L’opinion publique s’inquiète de l’abandon par le président Boni Yayi de certains dossiers sensibles. Beaucoup se demandent si le chef de l’Etat a totalement jeté l’éponge dans les affaires Sbee et Soneb et d’autres dossiers de grande corruption dont plus personne ne parle, encore moins le gouvernement du changement.
« Qui va changer qui ? Qui va changer quoi ? », a déclaré le candidat malheureux, Me Adrien Houngbédji, au second tour de l’élection présidentielle de 2006, à Porto-Novo. Au fur et à mesure qu’on avance dans le mandat de Yayi, les faits semblent lui donner raison. Sinon, il y a certains dossiers sensibles sur lesquels le gouvernement ne fait curieusement plus aucun zèle, alors que le commun des mortels est soucieux de connaître la vérité. Est-ce parce que les partisans du pouvoir en place y sont impliqués ? Difficile de répondre à cette interrogation. Les dossiers qui avaient fait beaucoup de bruits en leur temps étaient l’affaire de la Société béninoise d’énergie électrique (Sbee) et celle de la Société nationale des eaux du Bénin (Soneb). Concernant la Sbee, le gouvernement était déterminé à aller jusqu’au bout de ses investigations pour la manifestation de la vérité. A l’époque, le chef de l’Etat avait demandé avec insistance la levée de l’immunité parlementaire des députés Célestine Adjohoun et Luc Sant’ana Da Malta, respectivement directrice générale et directeur général adjoint, au moment des faits, tous deux des élus sur la liste Forces cauris pour un Bénin émergent (Fcbe), soutenant le pouvoir. Ces derniers étaient accusés d’avoir passé un marché de gré à gré de plusieurs milliards de francs et dilapidé les fonds de la société. Même si la procédure était irrégulière, l’opinion avait néanmoins décerné un satisfecit au pouvoir en place dans sa volonté de lutter contre la corruption et l’impunité, surtout qu’il a décidé de frapper dans son propre camp. Le vice de procédure dans la saisine de l’Assemblée nationale n’a pas arrangé les choses.
Des mois après, ml dossier semble tomber dans l’oubliette. A analyser de près, il n’est pas question de chercher loin. Face aux réalités du pouvoir, le président Boni Yayi a dû reculer pour limiter les problèmes politiques qui risquent de lui coûter cher dans l’avenir. Pour preuve, au lendemain de cette affaire, l’Assemblée nationale est rentrée en conflit direct avec le gouvernement. De jour en jour, sa majorité s’est effritée au Parlement. Devant cette situation, il doit choisir de satisfaire les exigences du peuple ou répondre à des exigences politiques pour se maintenir au pouvoir. Apparemment, il a déjà choisi son option.
En outre, il y a l’affaire Soneb qui avait abouti au limogeage de son directeur général. On se souvient que l’Inspection générale de l’Etat a fait ses investigations et découvert des graves irrégularités. Curieusement, le gouvernement n’a pas daigné informer le peuple des résultats de ces enquêtes. Sachant toutes les peines et les contraintes qui ont amené le président Yayi à finir par limoger le dg Soneb, on ne s’étonne pas que ce dossier soit aussi rapidement enterré.
Plusieurs autres affaires sont aujourd’hui dans les placards. Le dossier de fraude électorale à la Commission électorale nationale autonome (Cena) en 2007 , les enquêtes au Conseil national des chargeurs du Bénin (Cncb), à la Loterie nationale du (Lnb), les audits dans l’administration publique et autres actions de lutte contre la corruption et l’impunité annoncés à grands renforts médiatiques. De plus en plus donc, le président Yayi se démarque de la lutte contre la corruption qu’il avait si bien miroitée aux Béninois.
Jules Yaovi MAOUSSI