CHRONIQUE : et si c’était le poisson d’avril de l’ambassade de France ?

/food/zotti.jpg » hspace= »6″ alt= » » title= » »  » />Il y a quelque temps, en décembre 2006, monsieur Christian Daziano, alors ambassade de France au Bénin, convoquait au centre culturel français de Cotonou, une grande réunion avec les personnalités du monde universitaire, culturel et médiatique du Bénin.

Dans le courrier d’invitation, l’objet de cette rencontre, bien qu’étant articulé en des termes hautement diplomatiques, tournait autour de l’utilisation de la langue française au Bénin. Il s’agissait de faire l’état des lieux de la pratique que font les Béninois de cette langue et, si diagnostic peu flatteur établi, d’engager des actions afin de faire du français un outil plus efficace au service du développement.
Je revois en image la posture austère de monsieur Daziano, précisant avec doigté les espoirs  qu’une telle consultation susciterait auprès du ministère de tutelle en France – commanditaire au surplus de l’opération. J’entends encore la faconde généreuse de monsieur Bénichou, très enthousiaste à l’idée de nous embarquer dans cette aventure. Mais, à l’opposé, il y avait le scepticisme de Jérôme Carlos, voulant qu’on spécifie davantage les termes de référence. Il y avait aussi la réserve prudente du professeur Toussaint Tchitchi, s’interrogeant sur le sort des langues béninoises qui jouissent, depuis toujours, d’une certaine habitabilité avec la langue de Vaugelas. Je n’oublie pas non plus les réflexions d’un Roger Gbêgnonvi, rejoint par Benoit Alopkon, président de l’association des professeurs de français, les deux se demandant si les conclusions issues de cette consultation n’iraient pas garnir les étagères des bureaux de la coopération. Bref, petites inquiétudes et grandes interrogations s’étaient relayées ce jour-là…
Mais M. Bénichou, le coordonnateur du dossier, a rassuré tout le monde : il n’y a aucun arrière plan politique là-dessous ; cette étude s’intègre dans la dynamique des relations bilatérales que la France entretient avec le Bénin ; l’ambassade de France prend sur elle la responsabilité d’obtenir du ministère de tutelle des moyens conséquents pour mettre en œuvre les projets issus de cette étude. En tout cas, des synergies et même de grands desseins sont envisagés pour donner corps à l’entreprise.
    Des groupes de travail ont été alors mis sur pied. Le français tel qu’il se vit et se pratique dans les domaines les plus variés de la vie publique a été appréhendé sous tous ses pourtours : enseignement, médias, arts, littérature, recherches, administrations, commerce, etc.…Même la rue, espace de déconstruction et de récréation de la langue par les jeunes déscolarisés ou par les mamans aux pagnes débordants de fantaisie aguichante, a été interrogée.
 Je ne compte pas le nombre de réunions tenues, soit pour maintenir le dynamisme observé dans les groupes de travail, soit pour faire le point des réflexions en cours. Et à chaque fois, la même fois réitérée, les mêmes objectifs confirmés de l’ambassade. Et lorsqu’après des gobelets de sueur, le travail vint à être rendu, remerciements et sourires furent distribués à tous. Avec l’annonce, pour prochaine étape,  de l’étude du document par les instances de la rue Monsieur à Paris.
Mais depuis lors, c’est le calme des rivières oubliées. Rien qui puisse nous renseigner sur le sort réservé au travail. Rien qui puisse traduire l’intérêt des responsables de l’ambassade aux compétences  sollicitées. Cet  intérêt est  si manifeste que le document, dit-on, risque de se retrouver dans les oubliettes de la république. Une hypothèse plus que vraisemblable, puisque l’un des responsables de l’ambassade à qui j’ai adressé un courrier, ne sait plus à quel vodoun se vouer. De quoi alimenter les railleries de ceux qui, au départ, me disaient que cette entreprise ressemblait à s’y méprendre à un marché conclu entre le coq et le grain de maïs.
Certes, ce n’est pas travailler pour le roi de Prusse qui m’apparaît, ici, le plus gênant, mais c’est, je crois, le peu de cas que l’on manifeste vis-à-vis de toutes ces personnalités, anciens ministres, recteur de l’université, chercheur, journalistes, c’est-à-dire ce qui se fait de mieux dans l’intelligentsia béninoise.  Si le projet ne tient plus, il serait plus que judicieux de les mettre au fait. C’est une exigence d’information. Et donc de respect.
Florent COUAO-ZOTTI

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