Me Joseph Djogbénou à l’issue du procès sur l’affaire des 50.000 cartes d’électeurs

« Ce procès est un véritable procès politique… »
Constitué avocat de la défense dans le procès sur l’affaire présumé vol de 50.000 cartes d’électeurs à la Commission électorale nationale autonome (Cena) dont le verdict est tombé  ce mardi matin, Me Joseph Djogbénou apporte ici dans un entretien qu’il nous a accordé, des éléments lui permettant de qualifier le procès de politique.

Vous venez de sortir d’un procès que vous avez qualifié de politique. Quels sont les éléments qui fondent votre observation ?
Ce procès est un véritable procès politique en raison de certains éléments. Le premier élément, ce sont les protagonistes et le mode opératoire qui a conduit à la privation de la liberté de ceux et celle qui ont été jugés. S’agissant des protagonistes, vous avez un bureau de la Ced dont on se rend compte que le président est de l’obédience du parti au pouvoir ainsi que du coordonnateur chargé du budget et du matériel. Que ce président a tous les pouvoirs pour constituer une équipe parallèle à celle de la Cena en qui, selon ses déclarations, il a beaucoup plus confiance. Cette équipe est constituée de son garde de corps, de son chauffeur et d’autres personnes qu’il n’a pas voulu nommer, chargées de contrôler ses autres collègues. Ce sont donc ces personnes qui ont découvert la fraude, qui l’ont informé, qui ont alerté la Fcbe qui a mis en branle la machine policière. On se souvient bien les objections du groupe Fcbe quant à la composition du bureau de la Cena. Les moyens hors budget Cena ont pu être mis à la disposition du président Ced et du coordonnateur chargé du budget et du matériel pour faire des conférences de presse et servir de prétexte à l’arrestation des autres. Il faut aussi rappeler que dès l’arrestation, Fcbe déclare suspendre sa participation aux élections jusqu’au règlement de ce qu’elle-même a élevé comme litige susceptible de bloquer le processus électoral. Il s’agit donc d’un rapport de force politique pour lequel le vol ou retrait de cartes d’électeurs aura servi de prétexte.

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Au regard de votre connaissance du dossier et des éléments techniques qui le constituent, où se situe selon vous l’enjeu pour chacune des parties ?
A mon sens, c’est le contrôle du processus électoral. Les uns estimant avoir perdu le contrôle du processus électoral font tout pour récupérer ce contrôle et à défaut de le récupérer, élèvent des difficultés. D’où l’intervention du ministre des Finances et celle du parti au pouvoir. Au fond, ce débat n’aura jamais eu lieu si les groupes proches du pouvoir avaient la tête de la Cena ou l’un quelconque des postes importants au bureau.

Au cours des débats et particulièrement pendant votre plaidoirie, la notion de liste électorale et sa vulnérabilité actuelle sont plusieurs fois revenues. Quelle est l’alternative durable que vous préconisez à ces velléités de manipulation des données sur les listes électorales ?
On aura gagné quelque chose dans ces débats, à savoir l’impossibilité de poursuivre les fraudes électorales à cause de l’organisation traditionnelle des élections. Le législateur a lui-même lié certaines infractions à la Liste électorale permanente informatisée (Lepi) ou au recensement national approfondi (Rena). Je pense qu’on ne peut sortir durablement de ces difficultés si on ne met en place la Liste électorale permanente informatisée (Lepi).

 
Propos recueillis par L.D. G.

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