont été tellement relayés par la presse que la direction des bourses et secours a été obligée d’intervenir. Depuis lors, les choses seraient revenues à la normale. Mais concernant Cuba, je crains que nos jeunes frères continuent de souffrir à huis clos. Je crains que, malgré leurs appels, la direction des bourses, le ministère des affaires étrangères continuent à leur opposer cette surdité si caractéristique de nos institutions. A moins que les parents se risquent, comme ceux de la « Tunisienne », dans l’arène. Pour secouer le cocotier et faire tomber les fourmis qui le parasitent.
Mais en réalité, le problème qui est posé est celui de la gestion des bourses mises à disposition par les pays étrangers dans le cadre de la coopération universitaire. Un problème récurrent qui fait de la direction des bourses et secours l’une des institutions les plus obscures du Bénin. Depuis toujours, il y règne une maffia teigneuse qui rackette étudiants et parents, qui plume les aspirants aux bourses avec la foi du gangster braquant une banque. Et, au train où va le changement, elle continuera d’y prospérer. En toute canaillerie. Et en toute impunité.

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