Chinatown JO: la Chine censure Internet, et le fait savoir

Par Pierre Haski | Rue89 | 30/07/2008 | 13H01
C’est officiel : les journalistes couvrant les Jeux olympiques n’auront pas accès à tous les sites. Une annonce en forme de provocation.

Ce qui est surprenant, c’est qu’ils le disent, pas qu’ils le fassent. La déclaration d’un porte parole chinois, mercredi, confirmant que les accès Internet destinés aux milliers de journalistes étrangers qui iront à Pékin couvrir les Jeux olympiques seront censurés, a fait l’effet d’une bombe. Et suscité des réactions indignées. Provocation, maladresse ou arrogance calculée? Toujours est-il que la déclaration de Sun Weide, porte-parole du comité d’organisation des JO de Pékin, n’est pas faite pour calmer les esprits. Il a expliqué que la Chine s’était engagée à fournir un accès Internet, pas l’accès à TOUS les sites Internet! Pour le responsable, c’est simple: « Notre promesse était que les journalistes pourraient se servir d’Internet pour leur travail pendant les Jeux olympiques. Et nous leur avons donné suffisamment d’accès pour cela ». L’accès aux sites de la BBC et de la Deutsche Welle déjà perturbé « Suffisamment »? Si on vous le dit. Le porte-parole a cité le site du Falungong, la secte honnie depuis près d’une décennie, comme exemple des adresses qui resteront bloquées. Il a mentionné d‘« autres sites », sans donner de nom. Mais les journalistes déjà présents ont eu quelques difficultés à se connecter depuis le centre de presse aux sites de la BBC, la Deutsche Welle et quelques autres sites d’information tout à fait classiques. De fait, il n’y a pas de surprise dans le fait que Pékin maintienne certaines des restrictions en vigueur en permanence en Chine, qui a le plus gros réseau Internet au monde, mais aussi le plus contrôlé et le plus verrouillé au monde. Mais cette confirmation du porte parole à huit jours de la cérémonie d’ouverture a des allures de provocation. Comme si le gouvernement chinois voulait signifier au reste du monde, et d’abord aux Occidentaux, que la Chine ne se laisserait rien imposer de l’extérieur, et gèrerait des questions comme l’accès à l’information selon ses propres critères et valeurs. Une réponse à George Bush? Cette annonce peut aussi être interprétée comme une réponse au petit geste de George Bush, qui a rencontré mardi à la Maison Blanche les plus connus des dissidents chinois, comme Wei Jinsheng, le « Mandela chinois » emprisonné pendant près de deux décennies, Rebiya Kadeer, personnalité ouïgour expulsée aux Etats-Unis à sa libération de prison en Chine, ou Harry Wu, ancien du laogai, le « goulag » chinois. Une concession à la cause des droits de l’homme, avant de s’envoler pour Pékin pour l’ouverture des Jeux. Le plus embarrassé par ce brusque durcissement du climat à la veille des Jeux, c’est évidemment le Comité international olymique (CIO), qui a endormi la planète pendant sept ans avec les vagues promesses de libéralisation chinoises. C’est le CIO qui va devoir gérer aujourd’hui les questions embarrassantes, et rendre des comptes sur sa complaisance.

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