A quelques mois de la présidentielle, annoncée pour le 30 novembre 2008, la Côte d'ivoire est en passe de gagner un pari sous l'ère Laurent Gbagbo. Dans la perspective de cette échéance capitale pour l'avenir de ce pays miraculé, quels peuvent être les atouts de l'homme qui, tant bien que mal, a réussi à sortir son peuple de l'engrenage d'une guerre qui menaçait de basculer son destin ?
A six mois de la tenue des premières élections de l'après-guerre, la côte d'ivoire attend de franchir un moment très important de son histoire. L'organisation effective de cette échéance dans la transparence, et sans qu'elle ne débouche sur les contestations habituelles des mauvais perdants, aura été un succès immense pour le peuple ivoirien et un grand mérite pour le régime de Laurent Gbagbo. Déjà, les divers états major politiques se mobilisent et affûtent leurs armes, comme si le scrutin allait se tenir dans quelques semaines. Cela, du fait de leur présence quasi permanente sur le terrain aux côtés des populations. Un mouvement perceptible tant du côté du pouvoir en place que de celui de l'opposition. Dans cette guerre électorale sans merci, dont les hostilités font déjà jour à six mois de la date fatidique, quels peuvent en être les enjeux pour le régime en place et les atouts dont le président Gbagbo pourraient se prévaloir pour prétendre venir à bout de ses opposants qui visiblement ne sont pas les premiers venus sur l'échiquier politique ivoirien ?
Plusieurs éléments se révèlent déterminants dans le débat politique en Cote d'ivoire et qui vont s'avérer déterminants dans la chasse aux suffrages des Ivoiriens pour la conquête de la magistrature suprême. Le tout premier reste la gestion de la guerre. S'il est vrai qu'elle a éclaté sous le pouvoir en place, il n'en demeure pas moins, à l'analyse des nombreuses péripéties qui ont jalonné les années de crise, que le président Laurent Gbagbo a réussi à faire preuve d'une appréciable dextérité politique pour sortir son pays du chaos. Qu'on l'aime ou qu'on ne l'aime pas, aujourd'hui il dirige la Côte d'ivoire avec ceux qui lui ont fait la guerre, dans une entente quasi parfaite. La fin justifie les moyens dit-on. Quels qu'aient été les événements qui ont marqué ces années de crise, le constat à ce jour révèle que le peuple ivoirien a renoué avec la paix. Le pays naguère scindé en deux se réunifie peu à peu. Chaque ivoirien peut désormais circuler plus librement et aller du nord au sud et de l'est à l'ouest sans craindre pour sa vie. Progressivement donc, la côte d'ivoire a renoué avec la paix, la paix nationale et intégrale grâce à la volonté de tous ses fils et filles, mais surtout du fait de la détermination du président Gbagbo à ne pas gouverner une nation divisée.
Des atouts certains
Les adversaires politiques de Gbagbo semblent avoir pris la mesure de l'enjeu du scrutin du 30 novembre prochain en se jetant très tôt dans la campagne électorale. Mieux, ils ont perçu que leur " ennemi commun " jouit d'atouts certains sur le terrain. N'a-il pas déjoué tous les pièges à lui tendus depuis la fameuse conférence de Linas -Marcoussis, en passant par les accords d'Accra I et II et de Pretoria jusqu'à ceux de Ouagadougou dont les seuls objectifs sont de le bouter du pouvoir ? Ses adversaires qui l'ont longtemps sous-estimé en le présentant ironiquement comme "un boulanger qui sait rouler tout le monde dans la farine ", selon la célèbre expression de feu le Général Guéi savent aujourd'hui qu'ils ont affaire à un habile politicien doublé d'un stratège hors pair. Outre le fait qu'il reste le véritable artisan de la paix concrétisée par l'accord de Ouagadougou, le président ivoirien reste également le plus populaire de ses futurs concurrents. Il gère le quotidien des ivoiriens, et peut de ce seul fait se prévaloir d'un bilan positif (malgré la guerre, l'économie de la Côte d'Ivoire ne s'est pas effondrée comme celle des voisins sierra léonais et libériens), pendant que ses adversaires peuvent être perçus à juste titre comme ceux par qui le malheur est arrivé à la Côte d'Ivoire : Bédié d'abord, pour avoir mal géré l'héritage d'Houphouët- Boigny et Allassane Ouattara pour avoir parrainé la rébellion.
Fort des ses avantages, Gbagbo peut faire valoir que c'est à cause de cette guerre qu'on lui a imposée, qu'il n'a pas pu mettre en œuvre son programme de gouvernement en particulier son fameux programme d'assurance universelle qui ambitionne d’étendre la couverture sociale à toutes les couches de la population. Il peut être admirablement servi par les décisions courageuses qu'il vient de prendre à la faveur des deux évènements qui ont marqué les années 2007-2008 à savoir, la grave crise énergétique qui frappe tous les pays de la sous région et ce qu'on appelle la crise alimentaire objet de manifestation de protestation de par le monde. C'est ainsi que son gouvernement vient de lancer un vaste programme d'électrification de toutes les localités les plus reculées du pays, sans exception. Et , à l'occasion de la fête du premier mai, et en réponse aux préoccupations exprimées sur la crise alimentaire dont la côte d'ivoire n'a pas été épargnée, il a décidé de donner à l'agriculture nationale " sa vocation première ". Détenant les rênes du pouvoir, le président Gbagbo apparaît comme celui qui est à l'initiative des réformes et des solutions aux préoccupations de ses compatriotes.
La cohabitation actuelle entre lui et Guillaume Soro, dont il a voulu et qu'il fait traduire dans l'accord de Ouaga a été un grand pas posé par le président ivoirien pour s'attirer la sympathie des populations des zones occupées par l'ex-rébellion. C'est dire qu'une bonne entente entre Gbagbo et Soro dans la gestion du pays pourra être d'un atout pour le chef de l'Etat ivoirien en terme de confiance des populations.
Alain C. Assogba
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